En 2016, la Tunisie a cherché à stimuler les investissements étrangers pour relancer l’économie du pays, qui stagne depuis une quinzaine d’années. De 2005 à 2015, le pays a perdu pas moins de 2.500 emplois par an en raison de la fermeture de 400 entreprises en moyenne chaque année.
D’après l’Agence tunisienne de promotion de l’industrie et de l’innovation (APII), les petites et moyennes entreprises (PME) sont les plus concernées par cette stagnation à cause de leur manque de compétitivité, de liquidités et d’accès aux marchés financiers, ce qui a un impact immédiat sur le tempérament des investisseurs étrangers, qui évitent les marchés à risque élevé.
Fin novembre dernier, la Tunisie a mobilisé 34 milliards de dinars (environ 14.5 milliards de dollars) à l’occasion de Tunisia 2020, une conférence internationale visant à promouvoir les investissements en Tunisie.
Cette enveloppe se compose de 15 milliards de dinars issus d’accords déjà signés tout au long de cet événement de deux jours et de 19 milliards de dinars prenant la forme de promesses d’investissements.
Les investisseurs étrangers installés en Tunisie ont appelé les dirigeants du pays à trouver des solutions rapides et efficaces à des défaillances inquiétantes, en particulier en ce qui concerne le développement du système bancaire.
Il sera également question de moderniser les infrastructures dédiées aux investissements étrangers, d’autant plus que les différentes zones industrielles sont relativement isolées, et de promouvoir l’exportation, dont la dégradation des coûts et de la compétitivité a des conséquences directes sur la perception des investisseurs étrangers à l’égard du pays.
« Le site le plus attractif de la région »
Partenaire majeur de grands constructeurs aéronautiques tels qu’Airbus, qui détient 25% de ses actions, la société française Corse Composites Aéronautiques (CCA) est installée en Tunisie depuis 2010. Elle emploie une centaine de personnes, dont 99% de Tunisiens.
CCA Tunisie produit notamment les trappes des trains d’atterrissage pour Airbus et Dassault Aviation Falcon et procède au carénage des réacteurs.
« Bien que nous soyons satisfaits à 90% en Tunisie en tant que PME qui se développe, les événements de 2011 ont semé quelque part certains doutes auprès des investisseurs étrangers, mais nous n’avons pas ralenti notre projet et nous avons affronté la situation avec intelligence face aux revendications et contestations sociales dans le pays », a indiqué à Xinhua Patrick de Lattre, directeur général de CCA Tunisie.
Selon lui, la Tunisie a connu entre 2011 et 2015 une « grande période de flottement » avec notamment des attentats terroristes « meurtriers et regrettables ». « Bon nombre d’entreprises françaises ont quitté la Tunisie pour des raisons liées en premier lieu à un état des lieux social agité et surtout indécis durant les cinq dernières années ».
Cependant, il a poursuivi qu’il gardait confiance en la Tunisie et les compétences des travailleurs tunisiens. « Les autorités nous ont accordé une série d’avantages, notamment le droit à la propriété foncière. Nous sommes libres de mener nos activités. »
De plus, « les investisseurs étrangers en Tunisie bénéficient d’autres sources de financement en coopération avec l’Union européenne, outre des plans de subvention pour améliorer les équipements et, par conséquent, la qualité du produit et la performance du développement industriel ».
L’aéronautique demeure l’un des secteurs d’avenir pour la Tunisie compte tenu des qualifications des Tunisiens dans ce secteur prometteur à forte valeur ajoutée. Toutefois, certains pays voisins ne cessent de concurrencer la Tunisie en la matière.
« Mise à part la lenteur administrative, dénominateur commun de tous les pays de la région, la Tunisie se démarque de ses principaux concurrents, dont le Maroc, par le fait que le gouvernement tunisien s’ingère moins qu’ailleurs dans les activités des entreprises étrangères », a indiqué le directeur de CCA Tunisie.
« La Tunisie reste le site d’affaires et d’investissements le plus attractif de la région compte tenu de sa proximité et du rapprochement culturel », a-t-il conclu.
Des obstacles aux investissements étrangers subsistent
Le groupe Iberchem, l’un des plus grands fabricants espagnols de fragrances destinées à la parfumerie fine, est présent en Tunisie depuis 1989.
« Nous avons doublé notre chiffre d’affaires en Tunisie, dépassant les 4,5 millions d’euros en 2015, grâce à une solide position sur le marché », a indiqué Benigno Calvo, directeur d’Iberchem Tunisie.
« Le rendement global de notre entreprise est influencé non seulement par la situation en Tunisie, mais aussi par la conjoncture générale dans nos deux autres marchés directs, à savoir l’Algérie et surtout la Libye », a-t-il expliqué dans un entretien accordé à Xinhua.
D’après lui, quelques problèmes structurels se posent dans le pays, en particulier la situation inquiétante du port de Radès, l’un des principaux ports commerciaux de la Tunisie, situé dans la banlieue de Tunis, « qui pourrait affecter nos plans de livraison et s’accompagne d’une certaine incertitude juridique et sociale, bien qu’elle s’améliore de plus en plus ».
Les coûts bancaires sont une autre difficulté pour les investisseurs étrangers qui exportent depuis la Tunisie, a indiqué M. Calvo, qui a souligné que les coûts et prestations bancaires étaient nettement plus élevés qu’en Europe.
Du côté des avantages fiscaux, les entreprises offshore installées en Tunisie bénéficient d’une gamme d’avantages préférentiels incitatifs.
« La contribution de l’Agence de promotion de l’industrie et de l’innovation est indispensable au succès des investissements étrangers en Tunisie, voire décisive », a déclaré le directeur d’Iberchem Tunisie.