L’Algérie se situe dans la catégorie des pays pauvres en ressources hydriques au regard du seuil de rareté fixé par la Banque mondiale à 1000 m3 par habitant et par an, a estimé Ali Dakiche, expert en ressources en eau et enseignant à l’université d’Oran.
L’expert a expliqué, dans un entretien accordé au quotidien El Watan, qu’on estime, à cet égard, qu’un pays atteint le «seuil de pauvreté» si ses ressources sont inférieures à 1000 m3 par habitant et par année et le «seuil de pénurie» à 500 m3 par habitant et par an.
Selon Dekiche et compte tenu de ces contraintes structurelles de gestion de l’eau et de différents aléas sévissant dans la région, l’Algérie est actuellement à près de 600 m3 par habitant et par an, loin derrière le Maroc qui lui entre 800 et 900 m3 par habitant et par an, et devant la Tunisie qui est à 500 m3 par habitant et par an.
Le même expert estime que l’Algérie sera à moins de 500 m3 par habitant et par an au-delà de 2025, « si la politique de planification de l’eau n’est pas restructurée en terme de gestion stratégique ».
Il explique qu’à titre de comparaison, certains pays sont donc particulièrement pauvres en eau, avec moins de 500 m3 par habitant et par an, comme c’est le cas de Malte, Libye, Singapour, Arabie Saoudite etc. alors que d’autres disposent de plus de 100 000 m3 par habitant et par an, comme la cas de la Norvège, la Nouvelle-Zélande, le Canada, le Congo, l’Islande….
De son côté, le Pr Ahmed Kettab, expert international et professeur des universités, s’est demandé si le problème de l’eau en Algérie serait-il dû au manque d’eau ? A la démographie ? Au gaspillage ? Au prix de l’eau ? A la gouvernance ? Aux fuites ? Ou alors, à la mal répartition naturelle des eaux ? A la sensibilisation ? A l’économie ? Aux textes réglementaires ? Aux financements ? etc.
« Il y a certainement un peu de tout cela. La stratégie, la vision, la politique, est d’attaquer toutes ces questions en simultané pour voir des résultats jaillir rapidement », a-t-il estimé
Une stratégie largement dépassée
Pour le Pr Kettab, la loi n°05-12 correspondant au 4 août 2005 relative à l’eau et du PNE adoptés par le gouvernement est largement dépassée et doit être revue sur la base d’une charte sur l’eau, puis une loi fondamentale votée par la future Assemblée populaire nationale (APN), puis le Conseil de la Nation (Sénat), et ensuite une loi programme.
Selon l’expert, il est temps de revoir cette loi sur l’eau et définir de nouvelles stratégies tenant compte de l’évolution mondiale et nationale. « Le domaine de l’eau en Algérie doit été complètement réorganisé, surtout qu’il doit tenir compte de plusieurs facteurs. Le devenir de l’Algérie passe à travers la mise en place de mécanismes nouveaux dans le cadre d’une gestion durable des ressources en eau », a-t-il estimé.
Il explique que la politique du secteur de l’eau adoptée par l’Algérie depuis une vingtaine d’années à travers un investissement colossal en infrastructures hydrauliques, le dessalement et l’épuration des eaux nous ont permis une satisfaction des besoins en eau potable et en irrigation satisfaisante, mais insuffisante.
Le Professeur suggère que l’Algérie doit faire encore avec un certain nombre de contraintes et défis en raison des changements climatiques, de la croissance démographique, de la surexploitation des nappes souterraines, d’une meilleure utilisation des eaux usées ainsi que du manque d’informations et de sensibilisation et de communication.
L’Algérie est obligée d’utiliser les eaux non conventionnelles
Pour pallier les déficits hydriques et atteindre la sécurité en matière d’approvisionnement en eau, le Pr Kettab propose que l’Algérie, en plus de la gestion des eaux conventionnelles, est obligée d’utiliser les eaux non conventionnelles (dessalement des eaux de mer, traitement des eaux usées).
« Les technologies de traitements et le recyclage des eaux usées collectées, sont disponibles et nous pouvons les traiter et les réutiliser en irrigation moyennant certaines précautions déjà édictées par des textes réglementaires Algériens », a-t-il estimé.
Il explique que le volume d’eaux usées rejetées à l’échelle nationale est estimé à 80% des eaux consommées. « Les eaux usées traitées sont très peu utilisées, et il faudra non seulement traiter toutes les eaux usées, mais surtout les réutiliser à 100% ».
Selon l’expert, un grand effort est à faire dans ce domaine, car il nous permettra d’augmenter nos capacités et resserves en ressources hydriques.