La solution proposée fin mai dernier pour empêcher la diffusion des sujets du Bac sur internet a échoué. Le gouvernement hésite à recourir à la coupure mais ne l’exclut pas.
Le spectre d’un nouveau scandale au Bac hante le gouvernement. Le premier ministre Abdelmalek Sellal, exposé en quasi première ligne sur ce dossier, recherche le bon arbitrage pour éliminer le risque fraude sans provoquer de nuisances au pays. La ministre de l’éducation nationale Nouria Benghebrit ne peut pas se permettre un second examen du baccalauréat entaché de fraude massive. Elle serait, selon une source du secteur des télécommunications, la première partisane d’une coupure complète d’Internet quelques heures par jour. Cette coupure intégrale irait du moment où les sujets quittent l’office des examens (ONEC) jusqu’au début de chaque épreuve. Un délai d’une dizaine d’heures auparavant, mais qui serait raccourci à l’occasion de cette seconde épreuve partielle qui débute dimanche 19 juin. L’option d’une coupure complète d’Internet n’est, bien sûr, pas soutenue par de nombreux ministres à cause de son incidence désastreuse sur les flux économiques et le fonctionnement des services de l’Etat. Elle n’a pas pourtant pas quitté la table trois jours avant le début des épreuves.
Le départ du DG intérimaire de Algérie Télécom, un mauvais présage ?
L’option d’une coupure intégrale de la connexion Internet a déjà été envisagé lors des épreuves du baccalauréat entre le 29 mai dernier et le 02 juin, lorsqu’au 3 e jour de l’épreuve l’ampleur de la diffusion des sujets a provoqué un mouvement de panique au sein de l’administration de l’éducation nationale et au sein du gouvernement. Une autre « solution » a été retenue. Elle a consisté à déployer des filtres qui ont fortement ralenti l’accès aux réseaux sociaux. Le départ le 08 juin dernier, de Mohamed Sebaa de son poste de DG par Interim de Algérie Télécom, a été interprété, par certaine sources dans le secteur du MPTIC, comme une conséquence directe de l’échec imputé par le gouvernement à cette solution soft qui a tenté de ménager la lutte contre la fraude et la sauvegarde de l’usage d’Internet. Au sein de Algérie Télécom, le sentiment est tout de même que le remplacement du DG par Interim Mohamed Sebaa par le président du Conseil d’administration, Tayeb Kebbab n’est pas nécessairement lié à la diffusion des sujets du bac sur Internet, Mohamed Sebaa ayant souhaité faire valoir ses droits à la retraite avant même l’éviction, en avril dernier, de Azouaou Mehmel de la tête de l’opérateur historique algérien.
Qui a le droit de couper l’accès à Internet ?
La tentation de recourir à une coupure intégrale de l’accès à Internet durant l’examen de baccalauréat partiel à partir de dimanche prochain menace clairement de faire chuter la productivité nationale passablement affectée déjà par la contrainte du mois de ramadan. La rupture, à Annaba en octobre 2015, du câble sous marin de fibre optique qui relie le réseau algérien à la bande passante mondiale a provoqué de très fortes perturbations dans l’activité économique du pays durant une semaine. Une autre séquence de coupure, cette fois volontaire, pose un problème légal majeur. Qui en Algérie a la prérogative de déconnecter le pays ? Il existe un vide juridique à ce sujet, le législateur ayant renoncé de longue date à la mise à jour du droit numérique algérien. Aux Etats Unis, une disposition prévoit que le président de la République peut protéger l’espace numérique américain d’une cyber-attaque massive (provenant de l’étranger) en le déconnectant d’Internet à l ‘international. Il s’agit d’une mesure de protection de la sécurité nationale. La lutte contre la fraude au Baccalauréat est elle de l’ordre de la protection de la sécurité nationale ? Le premier ministre Abdelmalek Sellal a bien déclaré le 05 juin dernier que « la fraude massive au Bac était une atteinte à la sécurité nationale ». La fetwa politique pour la coupure d’Internet est déjà là.