L’Algérie n’a pas de dettes, c’est toujours cela de pris. Mais, rappelle Akram Belkaïd, que d’occasions manquées par un gouvernement qui pense au fond que le pétrole finira pas remonter en oubliant qu’il finit aussi par baisser.
Face à la dégradation des finances publiques, nombre de responsables algériens espèrent que le marché pétrolier repartira à la hausse et que cela règlera les problèmes actuels. « Ça montait, c’est descendu, ça remontera », tel est leur raisonnement et c’est le même en vigueur depuis plusieurs décennies.
Chaque fois que la situation exigeait des réformes sérieuses et une vraie prise en main de la diversification économique, c’est le retour de la flambée des prix qui a eu raison de ces velléités de changement. Reste que la situation actuelle est aussi préoccupante, sinon plus, que celle de la fin des années 1980.
Dette remboursée, un souci en moins
Il y a certes un point positif qu’il ne faut pas négliger. L’Algérie est peu endettée sur le plan extérieur. Pas d’intérêts à payer, pas de danger de cessation de paiement et donc pas de risque de mise sous tutelle de la part du Fonds monétaire international (FMI), du Club de Paris (groupe de créanciers étatiques) ou de la Banque mondiale. Autrement dit, pas de plan d’ajustement structurel aux effets dévastateurs comme en 1996-1997.
Il faut, à cet égard, remercier celles et ceux, notamment les hauts fonctionnaires, qui ont su convaincre les autorités politiques de rembourser cette dette à partir du début des années 2000. Pour ce faire, ils ont trouvé un argument majeur : éviter que l’Algérie ne connaisse une humiliation comparable à celle des années 1990 quand des jeunots arrogants du FMI donnaient des leçons aux responsables algériens.
On peut donc se consoler en se disant qu’au moins une partie de la manne n’a pas été gaspillée et qu’elle aura servi à quelque chose, cela à l’heure où l’option de l’endettement revient sur la table, quoiqu’en dise le gouvernement actuel.
Mais on ne peut s’empêcher de regretter que d’autres initiatives n’aient jamais été prises. Dans une chronique publiée en 2008, nous plaidions pour que l’Algérie crée enfin son fonds souverain (*).
L’idée de base était simple. Dans un contexte de crise financière en Occident et de grande braderie de certains actifs (notamment immobiliers), des prises de participation dans des valeurs phares auraient constitué une vraie assurance pour l’avenir. Pas simplement un bas-de-laine pour les temps difficiles, mais une garantie de ressources permanentes.
A l’époque, nombre de responsables opposaient la question du manque d’expertise et des risques de mauvais placements. Il est vrai que les milliards de dollars perdus par la Libye de Kadhafi dans des investissements hasardeux sur la Bourse de Londres donnent quelques arguments à cette thèse. Mais tout de même !
Qui peut croire que l’Algérie de 2008 n’avait pas les compétences (ou les moyens) de mettre en place un fonds actif. Si le Qatar l’a fait en moins d’un an (et ses revenus lui sont bien utiles en ces temps où il subit un blocus de la part de ses voisins). Une immense occasion a été ratée. Une parmi tant d’autres.
L’effet Kurdistan
En attendant, et comme pour donner raison aux attentistes, le cours du brut est de nouveau orienté à la hausse. Comme c’est souvent le cas, les turbulences géopolitiques poussent le marché à anticiper des difficultés d’approvisionnement.
Le référendum d’autodétermination du Kurdistan irakien et les risques d’un blocus turc sur ses exportations de brut contribuent à cette poussée haussière. A cela s’ajoute le fait que la demande mondiale repart et que les États-Unis connaissent quelques ratés dans leur production d’or noir non conventionnel. Le baril se rapproche des 60 dollars.
On est loin des 100 dollars qui faisaient tourner la tête aux membres de l’OPEP, lesquels membres se réuniront en novembre prochain pour décider s’ils maintiennent leur restriction en matière de pompage.
Quoi qu’il en soit, espérons simplement que le mantra mentionné en début de chronique sera répété autrement et que les responsables algériens comprendront enfin que même si le pétrole remonte, il finira toujours par redescendre. Et qu’il n’y a rien de mieux qu’une saine diversification (pas celle exigée par le patronat, mais ceci est une autre histoire) pour encaisser au mieux ce yoyo.