Le dessalement d’eau de mer offre une sécurité pour l’eau potable dans les principales villes du nord de l’Algérie. Mais pour l’agriculture, l’incertitude demeure.
Les pluies enregistrées à la mi-janvier ont atténue le spectre de la sécheresse en Algérie, mais la saison n’est pas encore sauvée, en raison d’un déficit pluviométrique important. Selon des spécialistes contactés par Maghreb Emergent, le risque d’une grave pénurie d’eau potable, comme s’était passé en 2001, est écarté. Par contre, pour l’agriculture, l’inquiétude persiste, avec des premières pertes d’ores et déjà enregistrées.
Pour l’eau potable, la plupart des grandes villes du nord du pays disposent de ressources en mesure de couvrir leurs besoins au-delà de l’été 2016, a indiqué un responsable de l’Algérienne des Eaux. Les stations de dessalement d’eau de mer, qui assurent près de deux millions de mètres cube par jour, garantissent une distribution permanente aussi bien pour les villes côtières que pour certaines agglomérations situées loin des côtes, comme Tlemcen. Seules des « poches » risquent de poser des problèmes en cas de sécheresse grave, mais une pénurie est exclue.
Les barrages, remplis à un peu plus de 70%, selon le ministre des ressources en eau Abdelouahab Nouri, garantissent un approvisionnement qui va au-delà de l’été prochain. Les réserves actuelles atteignent 4.6 milliards de mètres cube, a-t-il indiqué. Un apport supplémentaire pendant les mois de février et mars pourrait dissiper toutes les craintes.
Inquiétudes
Par contre, pour l’agriculture, la situation est plus préoccupante. D’ores et déjà, pour les céréales, de très nombreux fellahs de l’ouest du pays et des Hauts Plateaux, ayant procédé aux labours tôt dans la saison, sont contraints de procéder de nouveau à un ensemencement. Par manque d’eau, les plants sont perdus. Paradoxe de la nature, ceux qui ont pris du retard sont les plus chanceux : les labours ont précédé de peu les pluies de janvier.
Cette situation relance avec encore plus d’acuité la question de l’irrigation d’appoint à assurer pour les céréales. Un projet d’un million d’hectares a été lancé, mais les moyens, les financements et la méthode à utiliser pour y arriver ne sont pas encore clairement définis. Le ministre des ressources en eau a déclaré dimanche qu’une première tranchée de 143.000 hectares a déjà été lancée, dont 25.000 hectares ont été déjà distribués aux exploitants.
Un recours plus systématique à l’utilisation des usées et retraitées est envisagée. A l’horizon 2020, les stations de traitement installées devraient fournir un million de mètres cube par jour. La relance de la seule station de traitement d’Oran devrait permettre d’irriguer 8.000 hectares, a déclaré M. Nouri.
Déficits énormes
Ces projets butent toutefois sur des questions de coût non encore abordées. Le directeur général de l’Algérienne des Eaux, M. Zidane Merah, a ainsi indiqué dimanche, au cours d’une rencontre des cadres du secteur des ressources en eau, que l’eau potable revient en moyenne à 60 dinars le mètre cube, alors qu’elle est cédée à 18 dinars seulement. Les eaux usées retraitées coûtent 90 dinars le mètre cube. Quant aux eaux issues du transfert de In-Salah vers Tamanrasset, elles coûtent 170 dinars le mètre cube.
Ce déséquilibre entre coût et prix de vente fausse largement la gestion économique de l’eau, dont le prix n’a pas changé depuis une décennie. Le résultat est préoccupant pour l’ADE : le déficit d’exploitation devrait se situer autour de 23 milliards de dinars en 2015, selon M. Merah.