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Maghreb

Les médias audiovisuels algériens sont misogynes, selon une étude de la Laddh-Mena Media Monitoring

Par Yacine Temlali
août 30, 2015
Les médias audiovisuels algériens sont misogynes, selon une étude de la Laddh-Mena Media Monitoring

Les femmes sont pratiquement à parité avec les hommes parmi les professionnels des médias en Algérie mais cela ne leur donne pas une visibilité plus grande. Il y a peu de nouvelles centrées sur les femmes et celles qui sont données renferment beaucoup de clichés et des stéréotypes misogynes.

 

 

Un monitoring des médias réalisé entre le 28 janvier et le 17 février 2015 par la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme (LADDH), en association avec l’ONG Mena Media Monitoring, montre l’ampleur du chemin à parcourir pour assurer une représentation suffisante et correcte des femmes dans les médias. Et encore davantage sur le chemin à faire pour sortir des clichés qui « assignent » aux femmes des rôles et des places et que les médias reproduisent avec force.

Le rapport a été présenté ce dimanche 30 août 2015 par Abdelmoumène Khelil, SG de la LADDH, et Nedjaa Amirouche, directeur de programme de Mena Media Monitoring.

L’étude a consisté dans un suivi d’émissions de quatre radios publiques et de quatre télévisions, la chaîne publique A3 et trois chaînes privées, Ennahar, Echourouk et KBC. La quasi-parité entre les femmes et les hommes dans les médias ne change pas la donne, on parle surtout de ce que les hommes font et peu de ce que les femmes font.

L’étude souligne que les femmes professionnelles des médias font 42,61% des reportages, elles représentent 55,70% des journalistes envoyées sur le terrain. Les présentatrices (53%) sont plus nombreuses que leurs homologues masculins.

Mais cette présence forte des femmes professionnelles dans les médias audio-visuels ne bouleverse pas le statuquo puisque la visibilité des femmes dans les médias est très faible par rapport aux hommes et ne dépasse pas les 19,10%.

Tous les clichés sont reproduits, les sujets « légers » sont pour les femmes, les choses « sérieuses », comme la politique et l’économie, sont réservées aux hommes.

Sur un « total de 14.108 des apparitions des sujets externes, 19,10% seulement sont des femmes », indique le rapport. Une personne seulement sur cinq dont parlent les télés est une femme et une sur sept à la radio.

 

Une « inégalité frappante »

 

Les femmes participent peu aux débats, elles ne constituent que 21,80% des personnes invitées. On parle peu des femmes dans les médias, sauf pour médire ou reproduire des clichés sur sa « faiblesse » et autres stéréotypes de la « tentatrice »…

L’étude montre ainsi que les informations « centrées » sur les femmes sont négligeables. Sur un « total de 5.750 nouvelles, seulement 160 sont centrées sur des femmes (2,7%), note l’étude qui relève l’extrême focalisation sur les personnes masculines.

Les productions médiatiques sont 37 fois moins centrées sur les femmes que sur les hommes, note l’étude qui souligne que l’inégalité « entre les genres est frappante ».

Les femmes sont pratiquement absentes ou très peu visibles dans les des sujets politiques et économiques (10,05% et 9,86%). Elles disparaissent pratiquement de ces informations jugées « sérieuses ».

L’étude y voit une reproduction de stéréotype où « tout le monde semble trouver normal » que les femmes soit absentes des rubriques « sérieuses » car la « perception générale » voudrait « qu’elles ne s’intéressent pas à ça ».

 

L’info « sérieuse » pour les hommes

 

Pourtant, note l’étude, avec 31,6% de députées femmes, les journalistes ont de la « marge » pour varier leurs sources d’informations politiques. Pour l’heure, note l’étude, les femmes sont cantonnées à certains domaines « comme la santé (39,75%), l’éducation et, surtout, la famille et le foyer (80,88%) ».

Mais l’inégalité de la visibilité des femmes dans les médias s’accompagne aussi d’une inégalité de genre entre journalistes.

Les femmes qui animent les débats d’information dans les télés ne sont que 5,41% du total alors qu’elles sont très nombreuses à présenter les informations. Absentes des sujets « sérieux », elles sont surreprésentées dans les émissions de divertissement (91,30% dans les « reality shows, 94,44% dans les jeux à la télé et 58,22% dans les spectacles de variétés dans les radios).

Aucune surprise dès lors de voir que ces médias « continuent de véhiculer une image très négative des femmes », où l’on retrouve tous les grands préjugés misogynes « classiques », la palme revenant à la rubrique des faits divers. Peu de nouvelles sur les femmes donc (moins de 2%) mais ce peu de news diffuse fortement des « préjugés misogynes … ».

 

Recommandations

 

Les auteurs du rapport recommandent aux journalistes de mettre fin au préjugé qui lien les « hommes » à « l’information sérieuse » et la femme à « l’information divertissante ». Ils les appellent à « enrichir, diversifier et mettre en commun leurs carnets d’adresses de façon à les rendre mixtes à chaque fois que le domaine ou l’expertise recherchée le permet. »

Le rapport les appelle à sortir des « idées reçues », à éviter les généralisations sur les genres, les animateurs sont invités à réagir avec plus de vigueur aux « discours discriminatoires émis en direct par les participants.

D’autres recommandations sont adressées aux responsables des médias… et il n’est pas certain qu’elles seront entendues.

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