Le remaniement ministériel annoncé jeudi 14 mai est « non-évènement » ont estimé plusieurs responsables de l’opposition. Jugement nuancé sur les réseaux sociaux: il y a eu un « évènement » dans ce quatrième remaniement du gouvernement Sellal et il se nomme Houda-Imane Faraoun.
L’arrivée de la nouvelle ministre de la Poste et des Technologies de l’information et de la communication (PTIC) a été la nomination la plus commentée, encore plus que le départ de « l’homme de schiste », Youcef Yousfi ou de celui de Nadia Labidi, objet d’une campagne particulièrement vindicative menée par la secrétaire générale du Parti des Travailleurs, Louisa Hanoune.
La nouvelle ministre apporte un « coup de jeune » totalement inattendu au gouvernement. Son prénom: « Houda-Imane, ça renvoie à la génération des années 80 et c’est la première fois qu’une ministre le porte », commente une observatrice de la vie politique algérienne. Un nom new-wave – comme d’autres – dans une Algérie « un peu plus religieuse voire bigote. Mais elle est une scientifique, c’est quand même un bon signe malgré ce nom marqué qui signifie la voie et la foi » observe, amusé, un autre observateur.
Houda-Imane Faraoun a déjà un parcours qui impressionne. Bachelière à 16 ans, diplômée en physique du solide à 22, doctorante à 26 et professeure de l’université de Tlemcen à 34 ans. Auteure de plus de 40 publications scientifiques, elle dirigeait depuis l’Agence thématique de la recherche en sciences et technologies (ATRST) rapporte le magazine El-Djazaïr qui consacre un long et élogieux portrait intitulé « Une patriote scientifique » dans son numéro de mai.
Enfin, parce qu’elle la seule femme à rejoindre le gouvernement sur les huit nouveaux ministres, tandis que quatre le quitte dont celle qui la précédait au ministère, Zohra Derdouri. « Une Houda-Imane vaut bien quatre femmes », persifle le même observateur.
Nombreux chantiers
Ce « coup de jeune » annonce-t-il un vrai effort de rattrapage dans un secteur des TIC à la traîne? C’est la question. Car Houda-Imane Faraoun aura besoin de tous ses talents à la tête d’un ministère où il y a fort à faire. Avec un taux de pénétration internet de 20%, l’absence d’e-paiement, la fermeture aux fournisseurs d’accès privés et une 3G lancée tardivement, l’Algérie accumule un inquiétant retard dans le domaine.
Les responsables du secteur n’ont récolté que de grands échecs, soulignait Ali Kahlane, spécialiste des TIC et PDG de la startup Satlinker, lors de son passage à Radio M, le 31 décembre dernier. Et de citer le e-Algérie 2013, pensé 2008 puis mis aux oubliettes, le projet de mise en place d’un réseau de recherche, l’observatoire des TIC, le Fonds d’aide aux TIC (Faudtic) de 5 milliards de DA, le point d’interchange (GIX)…etc.
« Tous ces projets ont « implosé » non seulement parce que les responsables placé à la tête du secteur étaient sans feuille de route mais aussi en raison de la défiance que ces derniers nourrissent à l’égard du privé », déclarait-t-il. Ali Kahlane reprochait notamment à la précédente ministre Zohra Derdouri, l’échec de la certification électronique, un projet lancé en 2009 par elle-même lorsqu’elle était aux commandes de l’ARPT, puis reporté à 2017.
Autre grief retenu contre l’ancienne ministre: le retrait de la loi sur les Télécoms à l’Assemblée populaire nationale (APN) qui apportait une mise à jour de la loi 2000/03, de nouvelles mesures pour le « dégroupage » des infrastructures réseau et introduisait le concept d’opérateur virtuel (MVNO). De grands chantiers. Mais certains s’étonnent de voir que la toute jeune ministre n’a pas de compte Facebook ou Twitter. Si jeune et pas branchée? Un mystère à décrypter…sur ce bel OVNI qui fait « l’évènement dans le non-évènement ».