Professeur émérite à l’Ecole nationale polytechnique (ENP), Chamseddine Chitour affirme qu’une transition énergétique est plus qu’une nécessité pour l’Algérie, surtout que le déclin de la production d’hydrocarbures est bel et bien amorcé. Il rappelle que l’avenir est aux énergies renouvelables.
« Il faut choisir entre l’eau et l’énergie » : le professeur Chamseddine Chitour n’est pas favorable aux gaz de schiste « à moyen terme ». « L’avenir est aux énergies renouvelables », a-t-il plaidé à l’occasion d’une conférence sur le thème « Une transition énergétique pour le développement durable en Algérie: le rôle du système éducatif », organisée aujourd’hui à l’Ecole nationale polytechnique (ENP, El Harrach, Alger).
Chamseddine Chitour a déploré l’absence de volonté politique d’aller vers les énergies renouvelables. « Il y a beaucoup d’effets d’annonce pour un résultat nul », a-t-il martelé. « Je ne suis pas contre les gaz de schiste mais ils ne sont pas pour notre génération : ils sont pour les générations futures », a-t-il déclaré. Selon lui, l’homme a mis 150 ans à consommer ce que la nature a constitué pendant 200 millions d’années en énergies fossiles.
L’Algérie est concernée par cette consommation effrénée des énergies fossiles dont le déclin s’avère plus rapide que les chiffres « rassurants » avancés par les responsables algériens, souvent en se fiant aux statistiques d’organismes internationaux comme l’Agence internationale de l’Energie (AIE). « Il faut méfier des chiffres de l’AIE », a recommandé ce conseiller aux questions énergétiques de plusieurs présidents et hauts dirigeants algériens. « En 2007, l’AIE a prévu que les prix du baril de pétrole seraient de 30 dollars. Peu de temps après, ils se sont envolés », a-t-il fait remarquer.
Le scénario des années 1980 n’est pas à écarter
A propos des réserves réelles de l’Algérie en énergies fossiles, Chamseddine Chitour a déploré la « culture du secret » qu’entretiennent les autorités sur ce sujet. Il a critiqué le fait que la loi de finances soit élaborée sur la base des prix prévisionnels de pétrole. « Si les prix chutent au-dessous de 100 dollars nous retomberons dans le scénario des années 1980, lorsque nous n’avions même pas de quoi nous nourrir », a-t-il prévenu appelant à la mise en place d’un modèle énergétique « juste ».
Aujourd’hui, par la force de la géostratégie, le capital et l’énergie sont les deux facteurs qui façonnent le monde, a estimé le Pr Chitour. Notre pays ne peut se tenir à l’écart des enjeux géostratégiques et les transformations qui en résultent, et doit par conséquent assurer son immunité, a-t-il préconisé appelant à des « états généraux de l’énergie « pour savoir ce que nous avons comme ressources mais aussi où nous allons ».