Plusieurs compagnies maritimes (Mearsk, CMA-CGM, MSI…) et quelques transporteurs de gaz naturel liquéfié (GNL), dont British-Petrolium, ont décidé d’éviter la principale route commerciale est-ouest du monde, à la suite des attaques lancées par les rebelles Houthis du Yémen contre des navires commerciaux à l’extrémité méridionale de la mer Rouge et qui sont en lien ou se dirige vers Israël.
Les attaques de ces deux dernières semaines ont fait planer le spectre d’une nouvelle perturbation du commerce international et les répercussions seront très importantes sur les prix des produits finis, les matières premières et surtout les hydrocarbures. Ainsi, les attaques sur les navires ont rendu l’accès la mer Rouge risqué et périlleux, mais aussi couteux.
La mer Rouge est-elle importante pour le marché du GNL ?
Environ 12 % du trafic maritime mondial transite par le canal et 4 à 8 % des cargaisons mondiales de GNL y ont passé en 2023. Selon la société d’analyse Vortexa, 8,2 millions de barils par jour (bpj) de pétrole brut et de produits pétroliers ont traversé la mer Rouge de janvier à novembre.
Cette année, un total de 16,2 millions de tonnes métriques (MMt), soit 51 % des échanges de GNL, ont transité par le canal de Suez depuis l’est du bassin atlantique, tandis que 15,7 MMt ont emprunté le canal depuis l’ouest du bassin pacifique, selon S&P Global Commodity Insights.
Le canal de Suez est l’une des artères les plus importantes du commerce mondial du pétrole. Le trafic vers le nord – d’une valeur de 3,9 millions de bpj cette année – est dominé par les importations européennes, principalement de pétrole brut en provenance des producteurs du Moyen-Orient et également de distillats moyens en provenance de l’Inde et du Moyen-Orient, a déclaré Jay Maroo, responsable de l’intelligence et de l’analyse pour la région MENA chez Vortexa.
Le trafic vers le sud – 2,9 millions de bpj en 2023 à ce jour – comprend des flux de brut, principalement de la Russie vers des clients asiatiques, ainsi que des produits raffinés, du naphta et du mazout, a-t-il ajouté. Le Qatar, les États-Unis et la Russie sont les expéditeurs les plus actifs de GNL via Suez.
Le Qatar arrive en tête des expéditeurs actifs de cargaisons en provenance de l’Est vers l’Europe, mais ne fournit toutefois qu’environ 5 % des importations nettes de l’UE et du Royaume-Uni. « En réalité, le Qatar est le seul exportateur dans le sens est-ouest via le canal de Suez, a déclaré Robert Songer, analyste GNL à la société de renseignements ICIS.
Une autre route vers l’Europe passant par le cap de Bonne-Espérance pourrait augmenter de 145 % le nombre de jours de voyage du Qatar, soit 22 jours supplémentaires sur une base aller-retour.
Pour le GNL à destination de l’Asie, le Qatar arrive en tête, suivi par les États-Unis qui ont récemment utilisé le canal de Suez comme alternative au canal de Panama.
Les prix sont-ils affectés ?
Les prix au comptant du GNL en Asie (LNG-AS) se situent actuellement à 12,3 dollars par million d’unités thermiques britanniques (mmBtu) et sont restés dans cette fourchette depuis le début des attaques. Les stocks élevés en Europe et en Asie du Nord limitent la demande et devraient freiner la croissance des prix au comptant au cours de la période S1-2024.
Les prix du pétrole, quant à eux, se sont redressés ces derniers jours pour s’établir aux alentours de 79 dollars le baril mardi, mais restent inférieurs à leur moyenne du quatrième trimestre, qui est d’environ 83,30 dollars le baril.
Les prix ont chuté ces dernières semaines en raison des inquiétudes concernant la demande et des indications de plus en plus nombreuses selon lesquelles l’offre mondiale sera excédentaire jusqu’en 2024.
« La récente hausse des prix du pétrole est compréhensible, mais elle ne durera pas, à moins que l’offre de pétrole ne soit matériellement affectée », a déclaré Tamas Varga, du courtier en pétrole PVM. Cependant, les prix du fret pétrolier sont déjà affectés.
Selon Vortexa, les tarifs de réservation d’un Suezmax pour transporter du brut du Moyen-Orient vers l’Europe ont augmenté de 25 % en une semaine. Les primes d’assurance pour les risques de guerre sont passées de 2 000 à 10 000 dollars en raison des perturbations, a déclaré à Reuters une source maritime qui a refusé d’être nommée.