Oran, première ville algérienne à expérimenter la nouvelle formule de gestion de l’eau potable - Maghreb Emergent

Oran, première ville algérienne à expérimenter la nouvelle formule de gestion de l’eau potable

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Les entreprises algériennes de gestion de l’eau potable et de l’assainissement vont continuer de recourir à l’expertise étrangère, mais elles assumeront désormais directement la gestion. La formule de la gestion déléguée sera progressivement abandonnée.

 

Oran sera la première ville algérienne à expérimenter la nouvelle formule initiée par le ministère algérien des ressources en eau dans la gestion de l’eau potable. La gestion déléguée, en vigueur depuis bientôt une décennie, sera progressivement abandonnée, au profit de celle de l’assistance technique, supposée plus ciblée et moins coûteuse.
Le choix d’Oran est toutefois une simple affaire de calendrier. Le contrat qui liait la SEOR (société des eaux d’Oran) à l’Espagnol Agbar (filiale de Suez), est le premier à arriver à échéance. Toutes les autres grandes villes (Alger, Constantine, Annaba, Tipaza) passeront à la nouvelle formule lorsque le contrat en vigueur arrivera à expiration.
La formule de la gestion déléguée avait été lancée en 2006, lorsque M. Abdelmalek Sellal était ministre des ressources en eau. Le premier contrat avait été signé avec le français Suez, à qui a été confiée la gestion de l’eau potable et de l’assainissement à Alger. Une nouvelle entreprise, la SEAAL, avait été créée à cet effet, et confiée à des cadres de Suez au terme d’un contrat de 120 millions d’euros. La formule avait été ensuite élargie, avec des résultats très contrastés. A Annaba, ce fut un échec évident, qui a débouché sur la résiliation du contrat conclu avec l’allemand Gelssen-Wasser. A Constantine, des tensions étaient apparues entre la SEACO et la société des Eaux de Marseille (SEM), qui avait décroché le contrat, mais sans aller jusqu’au clash.
Résultats mitigés
Les contrats avaient pour ambition d’assurer une distribution de l’eau potable en continu, et un transfert de savoir-faire au profit du personnel algérien. Ils avaient été élaborés dans la foulée de la grande crise de 2001, qui avait vu les réserves dans les barrages baisser à un niveau alarmant, contraignant les autorités algériennes à envisager d’importer de l’eau par bateau à partir de l’Europe. Des travaux d’aménagement avaient même été entamés à cet effet au port d’Alger.
L’aisance financière a toutefois permis, dans les années qui ont suivi, d’investir massivement dans la mobilisation des ressources en eau. Mais la qualité de la gestion n’a pas suivi. Et si l’eau potable est disponible de manière correcte dans les grandes villes, notamment à Alger, il est difficile de dire si c’est l’effet de la gestion de Suez, ou simplement le résultat de la disponibilité de l’eau en abondance. Alger, par exemple, mobilise actuellement plus d’un million de mètres cube par jour, contre moins de la moitié il y a dix ans. Ce résultat a été obtenu grâce à l’apport du barrage de Taksebt, et des stations de dessalement du Hamma et de Douaouda, d’une capacité théorique de 200.000 mètres cube chacune. Les stations de dessalement autour d’Oran, couplés au système MAO (Mostaganem-Arzew-Oran) peuvent mobiliser près d’un million de mètres cube. Dans l’est du pays, le barrage de Beni-Haroun, avec sa réserve qui peut atteindre un milliard de mètres cube, a bouleversé la donne. Il n’y a donc plus de rareté, mais une gestion toujours défaillante. Car malgré cette abondance, il y a encore des coupures récurrentes dans certains quartiers d’Alger.
Expertise étrangère
Le ministre des ressources en eau, M. Hocine Necib, l’a d’ailleurs reconnu, en affirmant que le prochain défi sera celui de la gestion. Avec des cadres algériens, cette fois-ci. Ceux-ci dirigeront les entreprises des grandes villes (SEAAL, SEOR, SEACO, etc.), et seront assistés par des experts étrangers, qui n’auront plus la responsabilité de la gestion directe. Il s’agit d’une adaptation des contrats à la réalité locale : les experts étrangers n’arrivaient plus à se retrouver avec des interlocuteurs qui pensaient qu’il suffit de mettre de l’argent pour que tous les problèmes soient réglés. Ce qui explique en partie l’échec de l’expérience de la gestion déléguée.
Les cadres algériens sont toutefois issus de l’ancienne bureaucratie, dont ils ont gardé les pratiques. Ils se contentent d’appliquer les orientations de la tutelle, sans idée novatrice. « Ils n’ont pas de démarche ambitieuse pour tirer le meilleur parti des ressources disponibles », déclare un ancien cadre du secteur. Le choix de la gestion déléguée, et aujourd’hui celui du recours à une « assistance technique », n’a pas été fait par les dirigeants de l’ADE (Algérienne des Eaux) et ceux de l’ONA (Office Nationale de l’Assainissement), mais par le ministère. C’est également le ministère qui fixe le prix de l’eau, maintenu à un niveau très bas : le prix n’a pas été revu depuis bientôt dix ans.
Incohérence
A leur décharge, les gérants du secteur souffrent toutefois d’une confusion totale dans le partage des tâches et des responsabilités qui en découlent. Le ministère définit les grands choix en matière de gestion de l’eau potable, mais dans l’exécution, se mêlent les entreprises du secteur, les walis, les APC, l’administration locale, etc. Cela débouche souvent sur des situations inattendues. Le transfert Illizi-Tamanrasset a ainsi coûté trois milliards de dollars, et il a fallu plus de trois ans pour l’achever. Mais à la fin des travaux, quand le président Bouteflika devait se déplacer pour l’inaugurer, les responsables concernés ont découvert que Tamanrasset n’avait pratiquement pas de réseau d’eau potable. L’eau traverse ainsi mille kilomètres de Sahara pour arriver à Tamanrasset, mais il était impossible de l’acheminer vers les habitations, à quelques centaines de mètres…..

 

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