« La progression des immatriculations automobiles était l’arbre qui cachait la forêt, en donnant de faux chiffres sur la croissance du secteur », estime Hassan Khelifati en illustrant la situation de crise que vit le secteur des assurances ces derniers mois.
Le secteur des assurances en Algérie court vers une crise systémique, a alerté ce mardi le PDG d’Alliance Assurances, Hassan Khelifati. Dans l’émission Invité du Direct de Radio M, la webradio de Maghreb Emergent, M. Khelifati est revenu sur l’actualité du secteur des assurances, traversé ces derniers mois par de fortes turbulences en raison de sa dépendance vis-à-vis du secteur automobile.
« La progression des immatriculations automobiles était l’arbre qui cachait la forêt, en donnant de faux chiffres sur la croissance du secteur », a-t-il dit pour illustrer la situation de crise que vit le secteur des assurances ces derniers mois. M. Khelifati prévoit moins de 150.000 immatriculations nouvelles pour l’année 2015, correspondant à un chiffre d’affaires de 600 milliards de DA en moins et une augmentation de 30 % de la facture de remboursement de sinistres automobiles.
Selon lui, les prix de la pièce détachée ont fortement augmenté chez les concessionnaires en raison de la baisse de la valeur du dinar. Ce qui va impacter, a-t-il dit, le remboursement des sinistres automobiles. Mais pas question d’appliquer de nouveaux tarifs. « Les assureurs doivent faire face à cette augmentation, mais avec un handicap majeur : ils n’ont pas de marges de manœuvre pour augmenter eux aussi les tarifs. Et ce, pour deux raisons ; le tarif Responsabilité civile (RC) est réglementé par le ministère des Finances. Donc, c’est un pan entier du secteur qu’on ne peut pas toucher. Ensuite, il y a les autres tarifs soumis à une rude concurrence entre les 13 compagnies activant sur le marché, ce qui ne laisse pas trop de marges de manœuvre aux compagnies d’assurances », explique l’Invité de Radio M.
Ainsi, le PDG d’Alliance Assurances prédit, au mieux, une croissance molle, au pire, une régression pour le secteur en 2015. Les compagnies d’assurances ont commencé à intérioriser les effets de la chute des prix du pétrole et ses conséquences sur le marché des assurances depuis le début de l’année. Mais pour l’heure aucune véritable solution n’a été trouvée par les compagnies de la place, sinon de « trop » solliciter la trésorerie. Ceci est d’autant plus vrai pour les assureurs privés, qui « n’ont d’autres mécanismes que de trouver des ressources en interne ».
Plus de marge pour le public que le privé
« Tout le monde veut réajuster les tarifs mais le secteur public a plus de marges de manœuvre que le privé qui, dans la pratique, n’a que la branche automobile pour se développer », a encore expliqué M. Khelifati, qui rappelle que si les assureurs sont égaux dans la loi, dans les fait en revanche, les assureurs privés sont exclus de plusieurs marchés publics.
Les assureurs devront continuer de puiser dans leurs réserves et leurs économies antérieures « mais je pense que ça sera intenable au bout d’une année ou deux », a-t-il prédit. Ainsi, en continuant à trop solliciter la trésorerie, c’est tout le secteur qui court vers la catastrophe. C’est pourquoi M. Khelifati, en tant que vice-président de l’UAR, propose des pistes à même de sortir le secteur de cette ornière. Il suggère notamment d’introduire le caractère obligatoire dans certaines polices d’assurance ainsi que des tarifs plancher dans certaines branches. « A l’UAR nous travaillons pour que les tarifs de certaines branches soient réglementés. Nous sommes obligés de changer de cap (…) Sinon c’est la crise systémique pour le secteur », a-t-il conclu.
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