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Algérie : les instances du football peinent à encadrer les salaires pros

Par Mohamed Zenina
août 7, 2016
Algérie : les instances du football peinent à encadrer les salaires pros

Après une première tentative avortée en 2014, les présidents des clubs de la Ligue 1 professionnelle et le patron de la Fédération algérienne de football (FAF) Mohamed Raouraoua, ont décidé lors d’une réunion en janvier dernier de fixer le plafond des salaires des joueurs à hauteur d’un million de dinars. Cette décision applicable à partir de la saison 2016-2017, censée contribuer à une meilleure santé financière des clubs, ne fait pas l’unanimité car jugée en contradiction avec le professionnalisme et pose plusieurs problèmes.

 

Il en est de même pour la décision des instances footballistiques algériennes relative à l’interdiction faite aux clubs des ligues professionnelles de recruter des joueurs étrangers à compter de la saison 2016-2017. Cette décision, également censée sauver les clubs de la faillite qui les guette depuis l’introduction du professionnalisme -qui n’a en fait apporté rien de nouveau si ce n’est qu’il a ouvert grand la porte à un recrutement tous azimuts de joueurs étrangers qui a dangereusement mis en péril la situation des clubs-, est elle aussi très contestée.

S’agissant du plafonnement des salaires, Raouraoua , s’était attardé lors de la réunion avec les dirigeants des 16 clubs de Ligue 1, sur les «les gros salaires» qui, selon lui, « restent la source des problèmes financiers» des clubs.

Certains joueurs touchent des salaires dépassant celui du président de la République !

Pour les partisans de cette décision, il s’agit d’un remède efficace contre l’une des causes qui mettent l’avenir des clubs professionnels en danger, à savoir le salaire des joueurs qui dépasse, pour certains d’entre eux, celui des P-DG des grosses boîtes privées et des multinationales installées en Algérie, des ministres, des députés et même du président de la République !

Certains joueurs (une minorité) touchent jusqu’à 300 fois le Salaire national minimum garanti (SNMG), d’autres 200 fois, alors que la majorité touche au moins 80 fois le SNMG.

Cette mesure devait, donc, permettre aux clubs de revoir à la baisse leur masse salariale, d’autant plus qu’un accord a été trouvé avec la Caisse nationale des assurances sociales (CNAS) où un barème devait être élaboré pour que chaque club puisse s’acquitter de ses obligations envers cet organisme.

Mais depuis, beaucoup font remarquer que certains clubs n’ont pas hésité à contourner cette décision en «usant de  moyens, illégaux, pour verser à leurs joueurs des salaires dépassant un million de dinars».

Une Décision en contradiction avec le professionnalisme et vouée à l’échec

Pour certains cette décision n’apporte pas de solution aux problèmes financiers des clubs et de plus elle est en contradiction avec le professionnalisme tant prôné par les instances du football algériens.

 «C’est tout simplement une décision qui n’a rien à voir avec le professionnalisme. On va devenir tout simplement la risée des autres pays. Je n’ai jamais vu des dirigeants de football imposer aux clubs professionnels un barème de salaires à octroyer à leurs joueurs. Cela ne se passe qu’en Algérie», avait déclaré l’ancien joueur, puis manager général de l’ASO Chlef, Samir Zaoui, au lendemain de la réunion.

A la question de savoir si cette mesure allait être respectée qui lui était posée par le site électronique Tout Sur l’Algérie (TSA), Zaoui a été on ne peut plus catégorique: «Je ne pense pas. Je suis même persuadé de l’échec de cette mesure», a-t-il répondu. «Je doute fort d’ailleurs que les présidents des clubs jouent le jeu (…). Je m’attends ainsi, dans le cas où le plafonnement des salaires soit appliqué, que les caisses noires prennent le relais», a-t-il prédit.

Interdiction de recrutement de joueurs étrangers, une mesure contraire aux règles de la FIFA

L’autre décision de la FAF qui suscite une grande controverse est l’interdiction de recrutement de joueurs étrangers.  Tout d’abord, il s’agit d’une décision illégale car en totale contradiction avec le règlement de la Fédération internationale de football (FIFA), relèvent les opposants à cette mesure. En outre, comme dans la majorité des cas, les dirigeants des clubs ne reculeront devant aucun procédé pour contourner allègrement cette décision.

Le procédé le plus utilisé pour le moment est celui de recourir aux joueurs ayant la double nationalité, en l’occurrence les Franco-Algériens et sur lesquels les clubs se sont rabattus pour, comme le relève l’agence officielle APS «contourner une loi loin de faire l’unanimité sur la scène footballistique nationale».

La « palme » du nombre record de joueurs franco-algériens recrutés cet été revient à l’USM Alger, qui a engagé pas moins de six éléments: Ziri Hammar (JS Saoura), Toufik Zeghdane (MC Alger), Mohamed Benyahia (MC Oran) ainsi que Rafik Bouderbal, Abel Khaled et Réda Bellahcene, venus des divisions inférieures en France.

Le MO Béjaïa, engagé en phase de poules de la Coupe de la Confédération (CAF), n’est pas en reste puisqu’il a engagé jusque-là trois joueurs: le défenseur Ammar Benmelouka, le milieu offensif Youcef Touati et Kamel Yesli, qui avait porté les couleurs de la JS Kabylie.

Le MC Oran, qui a connu un véritable remue-ménage au sein de son effectif, a recruté deux bi-nationaux, à savoir les défenseurs Adel Gfaïti et Mohamed Réda Hlaïmia.

D’autres clubs se sont contentés d’un ou de deux joueurs, à l’image de l’USM Harrach qui a engagé deux gardiens de but, en l’occurrence Yazid Mokhfi et Axel Sahli.

S’agit-il plutôt de mesures pour réduire les coûts des transferts sociaux permettant d’acheter la paix sociale?

L’instance fédérale avait justifié cette décision par les «difficultés financières et l’impossibilité d’obtenir des devises légalement pour payer les salaires et autres indemnités de formation et de solidarité des joueurs étrangers ».

Mais, pour certains, notamment des medias étrangers, cette mesure va au-delà du cadre de la gestion budgétaire des clubs sportifs, car «l’Algérie, qui tire plus de 95 % de ses revenus de l’extérieur (vente des hydrocarbures, ndlr), est contrainte de prendre au plus vite des mesures d’austérité budgétaire pour réduire le coût énorme des transferts sociaux permettant au pouvoir d’acheter la paix sociale». Reste à savoir si ces mesures trouveront leur application sur le terrain ou si toute cette agitation ne sera, comme pour les décisions précédentes, en bout de course qu’un nouveau coup d’épée dans l’eau.  

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