Difficile de trouver des points positifs, au moment de faire le bilan de l’année 2014. Le CPP en a fait le constat: le quatrième mandat l’a hanté tout le long de l’année!
L’année 2014 a été plombée par le quatrième mandat. Tout ce qui s’est fait et dit tournait autour de cette échéance. Depuis sa création, le CPP (Café Presse Politique) de Radio M, né peu avant l’élection présidentielle d’avril 2014, a évoqué le président Bouteflika et son 4ème mandat plus que n’importe quel autre sujet. Et au moment de tourner la page 2014, pour cette dernière émission du 31 décembre, Souhila Benali a posé la question qui fâche : que retenir de l’année 2014 ? Le 4ème mandat, bien sûr.
Pour Abdelkrim Ghezali, le 4ème mandat « a pris l’Algérie en otage », pour se mettre au service « d’ambitions personnelles, de calculs égoïstes du pouvoir et de ses alliés dans la sphère économique ». Pour lui, l’Algérie a « oublié les enjeux et les projets, pour focaliser toute son attention sur une personne ».
Saïd Djaafar écorche Ali Benflis, « un des grands électeurs de Bouteflika ». Il déplore que « des hommes comme Benflis aient accepté de cautionner la présidentielle par leur présence ». Khaled Drareni estime que Benflis voulait plutôt se positionner pour la suite ».
Pour El-kadi Ihsane, l’absence de candidats crédibles à la présidentielle constitue « le grand échec » de l’ère Bouteflika. Celui-ci « a fait le vide », éliminant tous les candidats potentiels, à l’intérieur du système et à l’extérieur. Abed Charef rappelle l’absence de vie politique, pour affirmer que « c’est la vie politique qui crée les hommes politiques ».
Humiliation
Mais 2014 ne se limite pas à « la grande humiliation » que fut le quatrième mandat, selon la formule de Abed Charef. Il y a eu aussi la rencontre de l’opposition le 10 juin à Zéralda, rencontre que El-Kadi Ihsane considère comme « un acte fondateur de l’opposition ». Saïd Djaafar rappelle aussi qu’il faudra peut-être remercier Amar Saadani, qui a « franchi une ligne jaune en attaquant frontalement le DRS ».
Le pays connait des lignes jaunes et des lignes rouges, mais ignore la constitution. Souhila Benali demande ce qu’il faut attendre de la révision de la constitution, relancée par le président Bouteflika lors du dernier conseil des ministres. Le chef de l’Etat « a déjà promis à deux reprises une révision de la constitution, il ne l’a pas fait », rappelle Abdelkrim Ghezali, pour qui « le plus important, c’est une institution qui garantisse les droits et libertés ; c’est l’indépendance de la justice ».
Pour El-Kadi Ihsane, la révision de la constitution, c’est juste « un contre-feu », qui sera utilisé « en cas de crise politique ou de contestation populaire ». Pour lui, « le pouvoir est concentré à la présidence, et « s’il ne se passe rien de transcendant, la révision de la constitution ne sera se fera pas ». Abed Charef se demande : « une nouvelle constitution, pourquoi faire? Adopter une nouvelle constitution n’a pas de sens quand on se refuse d’appliquer celle qui est en vigueur ». Saïd Djaafar rappelle que le président Bouteflika a supprimé de fait le poste de chef de gouvernement, sans attendre l’amendement de la constitution. Pour le président Bouteflika, « le gouvernement ne doit pas exister, il veut se contenter « d’une sorte de secrétaire » qui exécute ses décisions. Quant à Khaled Drareni, il se demande ce qu’il faut attendre des promesses du président Bouteflika.
La norme légale ne fait pas recette
Autre sujet qui a marqué l’année 2014, le terrorisme. Les avis divergent. Pour El-Kadi Ihsane, un seuil de violence est maintenu pour justifier certaines décisions, et qu’une « partie des services de sécurité n’est jamais sortie de la guerre civile ». Saïd Djaafar estime qu’il « n’y a pas besoin de maintenir un seuil de violence, il y a suffisamment d’abcès aux frontières pour justifier les affectations budgétaires ». A Ghardaïa, rappelle-t-il, « les policiers ont commencé à rouspéter quand ils ont été appelés à respecter la forme légale ».
Abed Charef affirme que «l’Algérie a abandonné l’idée d’éliminer le terrorisme, elle va vivre avec pour une décennie ou plus, le gérer, et essayer de grignoter sur le long terme les espaces occupés par le terrorisme ». Il rappelle que « l’armée et les services de sécurité sont sous pression depuis deux décennies, aucun corps ne peut supporter une pression pareille ».
Apprendre la bonne gouvernance avec moins d’argent ?
Un dernier virage pour parler économie, avec la chute des prix du pétrole et ses conséquences sur l’Algérie. Dire qu’on a un matelas financier pour faire face à la crise est un « discours irresponsable », affirme Abdelkrim Ghezali. Cette situation va « contraindre le pouvoir à composer avec les forces sociales qui vont émerger ».
Abed Charef est plus tranché. « On n’a pas de problème économique, on a un problème politique », dit-il. « On a eu de l’argent, on en a fait quoi ? ». Saïd Djaafar rappelle que l’Algérie « a essayé de réfléchir quand le pays a manqué d’argent ».
Ek-Kadhi Ihsane se demande si cette baisse provoquée par l’Arabie Saoudite est « un coup de semonce ou un choix de long terme ? Si c’est un choix de long terme, on est morts ». Fait aggravant, note-t-il, « la crise arrive en 2014, au moment où s’est effondrée la capacité de gouvernance de l’Etat algérien. On est plus faible en termes de capacités de réponse ».
Peut-être alors que l’Algérie va se remettre à réfléchir à apprendre la bonne gouvernance, si elle a moins d’argent ? Le CPP n’exclut pas cette hypothèse, ce qui ouvre une porte pour espérer une année 2015 bien meilleure.
Bonne année.
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