Dans cet article, la journaliste du Huffington Post Algérie revient sur l’intervention télévisée du Premier ministre Abdelmalek Sellal sur l’exploitation du gaz de schiste en Algérie et les réactions qu’elle a suscitées.
Abdelmalek Sellal a tenté, hier, durant l’émission « hiwar essaa »(Dialogue de l’heure) l’exercice difficile d’apaiser les opposants au gaz de schiste dans le sud du pays sans renoncer à l’option stratégique, déjà prise, d’exploiter les hydrocarbures non-conventionnels.
Il a annoncé que Sonatrach va se contenter de terminer un deuxième forage de prospection en cours dans l’Ahnet dans les prochaines semaines et on « arrêtera définitivement pendant quatre ans pour faire des études et former des cadres ».
La concession parait importante et répond à un souci de calmer le jeu et de se donner le temps de convaincre les populations du Sud du pays dont la mobilisation a pris de court les autorités qui ont essayé vainement de reprendre la main en envoyant des experts et des ministres à In Salah.
Sellal, face à des journalistes qui n’ont pas apporté la contradiction et ont attendu complaisamment la fin de l’émission pour poser la question du gaz de schiste se retrouvait dans la posture de celui qui cherche à calmer les opposants à une décision de politique économique sans renoncer à cette dernière.
Il a promis de se contenter des deux forages pour des études expérimentales nécessaires à la formation et de faire une pause de quatre ans. Les mots attendus « place de la résistance » comme « gel », « suspension » ou « moratoire » n’ont pas été prononcés de crainte qu’ils ne donnent un signal de « recul » face à la contestation. Même si dans les faits, la décision de se contenter des deux puits constitue une concession qui contraint Sonatrach à revoir ses plans.
Mais ce « demi-pas » en direction des contestataires risque d’être interprété comme une « manoeuvre » comme le montrent d’ailleurs les premières réactions sur une des pages Facebook des contestataires » où l’on se moque ouvertement de l’affirmation de Sellal selon laquelle il dirige un « gouvernement de dialogue ».
Une « manœuvre »
Les premières réactions à In Salah étaient plutôt critiques hier soir à In Salah où l’on ne semble en général guère avoir été convaincu par le plaidoyer de Sellal.
Sur les réseaux sociaux, immédiatement après la prestation de Sellal, circulait une rumeur, relayée par Tahar Belabbas, animateur du Comité national pour la défense des droits des chômeurs (CNDDC) d’une démission du député RND de Tamanrasset, Baba Ali.
« Le député Baba Ali du RND de Tamanrasset annonce sa démission de sa fonction de député et rejette les déclarations de Sellal. Il estime que le propos de Sellal comporte de la ruse et de la désinformation… » Il était difficile de confirmer cette information fortement relayée sur les réseaux sociaux. La journée d’aujourd’hui va donner une idée de la manière dont a été reçu le message d’Abdelmalek Sellal.
Des comités et des collectifs de contestataires du gaz de schiste entendent « marcher » aujourd’hui pour réclamer l’arrêt pur et simple des opérations de forage. Le Comité national pour la défense des droits des chômeurs (CNDDC) avait d’ailleurs annoncé la couleur bien avant en appelant les militants à ne pas accorder d’importance à ce que dira le Premier Ministre.
« Notre marche contre l’exploitation du gaz de schiste aura lieu comme prévu à la place 27-Février, en face du siège de l’APC d’Ouargla » a indiqué le CNDDC. A In Salah, certains estimaient que les explications sur la nature purement expérimentale des deux seuls forages de la région doivent être prises en compte mais la tendance générale rapportent des correspondants de presse était au rejet et au maintien de la protestation dans la rue.
Le comité d’organisation de la contestation était réuni hier soir et il doit annoncer sa position sur les déclarations de Sellal au cours de la matinée. A Tamanrasset, le mouvement « Maferat » maintient la marche prévue devant le siège de la wilaya. D’autres actions sont prévues aujourd’hui à Adrar, Illizi, Laghouat, Batna… et à Bejaïa.
Abdelkader Bouhafs, un des acteurs de la contestation à In Salah, cité par TSA, indique ne pas avoir « compris s’ils iront vers la fracturation pour ce qui est du deuxième puits ou pas…. S’il n’y a pas d’arrêt immédiat, la contestation se poursuivra ». « Sellal est irresponsable et n’a pas mesuré la gravité de la chose. On attend une annonce solennelle du Président ».
La prestation de Sellal n’aura-t-elle servi à rien?