Plus d’un millier de subsahariens avaient envahi en quelques jours la côte andalouse d’Espagne, et l’enclave de Mellila. Cela avait commencé le 12 août dernier, et en peu de temps, la Guardia civil espagnole a secouru en mer plus de 1200 subsahariens.
Cette vague sans précédent de migrants subsahariens, qui avait envahi les côtes de l’Andalousie et l’enclave espagnole de Mellila ( en territoire marocain) en un temps record, intrigue. C’est en tout cas ce que pensent certains journaux espagnols, selon lesquels les autorités marocaines avaient »laissé faire ». Tout a commencé le 12 août, avec l’arrivée de plus de 900 immigrants, interceptés en mer par la Guardia civil et ramenées vers le port de Tarifa, dans la région de Cadix.
»En quelques jours, 1 200 individus ont été retrouvés voguant sur des pateras au large des côtes espagnoles. La Croix-Rouge a pris en charge les migrants à leur arrivée et les autorités municipales ont mis à leur disposition un gymnase », rapporte la presse espagnole. Pour le quotidien andalou La Voz, « la vague d’immigration est devenue un raz-de-marée sans précédent. Entre le lundi et le mardi [11 et 12 août] sont arrivés à Tarifa plus d’immigrés que dans tout le reste de l’année ». Le phénomène est troublant.
El País (gauche), pointe du doigt la responsabilité des autorités marocaines. »La permissivité du Maroc facilite la plus grande vague de pateras de l’Histoire », écrit-il, avant de relever, sur la base d’informations fournies par une source proche de l’agence européenne de surveillance des frontières Frontex, que « depuis lundi [11 août], la gendarmerie marocaine ne patrouille plus sur les côtes nord du pays et l’armée ne surveille plus sa zone maritime ».
Troublant afflux de migrants
El Mundo croit savoir quant à lui qu' »il y a un embouteillage de gens qui stationnent au Maroc depuis longtemps et que le pays veut soulager la pression. De plus, les autorités marocaines sont nerveuses quant à l’épidémie d’Ebola ». Pour lui, »il est impossible qu’autant de bateaux puissent partir en un seul jour si Rabat ne l’a pas voulu ». Le même journal, citant un membre du collectif Caminando Fronteras, affirme que « les expéditions n’étaient absolument pas clandestines et ont été relevées par divers témoins : celui qui ne les a pas vues c’est parce qu’il n’a pas voulu les voir. Ils sortaient des caps Spartel et Malabata et même du port de Tanger Med' ». Le témoin insiste : » Je n’avais jamais rien vu de pareil : les immigrés sortaient en mer comme si cela avait été une excursion ».
L’enclave de Mellila, dans le nord du Maroc, près de la ville de Nador, même scénario avec une vague de plus de 700 subsahariens. Beaucoup ont réussi à entrer en territoire espagnol. A Cadix, dans le sud de l’Espagne, où l’on connaît bien le phénomène des pateras, on reste serein. « Les mafias et les réseaux criminels spécialisés dans le trafic de personnes profitent de la météo clémente de ces derniers jours pour être sûrs que les immigrés arrivent bien sur les côtes espagnoles par la voie maritime », estime le préfet de la région de Cadix , José de Torres. « Nous savons ce qui se passe et nous allons continuer à faire les choses avec sérénité. Comme toujours, Tarifa sera à la hauteur », a assuré Juan Andrés Gil, maire de Tarifa.
Crime de lèse-majesté lavé ?
Pourtant, en Espagne, beaucoup n’hésitent pas à pointer du doigt la complicité, sinon une opération des autorités marocaines pour signifier le »crime de lèse-majesté » infligé quelques jours plus tôt au roi du Maroc par la Guardia civil près de Ceuta, l’autre enclave espagnole en territoire marocain. Le 7 août dernier, la Guardia Civil espagnol avait effectué dans les eaux de Ceuta, un « contrôle de routine » sur le yacht du roi Mohamed VI, provoquant un incident diplomatique vite circonscrit, rapporte le journal espagnol El Mundo. Le roi Mohamed VI, selon le même journal, a vu dans le comportement de la Guardia Civil un manque de respect pour sa personne.
Le Roi aurait piqué une grande colère, car les autorités marocaines, selon El Mundo, avaient informé les espagnols de la présence du yacht royal. La délégation du gouvernement espagnol à Ceuta ignorait la présence du roi dans les eaux de l’enclave. Cinq jours après cet incident, les côtes andalouses étaient envahies de migrants subsahariens en provenance du Maroc. Du jamais vu, selon les autorités régionales d’Andalousie. Des » sources diplomatiques espagnoles établissent une relation entre les deux épisodes, mais d’autres sources officielles expliquent ce relâchement de la vigilance du côté marocain pour d’autres raisons », estime El Mundo, qui avait rapporté le premier l’incident du contrôle du yacht royal.