Depuis l’apparition des premiers cas de contamination au Coronavirus (Covid-19) en Chine, fin 2019, l’économie mondiale ne cesse de prendre l’eau de toutes parts. Elle affiche déjà un bilan morbide, alors que le premier trimestre 2020, touche à peine à sa fin. Au moment où toutes les prévisions de croissance sont revues à la baisse, la CNUCED (Conférence des nations Unies pour le Commerce et le développement) a annoncé le 11 mars dans un nouveau rapport (quatrième consécutif en mars) qu’un déficit d’environ 2000 milliards de dollars menaçait le PIB mondial.
D’autres experts internationaux prédisent une récession imminente en zone Euro, durant tout le premier semestre de l’année en cours (baisse de 0,4% au premier trimestre 2020 et 0,5 % au de deuxième), notamment dans la perspective d’un enlisement de la crise italienne (prévision d’une récession à hauteur de 1,2% à la fin 2020). Energie, finance, transport, tourisme, etc. tous les secteurs ou presque sont déjà aux abois.
2020 sera-t-elle une année de survie ?
Energie : Considéré comme « la roue de l’économie », le secteur énergétique a été, très tôt, impacté par la baisse de la demande chinoise, pays épicentre de l’épidémie (environ 3 à 4 millions de barils/jour en moins). Les prix du pétrole n’ont cessé leur « fluctuation » en frémissant à chaque nouveau bulletin d’information émis par l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé). Devenu extrêmement volatile, le marché a subi une baisse abyssale de 20% depuis le 1er janvier 2020, entraînant le prix du baril de Brent à moins de 35 dollars, ce samedi 14 mars.
Par ailleurs, la situation de quasi « bérézina » prévaut actuellement à l’OPEP suite à l’échec des négociations entre la Russie (OPEP+) et l’Arabie Saoudite, lors du dernier sommet de l’organisation, le 6 mars dernier à Vienne. Depuis, le torchon brûle entre les deux géants des hydrocarbures, qui ne sont pas d’accord sur la réduction conjointe de la production de 1,5 million de baril/jour, jusqu’à la fin du premier semestre 2020. Selon l’IRIS (institut des Recherches Internationales et Stratégiques), l’échec des négociations a, de facto, permis l’extension des effets du Covid-19 sur les secteurs du transport et de l’industrie.
La finance : Après 1929, 1987 et 2008, le secteur « roi » s’apprête à plonger de nouveau en 2020. Les places boursières voient rouge depuis l’annonce de la fermeture des frontières américaines à l’espace Schengen. Les marchés financiers les plus « cotés » redoutent un krash imminent de Wall Street. Le jeudi 12 mars à l’ouverture, les mines déconfites des traders ne transigeaient pas avec la situation du marché : -9,99 % pour le Dow-Jones (New-york) ; -21,34% pour le S&P/TSX (Toronto) ; -9,43% pour le Nasdaq (Nes-York). Quant au CAC 40 (Paris), qui a connu la pire débâcle de son histoire, a dégringolé à – 12,28%. D’autres bilans affichaient – 12,24%à Francfort, – 9,81% à Londres, – 16,92%à Milan et – 14% à Madrid.
Et tandis que le discours de la nouvelle présidente de la BCE (Banque Centrale Européenne), Christine Lagarde, n’a pas réussi à rassurer les marchés, la FED (Réserve fédérale Américaine) a immédiatement réagi en annonçant l’injection d’environ 1000 milliards de dollars dans le circuit financier via des opérations de « Reverse Repo ou mise en pension », afin de la maintenir à flot, sous perfusion de cash-flow.
Transport : le secteur du transport et notamment le transport aérien, a très vite fait les frais du ralentissement économique et de la réduction de la mobilité, du fait de sa propension à favoriser la propagation du virus. Alors que plusieurs pays ferment leurs espaces aériens au trafic international et à la circulation des biens et personnes (limitée pendant un temps à ceux en provenance d’Asie), le nombre de compagnies ayant cloué leurs avions au sol ne cesse d’augmenter.
Les conséquences de telles mesures de restriction ne se sont pas fait attendre. A titre d’exemple, la compagnie aérienne norvégienne (Norwegian) a annoncé, jeudi 12 mars, la suspension de près de la moitié de ses salariés, suite à la décision prise par les USA d’interdire l’entrée sur son sol de ressortissants européens, (espace Schengen et non-Schengen), exception faite des la Grande Bretagne.
Selon l’IATA (Association internationale du transport Aérien), des appels à l’aide aux gouvernements ont été lancés autour de trois types sujets : l’assouplissement de certaines contraintes réglementaires, notamment celles des « slots » aéroportuaires (dont 80% doivent être utilisés pour qu’ils soient renouvelés) ; l’allègement des charges et des coûts qui pèsent sur les entreprises du secteur ; des mesures de soutien au niveau de la trésorerie.
La logistique : secteur corollaire au transport, le constat est pratiquement le même s’agissant de la logistique. Cependant, les gouvernements européens ont été les premiers à agir pour tenter d’endiguer les effets néfastes causés par l’épidémie Covid-19, et maintenir les chaînes d’approvisionnements nécessaires. L’Autriche a introduit des contrôles avec l’Italie, entraînant un retard au niveau du passage des camions aux frontières. Le Danemark étudie la possibilité d’imposer des restrictions supplémentaires à l’entrée sur son territoire, comprenant un examen médical obligatoire des convois en provenance de « zones rouges ». L’Allemagne, pour sa part, a suspendu l’interdiction de circuler le dimanche pour garantir l’approvisionnement des supermarchés. Enfin, la Slovénie autorise les transporteurs de marchandises à passer les frontières sous réserve de contrôles sanitaires.
Le tourisme : avec plus de 150 pays touchés par le fléau sanitaire du Coronavirus, le secteur a été mis à genoux par les conséquences d’annulations en cascade de voyages et de séjours internationaux, conjuguées à une chute drastique des réservations. L’OMT (Organisation mondiale du Tourisme) a récemment dressé un premier bilan qui prévoyait une baisse négative d’arrivée des touristes de 1% à 3%, en 2020. L’Asie est le continent le plus touché par cette crise, selon la même source.
Mis au point mort dans le monde entier, le tourisme se prépare déjà à essuyer des pertes colossales, en partie à cause de la désertion de la clientèle chinoise. Sur toute la chaîne (transport aérien, tourisme d’affaires et d’agrément, agences de voyages, TO, sites de visites et d’hébergement, événementiel, restauration), le manque à gagner est estimé à environ 100 milliards de dollars (Protourisme). En France, 7% du PIB serait directement menacé, d’après des parlementaires du groupe d’études « Tourisme » de l’Assemblée Nationale.
L’industrie : « effrayés par le Coronavirus, les ouvriers des industries se mettent en grève », a titré jeudi 13 mars 200 en Italie, le quotidien milanais « Il Corriere della Serra ». Ce « fait divers » résume parfaitement la situation de l’industrie aux temps de l’épidémie. L’enrayement de « l’usine du monde » n’étant plus l’unique « panne » engendrée par le Covid-19. La faible croissance jumelée à la sous-utilisation des capacités de production, freinent les investissements.
Par ailleurs, le commerce international tourne au ralentit depuis quelques semaines, du fait du repli sur soi des industries exportatrices. En Allemagne, le secteur manufacturier, avec l’automobile à sa tête, a reculé de 5,7%, selon la BDI (organisation des industriels allemands). L’équipementier Adidas s’attend à une baisse de son chiffre d’affaires allant jusqu’à 1 milliard d’euros, en Chine seulement. Outre Atlantique (USA), Apple a annoncé samedi 14 mars, la fermeture de tous ses magasins chinois, jusqu’au 27 du mois en cours.
La distribution : la question de l’approvisionnement alimentaire et de pénuries inquiète beaucoup en périodes d’épidémie grave. Le réflexe du « stock » pointe son nez dans plusieurs pays passés au stade 3 de la menace, en particulier ceux placés en confinement total. En France par exemple, sur la semaine du 2 au 8 mars, le cabinet d’études Nielsen a relevé une tendance nette de hausse dans les achats, alors que la variabilité des ventes en hyper et supermarchés, est traditionnellement assez faible.
Par ailleurs, une augmentation de 5,6% des ventes de produits de grande consommation a été enregistrée. Celles des produits d’épicerie comme les pâtes, le riz, les conserves et les œufs, ont bondi de 21%, et de 12% pour les produits de toilette et d’hygiène. Au Royaume-Uni, le géant de la grande distribution Tesco limite, depuis le 9 mars, les achats à 5 produits pour les pâtes, les lingettes antibactériennes et le lait à longue conservation.