Les campagnes électorale se suivent et se ressemblent. « Nous n’allons pas vous donner de l’argent, nous allons juste vous aider à gagner de l’argent par vous-mêmes » a déclaré, dimanche 19 mars 2017, M.Abdelmalek Sellal, devant un parterre de jeunes entrepreneurs réunis à l’occasion des premières Assises nationales sur la microentreprise.
Plus de 1000 jeunes entrepreneurs venus des différentes régions du pays ont pris part à ces assises organisées par la Fédération nationale des jeunes entrepreneurs sous le haut patronage du président de la République, en présence du secrétaire général de l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA), Abdelmadjid Sidi Saïd, et des membres du Gouvernement.
L’Etat « continuera d’apporter son aide aux porteurs de projets et de renforcer les capacités des petites entreprises notamment celles activant dans les secteurs à haute valeur ajoutée ou ceux s’inscrivant dans la chaine de valeur mondiale à l’instar des technologies de l’information et de la communication, de l’industrie mécanique et l’agro-alimentaire », a indiqué M. Sellal dans son allocution à l’ouverture des assises placées sous le slogan de « Les petites entreprises, un outil de diversification et de développement de l’économie nationale ».
Il a précisé à ce propos, qu' »une orientation qualitative a été enregistrée vers les projets à caractère tertiaire et industriel après arrêt du financement des activités non productives », soulignant que le Président Bouteflika « n’a eu de cesse d’appeler les jeunes à œuvrer au développement et à la promotion de l’économie nationale ».
Last but not least, afin d’encourager ces jeunes entrepreneurs, le premier ministre a également annoncé un rééchelonnement du remboursement des crédits contractés par ces entreprises pour résoudre leurs problèmes en terme de liquidités
La micro entreprise entre l’économique et le social
A l’occasion de ces assises organisées à Ain Benian , Abdelmalek Sellal tente ainsi sans doute, ,à 45 jours des prochaines élections législatives, de donner un contenu « plus économique que social » à son discours sur la micro entreprise et de corriger l’impression laissée par des interventions plus anciennes .
On se souvient sans doute du petit vent de panique que les déclarations prêtées à M.Sellal pendant la dernière campagne présidentielle avaient fait souffler sur le petit monde de la micro entreprise. Des déclarations, largement reprises par les médias nationaux, qui invitaient en gros, dans le climat survolté des meetings de la campagne, les bénéficiaires des prêts Ansej à un remboursement « facultatif ». M.Sellal avait trouvé « normal » que certains bénéficiaires utilisent les prêts Ansej pour « financer les dépenses de leur mariage « .
Il avait même, toujours selon les médias nationaux, invité ses interlocuteurs à exhiber ses déclarations dans le cas où ces derniers seraient convoqués par un juge ! Inutile de dire que les gestionnaires de l’Ansej ainsi que les banquiers publics, qui sont également en première ligne dans le financement d’un dispositif qui mobilise au cours des dernières années des ressources financières considérables, n’ont apprécié que très modérément la sortie du directeur de campagne du président élu.
En fait, on est sans doute toujours face à un vrai décalage de perception entre des « politiques » qui conçoivent essentiellement, même s’ils s’en défendent officiellement, la micro entreprise , particulièrement dans sa version « de masse » la plus récente, comme une variante du « traitement social du chômage » et les gestionnaires de ces dispositifs gouvernementaux qui tentent, avec plus ou moins de succès, de leur donner une crédibilité économique .
Une réduction générale de la voilure
Au cours des dernières années, l’Etat n’a pas lésiné sur les moyens, surtout financiers, pour favoriser la création d’entreprises par les jeunes porteurs de projets. Il est incontestable en particulier que les dispositifs en faveur de la micro entreprise ont rencontré un succès important.
La « démocratisation » de l’accès aux crédits d’une agence comme l’Ansej est certainement l’un des aspects les plus frappants des évolutions à la fois économiques et sociales des dernières années. Rien que pour cette dernière, ce sont déjà, selon des chiffres communiqués en 2016, plus de 350 000 microentreprises et environ 900 000 emplois qui ont été créés depuis 1997.
Les déclarations très « volontaristes » du premier ministre devant les jeunes entrepreneurs réunis à Ain Benian ne peuvent cependant pas masquer les évolutions récentes imposées au dispositif en faveur de la micro entreprise par les pouvoirs publics. Elles participent clairement en réalité d’un processus de réduction générale de la voilure.
La première de ces évolutions concerne les effectifs des bénéficiaires. Après un pic de plus de 60 000 dossiers agréés en 2012, ce sont 41 000 micro entreprises Ansej qui ont été créées en 2014 et seulement un peu moins de 24 000 en 2015 selon les chiffres communiqués à la presse par DG de l’Agence .Aucun bilan n’est encore disponible pour 2016.
Une décision annoncée en octobre 2016 s’inscrit dans la même tendance. Elle concernait le gel des financements de l’Ansej pour une liste de 64 secteurs d’activité. Les responsables de l’agence avaient fait part à cette occasion de « nouvelles orientations concernant les activités à financer », affirmant que l’Ansej vise « la promotion des entreprises créatrices d’emplois et la réduction du chômage ».
Ces orientations visent à encourager la création de projets innovants comme dans le domaine des TIC et les start-up, avaient-ils indiqué confirmant ainsi les évolutions « qualitatives » du dispositif évoqué ce dimanche par M.Sellal .
Première tentative de traitement des impayés
Une autre évolution toute récente vise à s’attaquer spécifiquement aux problèmes de remboursement rencontrés par les bénéficiaires. En se gardant bien de révéler un chiffre sur la taille du problème auquel font face les pouvoirs publics, le ministre des Finance avait déjà annoncé en février dernier, ce que M Sellal a réitéré aujourd’hui, que les jeunes porteurs des projets en difficulté financière, relevant de l’ ANSEJ, pourront désormais bénéficier d’un rééchelonnement de leur dette bancaire.