Une conférence sur les exportations vers l’Afrique sera organisée en mars en Algérie. C’est le nouvel eldorado promis, après l’échec des politiques mises en œuvre jusque-là.
La baisse spectaculaire du prix du pétrole, et ses implications directes sur les finances de l’Algérie, a relancé le discours sur la nécessité de développer les exportations hors hydrocarbures. Gouvernement et administration multiplient les déclarations en ce sens, mais la réalité reste cruelle : exporter reste, pour une entreprise algérienne, un vœu, ou un slogan ; mais ce n’est pas un programme politique, car l’économie algérienne est structurellement organisée de manière à empêcher l’exportation.
Le discours en vogue sur la nécessité de diversifier l’économie pour se placer sur les marchés internationaux est « un mélange d’incompétence et de mensonge », qui a débouché sur un résultat toujours aussi insignifiant : 2,8 milliards de dollars d’exportations hors hydrocarbures en 2014, essentiellement des dérivés du pétrole, rappelle un économiste. En cause : la faible production, la parité du dinar, les accords internationaux favorables aux partenaires étrangers, et une longue tradition du commerce algérien fondée essentiellement sur les importations.
La question a été abordée lors d’une tripartite, en 2011. La réunion a adopté près de 60 mesures pour faciliter les exportations. Six d’entre elles seulement ont été appliquées, selon le directeur Général de l’Agence Nationale de Promotion du Commerce Extérieur (Algex), Boukhalfa Khemnou.
Quand la bureaucratie s’en mêle
Pour lui, « les formalités administratives sont longues, la règlementation de changes contraignante, et la qualité des produits insuffisante. La banque d’Algérie a introduit des mesures d’assouplissement, offrant notamment des délais plus longs pour le rapatriement des devises, mais « cela reste contraignant ». Des chefs d’entreprises ont même été condamnées à des peines de prison avec sursis pour ne pas avoir rapatrié à temps les devises, a-t-il indiqué.
M. Khemnou botte cependant en touche quand la responsabilité de l’Algex est en cause. « On a identifié toutes les contraintes », dit-il, mais il rejette sur les autres « acteurs » la responsabilité de l’échec : entreprises non performantes, ports non adaptés, procédures de la Banque d’Algérie, des banques non habituées à ces procédures. « C’est leur domaine de compétence, on ne peut pas les forcer » à prendre les mesures nécessaires, dit-il.
Le Conseil consultatif chargé de la promotion des exportations, qui devait être créé depuis une décennie, n’a toujours pas installé. Mais M. Khemnou ne s’en offusque pas. « Ça sert à quoi de mettre en place un conseil s’il n’y a pas de politique d’exportation ? », se demande-t-il. Il défend cependant son territoire. « Il faut qu’Algex soit le seul mandataire dans l’exportation », affirme-t-il, regrettant qu’il y ait « beaucoup d’interlocuteurs ». Pour lui, « il faut qu’il y en ait un seul ».
Trop peu d’entreprises exportatrices
A l’inverse, il reconnait que « l’importation est la chose la plus facile en Algérie ». Des entreprises exportatrices « ont été contraintes de fermer à cause des importations, et se sont converties à leur tour dans l’importation, a-t-il dit. Son agence recense 155 entreprises qui « exportent de manière permanente », et « 350 à 400 qui le font de manière irrégulière ». Il y a également 200 autres qui ont des possibilités d’exporter.
M. Khemnou plaide pour « une décision politique avec effet immédiat » en vue d’encourager les exportations. Son discours colle avec les choix du gouvernement : le premier ministre Abdelmalek Sellal a annoncé une conférence, en mars prochain, pour examiner les moyens de favoriser les exportations vers l’Afrique, un créneau à la mode depuis quelques mois en Algérie.
Il affirme, curieusement, que l’accord d’association avec l’Union européenne ne gêne pas les exportations algériennes, alors que cet accord est décrié par la plupart des producteurs, qui mettent en cause son opportunité. Pour lui, cet accord « n’était pas une erreur ».