L’économiste Radhi Meddeb estime que la Loi de finances complémentaire (LFC) 2014 « pêche par un excès d’optimisme ». Pour lui, si le gouvernement donne l’impression de savoir « où l’on doit aller », il n’envisage pas des « actions concrètes » à ses objectifs.
«La Loi de finances complémentaire (LFC) 2014 s’appuie sur l’analyse de la situation du pays, mais pêche par moments par un excès d’optimisme, notamment en parlant de reprise économique», a indiqué, à l’agence TAP, l’économiste et président-fondateur de l’association Action et Développement Solidaire, Radhi Meddeb. «Ce n’est pas du tout le sens des communiqués mensuels du Conseil d’Administration de la Banque Centrale de Tunisie, qui ne cessent d’attirer l’attention sur les déficits jumeaux: public et courant, sur le niveau inacceptable de nos importations, la faiblesse de nos exportations et le niveau trop élevé de l’inflation », a-t-il précisé. Toutefois, d’après l’expert «il faut d’abord reconnaître la bonne facture de ce texte. Depuis plus de deux ans, nous avons perdu l’habitude en Tunisie de voir des textes de lois de nature économique qui soient précis et analytiques.
A son crédit, il faut aussi reconnaître le souci de la transparence sur la situation des finances publiques, y compris la réalisation du budget 2013, le reliquat des dépenses non couvertes par des recettes, mais aussi l’état de réalisation de la loi des finances 2014 sur les quatre premiers mois de l’année». Par ailleurs, il a noté que «les principes devant guider l’action du gouvernement sont clairement et justement énoncés: lutte contre l’évasion fiscale, lutte contre la contrebande, nécessaire formalisation de l’économie informelle et participation financière des bénéficiaires des services publics ». « Mais, nous restons sur notre faim, car les actions concrètes censées traduire ces principes en réalité sont timides sinon insuffisantes. Nous avons l’impression, à la lecture de ce texte, que le gouvernement sait où l’on doit aller mais qu’il préfère laisser cela à ses successeurs ». Dans ce même contexte, Meddeb a estimé que «l’action, quand elle est engagée, n’est pas suffisamment expliquée et du coup, elle perd de sa signification.
Pas suffisamment de solidarité et de justice sociale
C’est le cas, par exemple, du timbre sur le mariage, perçu de manière anecdotique et dont le rendement est quasi-insignifiant, alors qu’il se justifie par la nécessaire facturation des services publics à leurs bénéficiaires». Il a jugé que «l’économie sociale et solidaire est citée au passage, sans grande conviction, alors qu’elle peut être un puissant vecteur d’insertion et d’inclusion. La recherche de l’efficacité transparaît souvent dans le texte, mais pas suffisamment la solidarité et la justice sociale». Sur le volet économique, il a précisé que «plusieurs mesures donnent l’impression d’une volonté comptable de circonscrire le déficit budgétaire, mais pas suffisamment pour relancer l’activité économique. Les réformes esquissées, secteur bancaire, fiscalité…, sont encore embryonnaires et insuffisamment développées. Elles restent à venir, alors qu’il aurait été nécessaire de les engager pour donner un signal fort de la nécessaire participation de tous à l’effort de redressement national».
Et d’ajouter «on peut également regretter l’absence d’arbitrage fort en faveur de l’équipement de nos forces armées et de sécurité, tout comme la forte réduction du budget d’équipement, certes justifiée par la faible capacité d’absorption de l’administration, mais qui reste en rupture avec les exigences économiques et sociales de la Révolution». L’expert a estimé, ainsi, que «le retour à meilleure fortune de notre économie ne pourra en aucun cas avoir lieu sans l’engagement à bras le corps de toutes les réformes qui nous permettraient de rompre avec un modèle basé sur la consommation, l’importation, la rente et l’assistanat pour passer à un nouveau modèle mû par l’épargne, l’investissement, l’exportation, l’innovation, la performance, la solidarité et l’entrepreunariat».