Accusé de vendre un médicament « à perte », le patron de Merinal … en mandat de dépôt - Maghreb Emergent

Accusé de vendre un médicament « à perte », le patron de Merinal … en mandat de dépôt

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A la tête d’un groupe de 900 salariés, premier exportateur de médicaments en Algérie, Nabil Mellah, citoyen engagé, subi un harcèlement judiciaire depuis plusieurs années.

Le directeur général de Merinal, 2e groupe pharmaceutique en Algérie, Nabil Mellah, a été placé sous mandat de dépôt en fin d’après midi de ce dimanche 09 mai. Le juge d’instruction auprès de la 6e chambre du tribunal de Sidi M’hamed l’a inculpé de blanchiment d’argent et d’infraction sur les mouvements de capitaux.

En fait le laboratoire algérien, premier exportateur de médicaments, est accusé d’avoir importé et vendu à perte un médicament pendant plusieurs exercices. Une semaine d’aller et retour à la gendarmerie de Bab Ejedid dans le cadre d’une enquête préliminaire n’a pas permis de classer sans suite une plainte du ministère de l’industrie pharmaceutique pour « pratique commerciale illicite » contre Vapropharm, une « sister-compagnie » de Merinal.

Nabil Mellah est passé au statut de garde à vue le jeudi 06 mai puis a été présenté, avec son frère Ryad, au procureur prés du tribunal d’Alger ce dimanche après midi. Co-gérant, son frère comparaitra libre. « La vente à perte est illégale » a rappelé un expert fiscal à Maghreb Emergent, « mais s’il est démontré que le prix de vente pratiqué ne porte pas de préjudice financier à l’entreprise qui le pratique, alors il ne peut pas s’agir d’une vente à perte ». C’est exactement le cas dans l’affaire du produit Imurel, pour laquelle, le patron de Merinal a été mis en détention.   

500 000 euros de flux de remboursement

En 2015, la pharmacie centrale des hopitaux (PCH) lance un appel d’offres pour une classe de médicaments d’immunodépresseurs auquel participe Vapropharm, une entreprises sœur de Merinal, mais elle n’est pas retenue à cause d’un prix moins compétitif que celui de la concurrence.

Afin de garantir l’approvisionnement de ce médicament, la PCH propose 50% du marché à l’entreprise soumissionnaire Vapropharm à condition qu’elle s’aligne sur le prix le moins disant (9,10 euros la boite). Le laboratoire sud-africain Aspen, fournisseur du médicament immunodépresseur Imurel à Merinal, accepte de payer la différence avec son prix de référence enregistré au ministère de la santé. Il s’aligne sur le prix de vente exigé par la PCH et s’engage à reverser à son partenaire algérien Vapropharm, le différentiel ainsi que sa marge commercial d’importateur de Imurel pour les lots régulés par la PCH.

A la fin de chaque cycle, un virement de compensation est adressé à Vapropharm sur la base du nombre de boites commercialisées. Les flux entrants en devises de l’Afrique du Sud vers la banque d’Algérie avoisinent les 500 000 euros, et sont consignés dans les relevés de l’entreprise et de la banque primaire du laboratoire algérien. L’enquête préliminaire a accepté ces justificatifs pour deux autres médicaments pour lesquels la vente à perte n’a pas été retenue. Elle l’a rejeté pour Imurel en dépit de toutes les pièces montrant que Vapropharm ne vendait pas à perte. 

L’accusation de blanchiment d’argent et infraction sur les mouvements de capitaux est l’inculpation, désormais classique, dans les procès pour sous-facturation à l’importation pratique qui avait gangrénée l’économie algérienne sous Bouteflika.

Dans le cas de Vapropharm et de l’importation de Imurel, il s’agit bien d’un mouvement inverse ou le fournisseur envoie vers son partenaire en Algérie le différentiel entre le prix de vente – enregistré au ministère de la santé – et le prix de cession du médicament à la PCH. C’est ce qui a laissé dire à un de ses avocats, surpris par la décision du juge d’instruction de mettre en détention provisoire Nabil Mellah, que « l’audition s’est très bien déroulée. On n’a pas compris l’issue. C’est comme s’il y’ avait un sous-dossier dans cette affaire ». 

Un acteur majeur du développement

Nabil Mellah est un chef d’entreprise engagé de longue date pour le développement de la filière pharmaceutique. Secrétaire général de la puissante Union nationale des opérateurs en pharmacie (UNOP) pendant plus de dix ans, et son président entre 2011 et 2013, Nabil Mellah a œuvré pour la promotion de sa filière transformant Merinal en un acteur dynamique de l’exportation de médicaments vers 10 pays dans le monde pour plus de 120 millions de dollars de revenus en cumulé.

Il est connu également pour son également citoyen, notamment à travers sa participation, en 2018, au mouvement Mouwatana hostile à la présidence à vie de Abdelaziz Bouteflika et prémisse du 22 février 2019.

Nabil Mellah est le 3e actionnaire de Interface Médias SPA éditeur de Radio M et de Maghreb Emergent et membre de son conseil d’administration depuis 2017.

Le directeur de Merinal a connu un harcèlement judiciaire soutenu ces dernières années avec notamment des poursuites par la banque d’Algérie pour une remise de 200 dollars sur une de ses factures à l’exportation et un procès à Oran pour un marché remporté par Merinal mais pour lequel l’entreprise n’a jamais été payée. La plainte, adressée également à d’autres fournisseurs, disait que le produit mis dans l’appel d’offres, remporté par Merinal, n’était pas essentiel aux besoins de l’hôpital d’Oran.

Entre les 200 dollars à l’exportation, le produit impayé à Oran, et « la vente à perte » pour Imurel, les poursuites contre Nabil Mellah se conjuguent toutes sous le spectre d’un « sous dossier » invisible.

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