Quatre années après le geste désespéré de Mohamed Bouazizi, pour dénoncer la hogra policière et la malvie en Tunisie, le Prix Nobel de la Paix 2015 a été attribué au Dialogue national tunisien.
Grosse surprise vendredi pour les Tunisiens en particulier, et dans le monde arabe en général. La fondation Nobel a attribué le prix Nobel de la Paix 2015 au Dialogue national tunisien, un quartet composé des syndicats ouvrier (UGTT) et patronal (UTICA), l’Ordre des avocats et la Ligue tunisienne des droits de l’Homme. C’est un bel hommage en réalité au peuple tunisien et aux organisations autant politiques que non gouvernementales de ce pays, qui ont su gérer le difficile virage de l’après-révolution de Jasmin et la menace d’un effondrement politique. Les quatre organisations ont été au cœur de l’action politique en Tunisie, autant en gérant la tension lors de la crise politique entre le gouvernement islamiste d’Ennahda et l’opposition de gauche, qu’en calmant les peurs avec les premiers assassinats terroristes de leaders de la gauche.
Le comité Nobel a ainsi annoncé que « le prix Nobel de la paix 2015 a été décerné au Dialogue national tunisien pour sa contribution à la transition démocratique depuis la révolution de 2011 ». Il précise que « le prix avait été attribué à titre collectif au quartet formé à l’été 2013 pour éviter le déraillement du processus démocratique sur fond de confrontation entre le parti islamiste Ennahda, alors au pouvoir, et les mouvements laïques, et de recrudescence des violences commises par des groupes islamistes armés ». « Il a offert une alternative, un processus politique pacifique à un moment où le pays était au bord de la guerre civile », explique la présidente du comité Nobel, Kaci Kullman Five, citée par Reuters.
Servir d’exemple à d’autres pays de la région
Elle poursuit par ailleurs que ce prix « est surtout un encouragement adressé au peuple tunisien qui, en dépit de difficultés considérables, a posé les bases d’une fraternité nationale dont le comité espère qu’elle servira d’exemple dans d’autres pays ». En décembre 2011, les Tunisiens sortent dans la rue et parviennent à faire « dégager » le président Ben Ali au bout de quelques jours de ce qui a été appelé la révolution de Jasmin. Le mouvement de protestation sera repris dans d’autres pays arabes, dont l’Egypte, la Libye, la Syrie et le Maroc, les médias occidentaux parleront de Printemps arabe. Mais, seule la Tunisie gardera le cap de la transition démocratique. L’Egypte a été « reprise » par Al Sissi et l’armée, la Libye a plongé dans le terrorisme, alors que la Syrie de Bachar el Assad est en train de suivre le chaos irakien. « C’est une grande joie et une fierté pour la Tunisie mais aussi un espoir pour le monde arabe », a déclaré le président de l’UGTT, Houcine Abassi à Reuters. « Cela montre que le dialogue peut nous mener sur le bon chemin. Ce prix est un message adressé à notre région, pour déposer les armes et s’asseoir à la table de négociations. » Le prix Nobel de la paix est doté d’une récompense de huit millions de couronnes suédoises (858.000 euros).