Youcef Yousfi, ancien ministre de l’énergie, se retrouve à la tête de l’industrie, un secteur où les ministres changent vite et où les controverses sont fortes. Il ne fera pas du Bedda, c’est certain, mais fera-t-il du Bouchouareb ?
L’Industrie est l’un des secteurs qui ont le plus été touché par des changements ministériels ces cinq dernières années. Depuis 2012, le ministère de l’Industrie a changé 5 fois de locataires. Il a été dirigé successivement par Cherif Rahmani, Amara Benyounès, Abdessleman Bouchouareb et Mahdjoub Bedda pour finir, dans le tout frais Gouvernement Ouyahia, sous la houlette de l’ex-ministre de l’Energie, Youcef Yousfi.
Cette récurrence dans le changement des ministres traduit naturellement un manque de vision mais aussi, d’une certaine manière, la complexité et la sensibilité de ce secteur qui capte ces dernières années l’attention de tous les partenaires économiques de l’Algérie qui veulent, chacun à sa manière, tirer « profit » des projets d’industrialisation du pays que le Gouvernement s’attelle à mettre en place.
Sauver l’Industrie : une urgence
Avec la chute vertigineuse des prix du pétrole et l’effondrement des réserves de change, l’Algérie se trouve sur le bord d’une crise financière inquiétante. Relancer l’industrie nationale pour, d’une part, pallier aux importations massives qui vident les caisses de l’Etat et, d’autre part, augmenter l’offre exportable et chercher des débouchés commerciaux aux produits algériens à l’étranger, est devenue une urgence.
Youcef Yousfi n’a pas encore défini sa feuille de route et établi ses priorités mais c’est dans cette perspective qu’il va, semble-t-il, l’inscrire. Le nouveau ministre de l’industrie sera attendu sur le dossier controversé de l’automobile, pas loin d’être qualifié de supercherie par son prédécesseur, Bedda. Tout comme la gestion du foncier industriel que le ministre démis semblait vouloir remettre en question.
A priori, la manière sèche avec laquelle Tebboune et ses deux ministres ont été débarqués ne laisse aucun doute que cette démarche a été rejetée. De plus, Ahmed Ouyahia a décliné son programme il y a déjà plusieurs mois. Il avait souligné notamment que « le monde du pétrole a changé et avec le schiste, l’OPEP n’a quasiment plus aucune influence sur le marché des hydrocarbures ».
Appelant à « rompre avec le populisme », il avait préconisé de privatiser les entreprises publiques « dont la situation financière se détériore en raison des problèmes liés au plan de charge et à la gestion ».Mais la question qui se pose est de savoir si les idées avancées par Ouyahia sont partagées par le Président Bouteflika ?
Entre Bedda et Bouchouareb
A sa nomination dans le Gouvernement Tebboune, Mahdjoub Bedda s’est mis dans la peau d’un «réformateur» et a fait des pieds et des mains pour vendre cette image. Pour y parvenir, il s’est inscrit en rupture totale avec Abdesslem Bouchouareb en remettant en cause ses principales décisions.
Dans le secteur automobile, il a dit que « les objectifs tracés n’ont pas été atteints » en accusant les constructeurs concernés de faire de « l’importation déguisée ». Il a même menacé de fermer les usines de montage automobile. Dans la gestion du foncier industriel, il a bloqué le projet de son prédécesseur.
«Nous avons bloqué le projet en attendant de revoir les choses. On va étudier le dossier, zone par zone. Voir où sont réellement les opportunités d’investissement et où l’on peut créer de la richesse et de l’emploi », a-t-il déclaré le 3 juillet dernier.
Selon des indiscrétions du Premier ministère, il s’agit de reprendre les politiques du puissant ministre de l’Industrie de Sellal et d’inscrire l’action de l’Exécutif dans la continuité car « le secteur a besoin de stabilité ».
Yousfi Yousfi n’est sans doute pas appelé pour faire du Bedda, mais pour en effacer. Va-t-il pour autant reprendre les politiques de Bouchouareb objet de vives controverses ?