Le Maroc ne va pas réintégrer cette année ni probablement l’année prochaine l’Union africaine, sa demande d’admission étant gelée après le report au prochain sommet de l’élection d’un nouveau président de la Commission de l’Union africaine.
Lundi à Kigali, une ville des hautes plaines africaines, qui garde encore les stigmates de la terrible guerre civile de 1994 où plus de 1,4 million de tutsis ont été massacrés par les hutus, la commission africaine a reporté le vote pour désigner un (ou une) successeur à la sud africaine Nkozazana Dlamini-Zuma. Un report du, selon des sources diplomatiques proches du 27eme sommet de l’UA, à l’absence d’un candidat à la taille du poste de Président de la commission de l’Union africaine. Du coup, la demande d’admission du Maroc, présentée officiellement dimanche au président en exercice de l’UA, le président Tchadien Idriss Deby, a été également reportée »sine die ». Dans sa lettre de demande d’admission, le Roi du Maroc confirme en fait sa politique d’occupation du Sahara Occidental, estimant que la RASD doit être exclue de l’organisation, car de plus de plus de pays lui retirent leur reconnaissance, selon la lettre du Maroc. »Le Maroc, qui a quitté l’OUA n’a jamais quitté l’Afrique. Il a seulement quitté une institution, en 1984, dans des circonstances toutes particulières. De l’admission de la RASD en 1982, l’histoire retiendra cet épisode comme une tromperie, un détournement de procédures, au service d’on ne sait quels intérêts. Un acte comparable à un détournement de mineur, l’OUA étant encore, adolescente à cette époque », écrit le roi du Maroc dans cette lettre. Il poursuit: »Comment en sommes-nous arrivés là ? La réponse, j’en suis certain, tout le monde la connait, et s’impose d’elle-même. Le temps est venu d’écarter les manipulations, le financement des séparatismes, de cesser d’entretenir, en Afrique, des conflits d’un autre âge, pour ne privilégier qu’un choix, celui du développement humain et durable, de la lutte contre la pauvreté et la malnutrition, de la promotion de la santé de nos peuples, de l’éducation de nos enfants, et de l’élévation du niveau de vie de tous. »
La lettre du Roi
Plus loin, le souverain marocain va jusqu’à demander donc l’exclusion de la RASD de l’Union africaine, en s’interrogeant: »l’UA resterait-elle, en déphasage avec la position nationale de ses propres Etats membres, puisqu’au moins 34 pays ne reconnaissent pas ou plus cette entité ? Même parmi les 26 pays qui s’étaient placés dans le camp de la division en 1984, seule une stricte minorité d’une dizaine de pays subsiste. Cette évolution positive est, d’ailleurs, conforme à la tendance observée au niveau mondial. Depuis l’année 2000, 36 pays ont retiré leur reconnaissance à l’Etat fantôme ». Ayant quitté en 1984 l’ex Organisation de l’Unité africaine (OUA) pour protester contre l’admission en 1982 lors du sommet de Nairobi de la République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD), le Maroc de Mohamed VI a en fait mis en place une grande offensive diplomatique pour réintégrer l’ensemble africain. »Le retrait de l’OUA était une erreur commise sous Hassan II et dont le Maroc continue de payer le prix », confiait récemment au journal »Le Monde » un spécialiste du Maroc.
Des mois de préparatifs
Les autorités marocaines préparent depuis quelques mois ce retour, avec notamment la visite à Rabat en juin du chef de l’Etat Rwandais Paul Kagame, et des émissaires marocains dans plusieurs capitales africaines, en particulier à Alger où le numéro 2 de la diplomatie marocaine Nacer Bourifa a été reçu par le Premier ministre Abdelmalek Sellal vendredi dernier. Et, depuis le début du mois de juillet, le ministre marocain des affaires étrangères Salahedine Mezouar a fait plusieurs déplacements sur le continent. Il a été reçu successivement par les présidents sénégalais Macky Sall et ivoirien Alassane Ouattara, Paul Biya du Cameroun, et s’est également rendu au Caire, à Khartoum, à Addis-Abeba et à Tunis. Le Roi du Maroc a envoyé à Alger son envoyé spécial, porteur d’un message au président Abdelaziz Bouteflika. Au coeur de la visite de l’envoyé spécial du souverain marocain, les démarches du Palais royal pour réintégrer l’Unité africaine, selon la presse marocaine.
Respect de la procédure
Par ailleurs, le vice-Président de la Commission africaine, Erasmus Mwencha a indiqué dans une conférence de presse vendredi à Kigali, à;la veille de l’ouverture du sommet de l’UA, que la procédure d’admission doit être respectée. »Le Maroc doit manifester sa volonté de réadmission, il y a ensuite réunion et vote. L’admission se fait à la majorité simple », a t-il expliqué à des journalistes. Reste cependant à régler le problème de la RASD, membre à part entière de l’UA, car deux pays ne peuvent représenter un même territoire et siéger en même temps à l’UA. La démarche marocaine a été douchée dimanche à l’ouverture du sommet de Kigali par la présidente sortante de la Commission de l’Union africaine, lorsqu’elle a renouvelé le soutien de l’UA à la RASD, à l’ouverture du 27e sommet de l’UA dimanche à Kigali. Pis, le report de l’élection d’un successeur à Nkozazana au prochain sommet de l’UA prévu en janvier 2017, met d’office sous le boisseau les objectifs du Maroc, qui comptait sur l’élection de l’un des trois candidats en lice (la ministre des Affaires étrangères du Botswana, Pelonomi Venson-Moitoi, l’ancienne vice-présidente ougandaise, Speciosa Wandira Kazibwe, et le ministre des Affaires étrangères de la Guinée équatoriale, Agapito Mba Mokuy) pour soutenir sa demande d’admission. Le Maroc occupe depuis 1975 le Sahara Occidental, juste après le retrait de l’Espagne, qui administrait ce territoire.