Forum Africain d'Investissements et d'Affaires : quelle coopération entre l’Algérie et l’Afrique ? (contribution) - Maghreb Emergent

Forum Africain d’Investissements et d’Affaires : quelle coopération entre l’Algérie et l’Afrique ? (contribution)

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L’Algérie accueille une importante rencontre du 3 au 5 décembre 2016. C’est une initiative louable, rentrant dans le cadre de l’urgence d d’une nouvelle politique socio-économique 2017/2020 , loin d’une économie rentière, et du redéploiement de la diplomatie économique algérienne (1).

L ’Afrique, enjeu du XXIe siècle, continent à fortes potentialités doit revoir sa gouvernance
L’Afrique couvre 30,353 millions de km2. La population est passée de 966 millions d’habitants en 2009 à plus de 1 075 millions, mais sept pays regroupent 51% de la population. En 2020, la population africaine devrait passer à 1,3 milliard et à 2 milliards en 2040. Cependant, il existe non pas une Afrique mais des Afriques. Certains pays notamment le Nigeria, le Gabon, le Tchad, la République démocratique du Congo, l’Algérie, la Libye sont spécialisés dans le pétrole, le gaz et les matières premières, qui connaissent une forte demande et un prix élevé sur le marché mondial leur permettant une relative aisance financière mais artificielle en fonction des cours mondiaux et donc de la croissance de l’économie mondiale notamment des pays développés et émergents. A l’inverse, des pays comme le Bénin, le Malawi, l’Ile Maurice, le Swaziland, l’Ethiopie, le Togo, le Mali, qui sont pénalisés dans des produits qui connaissent souvent une détérioration en termes d’échange, la misère, la famine et souvent des conflits internes et externes où le budget des dépenses militaires en Afrique dépassent l’entendement humain au détriment de l’allocation des ressources à des fins de développement. Malgré cette diversité et ses importantes potentialités, l’Afrique est marginalisée au sein de l’économie mondiale mais existe un avenir promoteur comme l’atteste la majorité des rapports internationaux. Pour l’instant, selon l’IRES de Paris, l’Afrique représente seulement 1,5% du PIB mondial, 2% du commerce mondial et 2% à 3% des investissements directs étrangers. Selon un rapport de la Banque africaine de développement (BAD-2013), le commerce interafricain n’est que de 15% sur tout le continent, les échanges intermaghrébins représentant également moins de 3%. Les raisons sont multiples : manque de capitaux, d’infrastructures et mauvaise gouvernance. Sans compter les taxes douanières qui coûtent très cher. Tous ces problèmes de logistiques associés au manque de compétence des ressources humaines constituent un sérieux frein à la fluidité des échanges alors qu’une entreprise a besoin d’une main-d’œuvre qualifiée ». Selon Amath Soumare, président fondateur de Sopel International et président du Centre africain de la Nouvelle économie, CANE Executive, l’Afrique voit s’échapper chaque année 192 milliards de dollars causés par des flux illicites contre seulement 30 à 40 milliards d’aide au developpement, a révélé le 30 novembre 2016 à Dakar, Amath Soumare, président fondateur de Sopel International et président du Centre africain de la Nouvelle économie, CANE Executive. Ainsi, les dirigeants africains portent une lourde responsabilité devant leur population et doivent favoriser l’Etat de droit, la bonne gouvernance, donc, la lutte contre la corruption et les mentalités tribales, la protection des droits de l’Homme et s’engager résolument dans la réforme globale, donc la démocratisation de leur société tenant compte de l’anthropologie culturelle évitant de plaquer des schémas déconnectés des réalités sociales. Le développement de l’Afrique sera profitable à l’ensemble des autres espaces économiques évitant cette migration clandestine avec des milliers de morts. Dans le cas contraire, il est à craindre des crises politiques à répétition. Bon nombre de citoyens africains traversent une crise morale du fait du manque de valeurs au niveau du leadership avec le danger d’une polarisation de la société. Le fossé entre les riches et les pauvres devient de plus en plus grand. L’écart de revenus renforce les inégalités en matière de richesse, d’éducation, de santé et de mobilité sociale. Je mets en garde contre les conséquences pernicieuses du chômage. Cependant, évitons la sinistrose, malgré des conflits, nous enregistrons récemment une prise de conscience des citoyens africains et de certains dirigeants de l’urgence d’une nouvelle gouvernance et l’urgence de la valorisation de l’économie de la connaissance. Pourtant, l’Afrique est un grand enjeu géostratégique. Les différentes rencontres avec les grands pays sur l’avenir de l’Afrique montrent surtout la rivalité du couple Etats-Unis/Europe –Chine pour le contrôle économique de ce continent vital. L’erreur fatale serait d’opposer en ce XXIe siècle les Etats-Unis et l’Europe qui ont le même objectif stratégique, bien qu’existant certaines rivalités tactiques de court terme, la stratégie des firmes transnationales tendant à atténuer les divergences et uniformiser les relations internationales. Ainsi, l’Afrique, pour peu que les dirigeants dépassent leurs visions étroites d’une autre époque, a toutes les potentialités pour devenir un grand continent avec une influence économique dans la mesure où en ce XXIe siècle l’ère des micro-Etats est révolue et que la puissance militaire est déterminée par la puissance économique. Pour cela, des stratégies d’adaptation au nouveau monde sont nécessaires pour l’Afrique, étant multiples, nationales, régionales ou globales, mettant en compétition/confrontation des acteurs de dimensions et de puissances différentes et inégales. . Face aux bouleversements géostratégiques, l’Afrique est appelée à se déterminer par rapport à des questions cruciales et de relever des défis dont le moins qu’on puisse dire est qu’ils dépassent en importance et en ampleur les défis qu’elle a eus à relever jusqu’à présent. Mais avant tout, l’Afrique sera ce que les Africains voudront qu’elle soit.

L’Algérie et l’Afrique

Pour les six premiers mois de l’année 2016, selon les statistiques douanières rapportées par l’agence officielle APS le 20 juillet 2016 qui note que déficit commercial de l’Algérie a atteint 10,83 milliards de dollars (mds usd) au 1er semestre 2016 contre un déficit de 8,51 mds usd à la même période de 2015, soit une hausse du déficit de 27,2%. Les exportations ont nettement reculé à 12,68 mds usd durant les six premiers mois 2016 contre 18,93 mds usd sur la même période de 2015 (-33,02%), soit un recul de 6,25 mds usd et le taux de couverture des importations par les exportations est ainsi passé à 54% contre 69% entre les deux périodes de comparaison. Les hydrocarbures continuent à représenter l’essentiel des ventes algériennes à l’étranger pour une part de 93,55% du volume global des exportations, avec un montant de 11,86 mds usd durant les six premiers mois, contre 17,868 mds usd à la même période de 2015 (-33,62%), soit une baisse de six mds usd. Les exportations hors hydrocarbures, qui ont représenté 6,45% du montant des exportations, ont diminué à 818 millions usd, en baisse de 22,83% par rapport aux six premiers mois de 2015. Ainsi nous avons la structure suivante :

– des demi-produits avec 624 millions usd (contre 846 millions us en 2015 pour la même période),
– des biens alimentaires avec 129 millions usd (contre 150 millions usd en 2015
– des produits bruts avec 34 millions usd (contre 50 millions usd en 2015),
– des biens d’équipements industriels avec 22 millions usd (contre 8 millions usd en 2015)
– des biens de consommation non alimentaires avec 9 millions usd (contre 6 millions usd en 2015).

Ainsi, dans la structure des exportations algériennes, les hydrocarbures continuent à représenter l’essentiel des ventes à l’étranger. Pour les six mois de 2016,(93,55%) nous avons une petite amélioration en pourcentage mais une importante baisse en valeur globale. Si on inclut les dérivées d’hydrocarbures, nous aurons plus de 97% provenant des hydrocarbures. Le secteur privé actuellement du fait des contraintes participant aux entrées de devises pour moins de 2%. Selon l’ONS, 83% de la superficie économique est constituée de petits commerce/services. Le secteur industriel représente moins de 5% du PIB et sur ces 5% environ 95% sont des PMI/PME peu initiées au management et à l’innovation, alors que s’impose des innovations technologiques impliquant un investissement massif dans la recherche développement, le capital argent n’étant qu’un moyen ne créant pas de richesses. Afin que les opérateurs algériens puissent pénétrer le marché africain, l’Algérie devra remplir sept conditions par des stratégies d’adaptation, loin des schémas périmés.
Premièrement, tenir compte de la rivalité du couple Etats-Unis/Europe –Chine pour le contrôle économique de ce continent vital. L’erreur fatale serait d’opposer en ce XXIe siècle les Etats-Unis et l’Europe qui ont le même objectif stratégique, bien qu’existant certaines rivalités tactiques de court terme, la stratégie des firmes transnationales occidentales tendant à atténuer les divergences. Aussi, contrairement à certains discours populistes, déconnectés de la pratique des affaires internationales, pénétrer le marché africain sera aussi difficile sinon plus que le marché européen.
Deuxièmement, combien l’Algérie possède d’entreprises compétitives publiques et privées avec un taux d’intégration minimal de 40/50%, selon les normes internationales et des laboratoires de recherche/développement.
Troisièmement, une révolution culturelle de nos dirigeants vivant du mythe du capital argent et une mentalité reposant sur les matières premières et l’ère des unités micros-mécaniques des années 1970, comme solution au développement, alors qu’il ne peut y avoir une économie diversifiée sans le primat de l’économie de la connaissance. Lorsque les Ministres et les Walis déplieront un tapis rouge devant les chercheurs et les intellectuels de renom, en les recevant au perron, comme le font les grands dirigeants du monde développé et ceux des pays émergents, nous aurons une lueur d’espoir pour un développement durable.
Quatrièmement, sans maitrise des nouvelles technologies, il ne faut pas s’attendre à asseoir une économie diversifiée : or, à l’aube de la 4e révolution industrielle où les technologies de l’information et de la communication (TIC) constitue le moteur de la croissance alors que certains responsables vivent encore d’utopie du siècle passé, l’investissement le plus sur est dans les institutions démocratiques et le savoir. Or l’Algérie a du mal à progresser dans le domaine des nouvelles technologies, vient en ce mois de juillet 2016 d’être classée à la 117e place sur 139 en matière d’innovation dans l’économie numérique, par le Forum économique mondial, ne figurant même pas parmi les dix premiers pays d’Afrique.
Cinquièmement, étant plus facile d’importer que de produire, il s’agira de débureaucratiser l’administration, mettre en place la théorie de l’intelligence économique au niveau des institutions stratégiques de l’Etat, pour une information fiable au temps réel des concurrents du fait de la présence depuis de longues années de nombreuses firmes internationales en Afrique qui ont déjà pris des segments de marché ( la tournée ce mois de juillet 2016 du chef de gouvernement israélien Afrique n’est pas innocente) qui ont tissé des réseaux locaux et de nouvelles qui arrivent.
Sixièmement, il faudra au préalable des supports logistiques et bancaires (combien de banques algériennes en Afrique), des supports logistiques et bancaires au préalable en Afrique.
Septièmement, et comme synthèse, la pénétration du marché africain suppose un partenariat gagnant/gagnant avec les grandes firmes qui contrôlent le marché mondial et un renforcement de l’appareil productif interne, supposant l’émergence d’entreprises algériennes compétitives en termes de coût-qualité, dans le cadre des avantages comparatifs mondiaux, car la concurrence internationale est acerbe,(pas de sentiments dans la pratique des affaires) qui doivent reposer leur action non sur le capital argent seulement qui n’est qu’un moyen.

En résumé, durant cette période, en raison de ses disponibilités financières, l’Algérie a besoin d’une vision stratégique, de cohérence, de visibilité, d’un discours de vérité et de leadership. L’Algérie doit profiter de sa relative aisance financière, dette extérieure très faible et bien utiliser ses réserves de change en transformant cette richesse virtuelle en richesses réelles, de libérer toutes les énergies créatrices, et donc de réaliser la transition difficile vers une économie hors hydrocarbures dont le sous segment la transition énergétique le cadre des valeurs internationale, pouvant être un acteur dynamisant du continent Afrique. L’Algérie à la différence de 1986, avec une dette extérieure faible et des réserves de change peut surmonter la baisse du cours du pétrole qui sera de longue durée au vu des nouvelles mutations énergétiques mondiales, pour peu que l‘on ait une gouvernance centrale et locale rénovée et une nouvelle vision du développement économique et social. Le cas contraire, après l’épuisement du fonds de régulation des recettes fin 2016, les réserves de change s’épuiseront à horizon 2018/2019. Aucun patriote algérien ne souhaite l’expérience de 1994, du retour au FMI. Dès lors sans préjuger des incidences politiques, et géostratégiques au niveau de la région, les conditionnalités seront posées au préalable avant tout prêt avec une dévaluation importante du dinar, une paupérisation de la population et une perte de souveraineté de l’Algérie

(1)-Intervention du professeur Abderrahmane Mebtoul à l’invitation de « L’Alliance pour Refonder la Gouvernance en Afrique (ARGA) » constituée d’importants acteurs africains et non africains) dont le siège est à Dakar – (Sénégal), qui a organisé une grande rencontre internationale entre le 26/30 janvier 2014 sur le thème « l’Afrique doit réinventer son économie » en partenariat avec la Fondation Charles Léopold Mayer pour les progrès de l’Homme, l’African Innovation Foundation « « Face aux enjeux géostratégiques, le développement et la sécurité de l’Afrique doit se fonder sur l’Etat de Droit et la bonne gouvernance». -Intervention du professeur Abderrahmane Mebtoul ’invité d’honneur du professeur Jean-Pierre Chevenement président de l’Association Algérie-France et de la fondation Res Publica qui a organisé une rencontre avec d’importantes personnalités des deux rives de la Méditerranée en partenariat avec l‘Union européenne le 17 février 2014 à Paris sur le thème-« Face aux enjeux géostratégiques pour un co-partenariat entre le Maghreb et l’Europe, facteur de stabilité de la région».

NB -Dans le cadre de la tenue de cet l’important forum africain d’investissements et d’affaires, prévu à Alger, du 03 au 05 décembre, le professeur des Universités, expert international, Dr Abderrahmane MEBTOUL, membre de plusieurs organisations internationales, dont membre du conseil scientifique de l’organisation panafricaine dépendante des Nations Unies- CAFRAD, ayant publié de nombreux travaux depuis 1992, sur l’Afrique, continent d’avenir et à enjeux multiples face aux enjeux géostratégiques, été sélectionné, à titre d’expert indépendant, pour l’Algérie comme modérateur de la session de partage d’expérience (sharing expérience), programmée le 05 décembre 2016 et qui sera consacrée à la présentation des expériences des communautés économiques régionales africaine dans l’intégration régionale en Afrique. Des représentants de ces organismes vont animer également cette session à l’instar de ceux de la CEDEAO, CMESA, SADC, UEMOEA. Notre seul objectif défendre les intérêts supérieurs de l’Algérie

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