Les arguments avancés mardi par la ministre de la Poste et des TIC, Imane-Houda Feraoun, pour justifier la décision de couper le réseau internet durant la période des épreuves partielles du baccalauréat, soit du 19 au 23 juin, pour éviter de nouvelles fuites de sujets, n’ont pas fait l’unanimité dans la presse de ce mercredi.
Alors que plusieurs organes de presse se sont limités à reproduire les déclarations de la ministre, à l’agence officielle APS, sans réellement les commenter, d’autres se sont félicités des explications qu’elle a données. D’autres trouvent, par contre, qu’elles étaient loin d’être convaincantes et ont éludé certains aspects, puisque la responsable affirme qu’il «ne s’agit pas de coupure», mais de réduction du trafic et de l’accès aux réseaux sociaux, alors que le blocage a été, en fait, d’une plus grande ampleur.
Coupure ou simple réduction du trafic et de l’accès aux réseaux sociaux ?
Horizons reprend à la une les propos de la ministre, qui affirme qu’il s’agit d’une «restriction d’accès aux réseaux sociaux» et se félicite «nous avons protégé les candidats».
Même approche d’El Moudjahid qui titre «faire avorter les tentatives criminelles». Citant la ministre, le journal écrit que «ces mesures limitées ont permis ‘’l’avortement de tentatives criminelles qui visaient à mettre en péril le devenir de milliers de candidats au baccalauréat’’», avant d’affirmer qu’ «il ne s’agissait pas de ‘’coupure d’internet, mais simplement d’une réduction du trafic pendant la première moitié du premier examen’’».
Le recours aux VPN remet en question la mesure de blocage du réseau internet
A la question qui lui a été posée lors de l’entretien sur l’efficacité peu évidente de cette mesure, du «moment que les internautes accèdent via les VPN», le journal reprend les réponses de la ministre qui explique que «la blocage des VPN (…) se fait moyennant le filtrage de tout le trafic crypté, et nuirait donc sérieusement aux échanges internet non incriminés, notamment les courriers électroniques. Nous avons donc préféré surseoir à ce mode de blocage. Toutefois, il faut reconnaitre que cette machination qui a visé à généraliser entre els jeunes l’usage du VPN dépasse de loin le stade des simples fraudeurs ordinaires; d’ailleurs des mesures sévères seront prises à l’encontre des fraudeurs utilisant ces techniques ainsi que les artisans de cette machination».
Explications tardives par rapport à l’énormité de l’évènement
En revanche, plusieurs organes ont été peu convaincus par les déclarations de Mme Feraoune à l’instar du Quotidien d’Oran qui titre à la une «les explications des PTIC.. internet, crime et machination». Le journal écrit que «l’Algérie a vécu dimanche un black-out total de l’Internet» et que «les explications pas du convaincantes de la ministre sont venues un peu tard, par rapport à l’énormité de l’évènement en lui-même, une première dans le monde, si l’on excepte les coupures techniques ou par accidents».
«Trois jours donc après ce black-out cybernétique, la ministre intervient (…) pour d’abord réfuter cette coupure, ensuite pour dire avec un aplomb déconcertant que c’était seulement les réseaux sociaux qui avaient été bloqués pour protéger les candidats à la session partielle du BAC2016 (…). Elle est même allée jusqu’à affirmer que sur les désagréments causés par cette mesures aux usagers d’Internet, que le devenir des candidats ‘’nous oblige à faire le sacrifice et céder un peu de notre bien-être personnel pour contribuer au bon devenir de toute la société’’». «Ce qu’elle ne dit pas, par contre, c’est que toute l’économie nationale, banques, administrations, ministères, établissements de commerce, a été bloquée pendant de longues heures, et des dizaines de milliers de travailleurs avaient rejoint tôt leurs foyers».
L’opinion peu convaincue par une mesure jugée disproportionnée
«Coupure de l’internet..le bug du gouvernement» titre en grosses manchettes El Watan, qui écrit qu’«après avoir évité toute communication sur le sujet, le gouvernement a reconnu hier, par la voix la ministre de la Poste et des TIC, le recours à la perturbation du réseau internet pour sécuriser le déroulement du bac».
Le journal rappelle que «ces dysfonctionnements (de l’internet) sont la conséquence d’un black-out imposé par le gouvernement à l’occasion des épreuves du ‘’bac-bis’’ (…), l’opinion s‘est montrée peu convaincue par cette contre-offensive électronique jugée clairement ‘’disproportionnée’’ et que nombre d’expert ont mis en doute son efficacité ». A ce propos, le journal écrit que la ministre a indiqué «au sujet du recours au VPN (…) que cette ‘’machination (…) dépasse de loin le stade des simples fraudeurs ordinaires’’. Voilà qui vient conforter la thèse du ‘’complot anti-Benghebrit’’. Si ‘’machination’’ il y a, il est légitime de subodorer que celle-ci aurait des ramifications au sein même de l’appareil d’Etat».
« Quoi qu’il en soit, une chose est sûre: on se souviendra longtemps du bac 2016. Un bug d’Etat… », ajoute, en conclusion, le journal.