Cinq mois après les élections législatives d’octobre 2016, le Maroc n’a toujours pas de gouvernement. Le chef du Parti Justice et Développement (PJD, islamiste), arrivé en tête, ne trouve pas les alliances politiques nécessaires pour former une coalition.
Le chef du gouvernement désigné Abdelilah Benkirane, ne semble pas pressé de former son gouvernement, après l’échec de ses discussions en janvier dernier avec le nouveau patron du Rassemblement National des Indépendants (RNI), le milliardaire Soussi et proche du Roi, Aziz Akhannouch.
Dans la rue, le blocage politique pour la constitution d’un gouvernement de coalition fait d’autant plus que les négociations entre Abdelilah Benkirane et les autres partis, dont le RNI, sont au point mort.
Les observateurs à Rabat estiment que les tractations politiques pour la formation d’un gouvernement de coalition sont bloquées du fait de la participation de plusieurs ministres et chef de file de l’opposition à la tournée du roi Mohamed VI dans six pays africains (Ghana, Zambie, Kenya, Mali, Côte d’Ivoire et Guinée), entamée jeudi à Accra. Aziz Akhannouchn, ministre de l’Agriculture du gouvernement sortant, chef du RNI, clé de la sortie de crise, fait partie de la délégation du Roi.
Le magazine »Telquel », proche du Palais royal, estime qu’il est »difficile de faire actuellement des prévisions politiques au Maroc. Alors qu’on pensait que la formation du gouvernement allait être annoncée ce week-end après que le chef du gouvernement, Abdelilah Benkirane, a accédé au vœu du patron du Rassemblement national des indépendants (RNI), Aziz Akhannouch, d’exclure l’Istiqlal des négociations, les choses se sont un peu plus compliquées. » Cela remonte au début janvier, et depuis, les choses en sont restées là.
Eviction sans effet de l’Istiqlal
Il devait y avoir une annonce début janvier sur le dénouement de la crise politique après la rencontre entre Benkirane et Akhannouch. Le chef du PJD et du gouvernement, qui tenait à faire participer l’Istiqlal, a été dès lors contraint de le lâcher après la sortie hasardeuse de son SG, Hamid Chabat, sur la Mauritanie. Il a ainsi fait une concession majeure au RNI qui conditionnait sa participation au futur gouvernement à l’éviction de l’Istiqlal.
Mais dans un communiqué daté u 8 janvier dernier, Benkirane a mis fin aux espoirs de la classe politique marocaine de voir la crise se dénouer. »J’ai soumis une offre à M. Akhannouch le mercredi 4 janvier afin de participer à mon gouvernement. Il m’a promis de me répondre deux jours après. Au lieu de cela, il a publié un communiqué avec deux autres partis politiques à qui je n’ai adressé aucune invitation », explique Benkirane.
Le chef du PJD disait en déduire « qu’il n’est pas en position de me répondre et qu’il n’y a plus rien à espérer de nos négociations qui prennent fin avec lui ainsi qu’avec M. Mohand Laenser, dirigeant du Mouvement populaire (MP, allié du RNI). »
Blocage complet
Deux jours auparavant, le chef de gouvernement avait annoncé que sa prochaine équipe serait formée de la majorité sortante (PJD, RNI, MP, PPS). Tout a été remis en cause quand le chef du RNI a voulu imposer ses deux »alliés », les socialistes de l’USFP et l’Union Constitutionnelle (UC). Benkirane ne voulait pas de ces deux partis dans son gouvernement.
Le chef du RNI les avait appelé à former une coalition sous sa houlette afin de peser sur les consultations avec le chef du PJD. Se sentant trahi, alors qu’il avait même consenti à évincer un de ses alliés (Istiqlal), le chef de gouvernement a suspendu les négociations pour la formation d’une majorité. La crise politique est là, bien présente.
Le Parti Authenticité et Modernité (PAM), arrivé second aux législatives d’octobre 2016 (102 voix) et qui avait refusé d’entrer dans un gouvernement dirigé par les islamistes, commente ainsi la situation actuelle : »des partis s’insultent et se jettent la pierre. Les institutions du pays sont bloquées à cause de l’absence d’une équipe aux commandes. Qui se préoccupe de l’intérêt du pays ? ». Une situation qui a obligé, par ailleurs, le gouvernement à faire fonctionner les institutions de l’Etat par décrets, dont l’application de la loi de Finances 2017.