La mort en détention de Mohamed Tamalt suffit en elle-même à noircir le bilan des libertés de la presse en Algérie. Il y’a eu aussi les affaires El Khabar et El Watan et les arrestations de bloggeurs. Le Maroc, lui, est rattrapé par son statut au Sahara Occidental
L’Algérie a poursuivi en 2017 sa chute dans le classement mondial de liberté de la Presse publié ce mercredi matin à Tunis par Reporters sans Frontière (RSF) pour la partie Afrique du Nord. Elle se classe au 134e rang, reculant de 5 places par rapport au classement de 2016.
L’Algérie passe ainsi pour la première fois derrière le Maroc classé 133e. L’Algérie a évolué dans le classement RSF entre la 119e place et la 125e place depuis le printemps arabe de 2011. Elle a entamé un dévissage vertigineux depuis deux ans abandonnant 15 rangs en deux ans.
Le décès, le 11 décembre dernier, du journaliste Mohamed Tamalt en détention des suites d’une grève de la faim a clôt dramatiquement une annus horribilis pour la liberté de la presse en Algérie.
Les deux principaux quotidiens du pays ont subi une attaque frontale du gouvernement qui a interdit le sauvetage d’El Khabar par sa cession au groupe Cevital et qui a empêché El Watan de rejoindre son nouveau siège social, source de diversification de ses revenus.
La stratégie de l’étouffement économique des titres qui échappent au contrôle du pouvoir politique s’est poursuivie durant cette année 2016 tandis que la réforme qui devait faire émerger un secteur de l’audiovisuel non étatique est gelée.
En 2016, la dégradation de l’Etat des libertés dans l’expression sur lnternet s’est accélérée avec notamment de nouvelles arrestations de bloggeurs et la poursuite de la détention du lanceur d’alerte Hassan Bouras.
Le Maroc rattrapé par son statut au Sahara Occidental
Si le Maroc dépasse l’Algérie pour la première fois dans ce classement RSF de la liberté de la presse, il n’évite pas pour autant un recul de son classement de la 131e à la 133e place.
Reporter Sans Frontière fait pour la première fois la distinction Maroc-Sahara Occidental dans son communiqué Afrique du Nord et évoque «les nombreuses exactions» dont sont «victimes les journalistes non professionnels au Sahara Occidental», une zone «impossible à couvrir» pour les médias étrangers.
Le communiqué cite d’ailleurs l’expulsion de cinq journalistes européens durant l’année 2016, signe d’une tension plus globale avec l’Union Européenne.
La liberté de la presse, grand acquis de la transition libyenne de 2011-2012 a été laminé par l’insécurité que connaît le métier dans ce pays (163e sur 180). « Les exactions contre les journalistes y demeurent impunis », plus de 50 d’entre eux se sont exilés depuis 2011.
La Tunisie (97e) demeure dans ce tableau le pays le plus avancé de l’Afrique du nord même si son modèle de liberté de la presse peine à se consolider à cause de conflits d’intérêts et de montée de l’autocensure des professionnels du fait d’une précarisation des modèles économiques des médias.