Qui est responsable de la flambée des prix de la pomme de terre? Pour le ministère de l’Agriculture elle est due à la « désorganisation du marché ». Celui du Commerce assure que les quantités disponibles sont « nettement moins importantes » qu’en 2013. En attendant la fin de cette polémique, les prix se sont stabilisés à un niveau plutôt élevé.
Les prix des fruits et légumes se sont stabilisés à un niveau relativement élevé mais la polémique continue sur les raisons de cette hausse qui dure depuis l’été. La pomme de terre, produit phare, a symbolisé cette flambée, en dépassant le seuil de 100 dinars le kilo, avant de se replier légèrement depuis trois semaines.
Les secteurs de l’agriculture et du commerce se rejettent la responsabilité de cette flambée. M. Omar Zeghouane, directeur général de l’Institut technique des grandes cultures, estime que les besoins de l’Algérie en pomme de terre, évalués à 40 millions de quintaux, sont satisfaits par la production locale, même si la production a, selon lui, baissé de 10% en 2014. Pourquoi cette baisse? Il botte en touche. La baisse serait due à « une désorganisation du marché dans laquelle le ministère de l’Agriculture n’est pas concerné ». « Ces filières ont besoin de temps pour s’organiser », admet-il.
Au ministère du Commerce, on admet que le fameux Syrpalac (système de régulation du marché) a « mal fonctionné ». Mais cela n’est pas totalement imputable au secteur du commerce, car il y avait « insuffisance des quantités stockées dans les chambres froides », selon les résultats auxquels est parvenue une cellule mise sur pied pour enquêter sur les raisons de la flambée des prix.
Le ministère de l’Agriculture : « Pas de spéculation à grande échelle »
Cette cellule a évidemment disculpé le secteur du commerce. Pas de spéculation significative, pas de « stockage clandestin à grande échelle», mais des quantités de pomme de terre mises sur le marché « nettement moins importantes » qu’en 2013, selon le directeur général de la Régulation et de l’Organisation des activités au ministère, M. Abdelaziz Ait Abderrahmane, qui rejette donc la balle vers le secteur de l’agriculture.
« Nous avons lancé un signal dès début septembre, quand les prix ont commencé à augmenter, pour faire rentrer sur le marché les quantités stockées. Cet appel n’a pas été pris en considération », a déclaré à l’APS M. Ait-Abderrahmane, ajoutant qu’en tout état de cause, le marché des fruits et légumes est libre. Mais il affirme, catégorique : « La spéculation existe, certes, mais elle ne représente pas le facteur principal provoquant la flambée des prix de la pomme de terre. »
Souci de traçabilité ou de contrôle bureaucratique des fellahs ?
Le ministère du Commerce tente de prévenir de nouvelles crises, en prenant de nouvelles initiatives. Il veut mettre en place un dispositif « anti-spéculation », par le biais de l’Entreprise publique des entrepôts frigorifiques de la Méditerranée (Frigomedit). Celle-ci veut approvisionner directement les détaillants, à partir des entrepôts frigorifiques, sans passer par les intermédiaires.
Le dispositif veut introduire des règles bureaucratiques inapplicables. Pour le produit de la nouvelle saison, l’agriculteur serait invité à vendre sa récolte aux seuls commerçants activant de manière formelle, avec un registre légal. Un système de « bons de transaction » serait à l’étude, pour accompagner les produits, de l’exploitation agricole jusqu’au marché, ce qui permettrait « une meilleure traçabilité des produits commercialisés », selon M. Ait-Abderrahmane.
Le système est visiblement inadapté. Il n’a aucune chance d’être validé par les fellahs. Il vise en fait à soumettre les fellahs aux nécessités de contrôle de la bureaucratie, non à encourager la production.