Ce n’est pas une surprise : la Haute Cour de Londres a rejeté vendredi la demande d’indemnité d’un montant de 1,2 milliard de dollars déposée par la Libyan Investment Authority (LIA) contre Goldman Sachs. Même si la LIA était fondée à croire que la banque américaine l’avait sciemment orienté vers des placements « hasardeux » sur des titres toxiques, la partie judiciaire était difficile. Il fallait prouver que l’incompétence du personnel libyen a été utilisée par la banque pour gruger la LIA.
La défense de la LIA invoquait l’amateurisme des responsables du fonds souverain créé en 2006 pour gérer les revenus pétroliers de la Libye qui ont été abusé par Goldman Sachs en l’orientant vers ces placements en 2008. Au début du procès, les avocats du LIA ont affirmé que Goldman Sachs a payé pour des prostitués, des jets privés et des hôtels cinq étoiles et a organisé des réunions sur des yachts pour mener en bateau les responsables du fonds.
Les avocats de la LIA ont cité un message interne d’un associé de Goldman Sachs qui notait dans lequel il affirmait que le fonds était « très rudimentaire » et que « tout le monde pourra le violer ». Dans sa plainte, déposée début 2014, le LIA accusait le géant financier américain d’avoir « tiré parti du manque de sophistication financière du personnel du fonds » pour l’encourager à investir dans « des transactions sans intérêt pour lui « . La Banque a vendu des produits dérivés sophistiqués « à quelqu’un qui vit au milieu du désert avec ses chameaux« .
Mieux, un employé de Goldman Sachs a rejoint le fonds souverain libyen et a gagné la confiance « d’un personnel jeune et influençables » pour lui vendre des produits dérivés entrainant des pertes de 1,2 milliards de dollars. Au passage, Goldman Sachs a engrangé la bagatelle de 220 millions de dollars de bénéfice.
Pour la LIA et ses avocats, il y a eu abus de confiance voire manipulation. La Libyan Investment Authority (LIA) tentait ainsi de récupérer les sommes investies par l’intermédiaire de Goldman Sachs dans neuf opérations sur les marchés de produits dérivés financiers, des positions dont valeur avait été pratiquement réduite à zéro par la crise financière de 2008.
La loi ne protège pas les naïfs?
Goldman Sachs a affirmé que ces pertes étaient le fait « d’une dépression financière imprévue ». Le tribunal britannique a rejeté la demande la LIA en estimant qu’elle a « grandement exagéré la naïveté et la candeur de son personnel senior et junior sur la nature de leurs relations avec Goldman Sachs ».
Une manière de dire que la loi ne protège pas les « naïfs » ou les « imbéciles? ». Le fonds souverain libyen s’est dit « déçu » mais n’a pas encore annoncé s’il comptait faire appel. Le fonds souverain a annoncé qu’il étudierait le jugement avant d’envisager toutes les options possibles.
Il est probable cependant qu’il y aura un appel. Ali Mahmoud Hassan, le président du comité intérimaire chargé de gérer le LIA a souligné que le verdict « ne brisera pas notre détermination » à « poursuivre ceux qui ont exploité les Fonds à la fin des années 2000 « .
Le procès contre Société Générale en avril
Le tribunal britannique semble avoir clairement décidé que l’incompétence des dirigeants de la LIA sous Kadhafi était un argument qui joue en faveur des banques. Les avocats, eux, tente de démontrer qu’il ne s’agit pas seulement d’un problème de compétence mais que le fonds souverain a fait l’objet de manoeuvres malicieuses.
Ce jugement qui satisfait Goldman Sachs augure-t-il d’une défaite de la LIA dans la procédure engagée contre la banque Société Générale à laquelle il réclame 2,1 milliards de dollars en lien avec des opérations réalisées entre 2007 et 2009 et dont le procès devrait s’ouvrir en avril prochain ?
La LIA accuse la banque française de lui avoir fourni de fausses informations ou d’avoir omis de l’informer. Société Général est accusée d’avoir versé des pots-de-vin à un proche de la famille Kadhafi en contrepartie de supposés services de conseil portant sur 2,1 milliards de dollars investis dans des obligations émises par le groupe français et plusieurs de ses filiales fin 2007 et mi-2009.
« Les investissements et les transactions effectués pour le compte de la LIA ont généré de lourdes pertes en raison de malversations et d’actes de corruption » selon la Libyan Investment Authority qui réclame 1,5 milliard de dollars (1,09 milliard d’euros).