Pour le puissant lobby des concessionnaires automobiles, les temps ont bien changé. Alors qu’il y a à peine trois ans, il défaisait la loi, il lance aujourd’hui un SOS pour survivre, après avoir perdu 85% de son chiffre d’affaires.
Soumis à une forte pression durant l’année 2016, les concessionnaires automobiles repartent timidement à l’offensive pour tenter de rattraper un peu de terrain et se prémunir des critiques à venir, notamment celles relatives aux prix. Pour 2017, ils annoncent d’ores et déjà une augmentation des prix, laquelle viendra s’ajouter au renchérissement important déjà enregistré depuis dix huit mois.
Le président de l’Association des concessionnaires, Sofiane Hasnaoui a annoncé mercredi lors d’un forum économique qu’il faudra s’attendre à une augmentation des prix des véhicules automobiles de 15 à 20% en 2017. Cette hausse est le résultat conjugué de plusieurs facteurs attendus : glissement du dinar, baisse de l’activité et nécessité de redéploiement induite par ce bouleversement du marché.
M. Hasnaoui a aussi indiqué que les concessionnaires ont été contraints de réduire de moitié les postes d’emploi, et que cette baisse atteindra 75% en 2017. Selon lui, le chiffre d’affaires des concessionnaires devrait baisser de 85% en 2016, et les importations se limiter à 600 millions de dollars, ce qui représenterait moins de 10% du record atteint en 2013. Le puissant lobby des concessionnaires a durement ressenti le coup. Il n’arrive plus à influer sur la décision.
Alarmisme
Ces chiffres, délibérément alarmistes, parfois approximatifs, traduisent l’inquiétude d’un secteur qui a surfé sur la vague d’achats de 2011-2012, avant de chuter brutalement les années suivantes. Sous l’effet de l’euphorie financière de la période 2005-2011, les importations de véhicules avaient bondi à 600.000 unités, pour une facture de 7.33 milliards de dollars, avant de refluer dans les années suivantes. Face à la dérive des importations, le gouvernement a décidé de les soumettre à un système de licences, pour ramener le nombre de véhicules importés à un seuil supportable pour les finances du pays.
Le ministère du Commerce, chargé de mettre un système de licences, a pris des mesures draconiennes. Initialement fixé à 152.000 véhicules, le quota des importations a été ramené à 83.000, réduisant considérablement la voilure des principaux acteurs et poussant d’autres à la marge.
Les prix ont aussitôt explosé. Une Seat Ibiza, achetée pour 1.2 millions de dinars en 2014, est proposée à 1.8 millions de dinars en 2016. Une Peugeot 301, achetée un million de dinars il y a deux ans, est à 1.5 millions de dinars. L’augmentation est de 50%, et dépasse ce seuil pour de nombreux modèles, selon un courtier. Toute une catégorie d’acheteurs s’est retrouvée exclue du prix du neuf, pour se rabattre sur le marché d’occasion.
Bonus
Pour atténuer la tension sur le marché, une proposition a été faite d’autoriser les importations de véhicules de moins de trois ans. L’idée n’a pas réuni un consensus au sein du gouvernement et a été finalement abandonnée, non sans susciter une polémique.
Pour le gouvernement, il est hors de question de remettre en cause l’effort fait ces dernières années, en vue d’amener les constructeurs automobiles à investir en Algérie. En plus de facilités traditionnelles (exonérations fiscales, facilités financières, accès au crédit de consommation, etc.), le gouvernement veut mettre la pression sur les constructeurs automobiles pour les pousser à investir dans le pays. Cela va jusqu’à empêcher, par différentes méthodes, leurs modèles d’accéder au marché algérien.
Face à la chute de leurs ventes, de nombreux concessionnaires ont annoncé des investissements imminents en Algérie. Pour l’heure, seul celui de Renault s’est concrétisé, et il tarde à atteindre son rythme de croisière. Les autres en sont toujours au stade des intentions ou de projet. Mais tous les concessionnaires sont devant une nouvelle certitude : un bonus sera accordé à ceux vont faire du montage sur place.