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Internationale

Présidentielles en Egypte : un homme qui ne croit pas à la démocratie, le maréchal Al Sissi, part favori

Par Yacine Temlali
mai 26, 2014
Présidentielles en Egypte : un homme qui ne croit pas à la démocratie, le maréchal Al Sissi, part favori

Tout au long d’une active campagne électorale, son rival Hamdine Sabahi s’est montré plus sensible aux revendications de démocratie et de justice sociale. Mais ses chances de l’emporter son quasi-nulles, dans un pays où, sous l’influence d’élites politico-médiatiques favorables à l’armée, le légitime désir de stabilité vire au culte de la dictature.

 

Un vote sans suspense pour choisir le président de la République a commencé aujourd’hui en Egypte et doit se poursuivre encore demain. Elevé au rang de maréchal avant sa démission de l’armée pour se porter candidat à la magistrature suprême, Abdelfattah Al Sissi est quasiment assuré de l’emporter face à son unique rival, le nassérien Hamdine Sabahi.

En dépit d’une campagne active et d’un programme plus sensible aux revendications de justice sociale, Hamdine Sabahi, qui s’est classé troisième en termes de nombre de voix aux présidentielles de juin 2012, a peu de chances devant son concurrent, soutenu par le gouvernement, l’administration, l’armée et une myriade de partis de toutes obédiences, allant des anciens communistes d’Al Tagamoê aux salafistes de Hizb El Nour. Craignant l’accusation de compter sur l’électorat de la confrérie des Frères musulmans (interdite et qui, du reste, appelle au boycott), il a soigneusement évité la confrontation avec son rival, allant jusqu’à le qualifier lui de « patriote » et l’armée de « partenaire dans la construction de l’Egypte (interview avec le journal saoudien, Okaz, 2 mars 2014).

 

Le culte de la « stabilité »

 

Abdelafattah Al Sissi part ainsi favori. Depuis la destitution du président islamiste Mohamed Morsi par les militaires, le 3 juillet 2013, il est l’homme fort du gouvernement et du pays. En 11 mois de « pouvoir » nominal, le président par intérim Adli Mansour a été réduit à des tâches protocolaires et à la signature des décrets qui lui étaient soumis et dont beaucoup ont remis en cause les rares acquis démocratiques de la révolte égyptienne du 25 janvier 2011.

L’ancien chef des renseignements militaires, nommé au poste de chef d’état-major de l’armée par l’ex-président Mohamed Morsi, a constitué autour de lui un large front favorable à la « stabilité » allant de la gauche aux salafistes et comprenant une majorité d’influents médias et de nombreux stars de la télévision et du cinéma. Il bénéficierait de l’appui d’une majorité de la communauté chrétienne (quelque 10% de la population), apeurée par la perspective d’un Etats islamique et très sensible aux consignes de vote du clergé. Il est, avec le ministre de l’Intérieur Mohamed Ibrahim, l’artisan d’une répression contre les Frères musulmans sans précédent dans l’histoire de l’Egypte. La dispersion violente de deux sit-in de la confrérie en août 2013 a fait des centaines de morts en un seul jour. Depuis, la confrérie islamiste a été déclarée hors la loi et des centaines de ses membres, dont son Guide et d’autres de ses hauts dirigeants, ont été condamnés à la peine capitale. 15.000 autres, dont l’ex-président Mohamed Morsi lui-même, sont sous les verrous, inculpés de divers crimes et délits, notamment d’avoir manifesté pour le retour au pouvoir du chef d’Etat destitué.

Dans un pays confronté à des troubles sécuritaires grandissants, dans la presqu’île du Sinaï, où les groupes armés sont plus que jamais actifs, mais aussi au Caire, dans le Delta et en Haute-Egypte, le maréchal Al Sissi apparaît comme le garant de la « stabilité ». Peu importe à ses soutiens que l’instabilité se soit justement aggravée depuis qu’il est au commandes réelles du pays.

 

Un projet autoritaire assumé

 

Le maréchal Al Sissi ne fait pas mystère de l’avenir sombre qu’il prépare pour le peu de libertés subsistant depuis le premier enterrement de l’intifada égyptienne par le conseil supérieur des forces armée (11 février 2011-25 juin 2012), avec le consentement des Frères musulmans, entre autres forces politiques. Pour lui, l’Egypte n’est pas prête à la démocratie et l’heure n’est pas aux sit-in autres et rassemblements politiques et syndicaux au rythme desquels vivent les Egyptiens depuis janvier 2011. Une loi encadrant étroitement les manifestations publiques est déjà appliquée et des dizaines de militants égyptiens accusés de ne l’avoir pas respectée croupissent en prison.

Le projet socio-économique du maréchal-candidat est une réplique de son projet politique autoritaire. Pour lui les Egyptiens doivent « se mettre au travail » car l’Etat n’a tout simplement rien à leur offrir (interview le 5 mai 2014). En revanche, il ne remet en cause aucun des énormes avantages profitant depuis le règne de Hosni Moubarak à des hommes d’affaires aux fortunes douteuses, d’où leur mobilisation derrière sa candidature.

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