Après l’Algérie, c’est au tour du Maroc de vivre une scabreuse histoire d’engraissement douteux d’ovins. Pour cet Aid El Fitr, beaucoup de marocains se sont aperçus avec stupeur que la viande de leur mouton, qu’ils viennent de sacrifier, avait vite fait de tourner au vert, avec des signes de putréfaction.
Au lendemain de cette fête religieuse, la presse locale tout comme les réseaux sociaux avaient publié des photos de carcasses de moutons ayant une étrange couleur verdâtre. Alertées, les autorités ont fait état de 670 plaintes de propriétaires de moutons dont la carcasse s’est putréfiée.
Selon l’Office marocain de sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA), »la coloration superficielle de la viande ou sa putréfaction est due à une contamination bactérienne de type pseudomonas, clostridies, coliformes et staphylocoque (contenue) en grand nombre dans l’appareil digestif de l’animal”.
Mais, aucune enquête n’a été annoncée par le ministère de l’Agriculture et des pêches maritimes sur ce phénomène. Pourtant, le débat fait rage entre l’association des vétérinaires et les pharmaciens.
Les pharmaciens accusent
Intervenant dans ce débat, Mohamed Lahbabi, président de la confédération des syndicats de pharmaciens du Maroc, a souligné jeudi 7 septembre que »des injections de produits chimiques destinés à faire grossir les animaux », seraient à l’origine de la putréfaction de la viande.
Plus explicite, il affirme que »le Megamax est un concentré de protéines, de lactosérum et de protéines de lait qui, en l’associant avec des hormones concentrées dans le Minidril, aiderait dans l’engraissement ». Dans une déclaration à l’hebdomadaire Telquel, il précise que »le bétail devient plus actif. Il enfle, prend du volume, mais ne gagne pas en poids. » Et, dès qu’on l’égorge, des infections se manifestent et la viande change de couleur ».Pour lui, la consommation d’une telle viande conduit à la mort.
Mais, l’ONSSA dément l’utilisation de produits d’engraissement chimiques. Pour l’Office, il s’agit de mauvaises conditions de conservation de la viande avec une période de fortes chaleurs, et le changement de couleur serait dû à une infection de certaines bêtes par des « bactéries de type clostredies ».
L’ONSSA rappelle ainsi les cas observés en 2016 à Fès, à Safi et à Tanger, mais en proportion infime, et parle également des »engraissements intensifs des derniers jours avant l’Aïd ». Dans un premier temps, l’Office avait indiqué que « la teinte verdâtre de la carcasse ou sa putréfaction sont liées au non-respect des règles d’hygiène durant l’abattage et à l’écorchage du mouton et aux conditions de conservation de la carcasse ».
Les vétérinaires répliquent
Se sentant visés par les déclarations du président de la fédération des pharmaciens, les vétérinaires marocains se défendent. Le Comité national de l’ordre national des vétérinaires (CNONV) indique dans un communiqué que les quelque 1000 vétérinaires du secteur privé, »travaillent tout au long de l’année dans toutes les régions du royaume à travers les campagnes menées par l’ONSSA ».
Ils surveillent donc »aussi les opérations d’engraissement des cheptels d’ovins, de caprins et de vaches dans les grandes comme dans les petites fermes. »
Le CNONV ajoute que »ces éleveurs utilisent les médicaments autorisés en respectant les prescriptions des vétérinaires, avec le respect total de la période de pause avant le sacrifice », et, sur les informations faisant état de l’utilisation de médicaments non autorisés, le Comité »adresse des courriers aux autorités compétentes à chaque fois pour combattre ce fléau. »
Pour les vétérinaires, il n’y a pas eu de viandes contenant des matières interdites, car »ils ont adressé des échantillons aux laboratoires nationaux pour des analyses ayant affirmé que la viande ne contient aucune matière interdite », selon le communiqué du CNONV. Bref, verte ou rouge, la viande de l’Aïd fait jaser les marocains.