Aujourd’hui, expliquent des experts en matière de sécurité en Afrique du Nord, des combattants aguerris de Daech, certains de retour de Syrie ou d’ailleurs, sont approchés par Aqmi pour continuer leur lutte, en quelque sorte sous une autre franchise.
La mort en Tunisie d’un proche du chef d’Al Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) est, aux yeux d’experts en matière de sécurité en Afrique du Nord, un signe de la réémergence d’Aqmi dans la région aux dépens du groupe Etat islamique (EI).
Bilel Kobi, un Algérien présenté comme le « bras droit » d’Abou Moussab Abdoul Wadoud, alias Abdelmalek Droukdel, le chef d’Aqmi, a été tué dans une embuscade près de la frontière algérienne, a-t-on appris le 20 janvier. Il effectuait, dit-on de source proches des services de sécurité tunisiens, une mission visant à réorganiser la branche tunisienne d’Aqmi, en la réunifiant.
« Al Qaïda veut profiter du récent recul de l’Etat islamique pour se réorganiser et se retructurer, en particulier en Algérie, en Libye et en Tunisie avec la désignation de nouveaux chefs sur le terrain », dit-on dans les milieux sécuritaires.
Bilel Kobi n’était apparemment pas le seul responsable d’Aqmi à avoir été dépêché d’Algérie en Tunisie. Lors de la même embuscade, un autre Algérien qui avait rejoint Al Qaïda en 2003, Hamza al Nimr, a aussi été tué, dit-on à Tunis.
Les défaites subies ces derniers mois par l’EI en Irak, en Syrie et aussi en Libye ont, par ricochet, remis Aqmi sur le devant de la scène au Maghreb d’où l’organisation avait peu à peu disparu après 2013 et son éclatement en plusieurs groupes.
Aujourd’hui, explique-t-on de mêmes sources, des combattants aguerris de Daech, certains de retour de Syrie ou d’ailleurs, sont approchés par Aqmi pour continuer leur lutte, en quelque sorte sous une autre franchise.
Des algériens aux commandes
En Tunisie même, la branche d’Aqmi, Okba Ibn Nafaa, basé dans les monts Semmama et Chaambi (centre ouest), est divisé en quatre groupes. Des Algériens pour la plupart sont aux commandes.
« Okba dispose de dizaines de combattants, chaque groupe compte au moins vingt terroristes », dit-on à Tunis. Ses cibles privilégiées sont la police et les forces armées.
Ce type d’attaque le différencie notoirement de Daech, qui a revendiqué en Tunisie par exemple la responsabilité de l’attentat commis sur une plage de Sousse en juin 2015 dans lequel 39 touristes étrangers ont trouvé la mort.
Face à ces menaces de nouvelle nature, les forces de sécurité tunisiennes ont entrepris de renforcer leur présence et les contrôles à la frontière algérienne.
A Alger, on note une recrudescence du nombre de combattants d’Aqmi cherchant à passer en Tunisie. Huit d’entre eux ont été tués récemment dans les Aurès, puis quelques jours plus tard le responsable de la communication de l’organisation.
« Aqmi est en recul en Algérie, il ne peut pas se restructurer ou se réorganiser ici », assure-t-on dans les milieux de la sécurité à Alger.
Une affirmation pas tout à fait partagée, de même source à Tunis, où l’on fait remarquer qu’un commandant régional d’Aqmi se trouve dans l’est de l’Algérie, avec pour mission de réorganiser Aqmi non seulement en Tunisie mais dans tout le Maghreb.