« Nous avons une cellule de communication multiservice. Une équipe de développement informatique, un pôle image (photos, vidéos et montage), en plus d’une équipe chargée de la rédaction dans les deux langues », indique le porte-parole du CAMRA.
Quelques mois après sa création, le Collectif autonome des médecins résidents algériens (CAMRA), s’est distingué par des qualités organisationnelles surprenantes. Aucun syndicat, aucun collectif ni même un parti politique n’a réussi à mobiliser ses troupes ces dernières années, comme le font aujourd’hui les représentants du CAMRA. Ce tout nouveau collectif est né dans un contexte de crise. Il a vu le jour, après le refus des autorités de délivrer aux médecins résidents un agrément pour la création d’un syndicat.
« La légitimité, le niveau intellectuel, la concertation horizontale, ainsi que la maîtrise des technologies de l’information et de communication sont les principaux facteurs de la réussite des actions du CAMRA et de sa continuité », estiment certains syndicalistes témoins de l’évolution de ce collectif.
La démocratie dans la prise de décision, clé de la continuité
Le bureau national du CAMRA, arrive à mobiliser, à organiser et à fidéliser 15 000 médecins résidents sur le territoire national. Ledit bureau a visiblement gagné la confiance de sa base grâce à la concertation horizontale et au vote démocratique des décisions prises. « Le vote se fait au niveau des différents services de l’hôpital, il y a ensuite le résultat du vote de l’hôpital, puis celui de l’ensemble des hôpitaux de la wilaya et enfin le résultat national. Tous les résidents, sans exception, votent ce qui fait que la décision finale soit celle de la majorité », nous explique le porte-parole du CAMRA, Dr Hamza Boutaleb.
« C’est un vote entièrement transparent et démocratique », ajoute-t-il. « L’union fait la force, et nos jeunes médecins l’ont démontré à travers une structuration qui couvre tous les centres hospitalo-universitaires mais surtout grâce au principe de la concertation horizontale dans la prise des décisions », déclare le président du Syndicat national des praticiens de santé publique (SNPSP), Dr Lyes Merabet.
Plusieurs médecins résidents grévistes nous ont assuré que le bureau national ne fait « qu’exécuter la volonté de la base ». D’ailleurs, « les points soumis au vote viennent de la base. Les échanges et la collecte d’informations commencent au niveau des services des hôpitaux et suivent la hiérarchie. Nous organisons le vote et nous publions les résultats sous forme de communiqués. Raison pour laquelle les 15 000 médecins gréviste répondent à nos appels et nous entourent dans nos actions », précise Dr Boutaleb.
Le Pr. Yacine Zerguini, chirurgien orthopédiste et membre de la commission médicale de la FIFA, qui a demandé à Maghreb Emergent de le présenter en tant que médecin résident, par solidarité. « C’est un titre dont je suis fier », nous a-t-il confié. « La médecine est un travail d’équipe où le médecin joue le rôle de chef d’orchestre. Il doit apprendre à faire confiance à son équipe, et à la surveiller, en même temps, pour réussir l’opération. Une règle que le fonctionnement du CAMRA reflète ».
Les autorités dans une posture difficile
Les autorités algériennes ont souvent trouvé des compromis avec les différents mouvements de contestation. Mais il semblerait que le défi soit plus difficile à relever avec les médecins résidents.
Le professeur, Yacine Zerguini, a souligné que les résidents sont « l’élite de l’élite, des gens qui ont été soumis deux fois à un examen très dur (…) Le ministère de la Santé doit savoir qu’il n’a pas à faire à n’importe qui, les autorités concernées se trompent si elles croient qu’elles peuvent manipuler ces jeunes médecins », martèle le professeur.
Son confrère Lyes Merabet ajoute: « Le CAMRA est un véritable vivier de compétences intègres et engagées qui assureront la relève tant au niveau professionnel, syndical que ordinal ». Quelques semaines auparavant, le Dr Merabet avait déclaré lors d’une conférence de presse que les membres du CAMRA sont dotés d’un reflex syndical que beaucoup de syndicalistes actifs depuis plus de 20 ans n’ont pas.
Une cellule de communication bien équipée
« Nous avons une cellule de communication multiservice. Une équipe de développement et informatique, un pôle image (photos, vidéos et montage), en plus d’une équipe chargée de la rédaction dans les deux langues ; arabe et française », nous explique le porte-parole du collectif.
« Nos ressources humaines sont à 100% internes, tous les membres du service communication sont des représentants du CAMRA ou des résidents de la base. Nous avons même pu développer en interne notre propre site électronique dont nous avons financé l’hébergement avec notre propre argent », a-t-il poursuivi. D’après le même médecin, l’alimentation du site en contenus et tout le travail fait sur les réseaux sociaux, est un travail interne.
Hamza Boutaleb assure, à ce propos, que les réseaux sociaux étaient et restent les médias alternatifs des grévistes. « C’est grâce aux réseaux sociaux que notre mouvement est devenu connu par l’opinion publique, et c’est grâce à ces mêmes moyens que nous arrivons à mobiliser notre base en un temps record ».
« Dans les CHU, tout le monde fait plus qu’il ne devrait dans un système de santé dévoyé », regrette le Dr Zerguini. « L’objectif des résidents est d’apprendre, c’est pour cela qu’ils se battent à la fois pour améliorer leurs conditions de travail et d’apprentissage. Leur mouvement est vraiment étonnant. Personnellement, je ne considère pas leur action comme une grève mais comme un acte de désobéissance face à une législation», explique-t-il.
Plusieurs mois après de la création du collectif, les représentants du CAMRA affirment avoir acquis une certaine expérience. « Avec le temps nous rencontrons moins de problèmes d’organisation et nous commettons beaucoup moins d’erreurs », indique Hamza Boutaleb. Selon des délégués du collectif, le mouvement de contestation des résidents de 2011 et l’échec de plusieurs grèves dans d’autres secteurs, ont servi de leçons aux résidents.