Le taux de mortalité par le Coronavirus en Algérie, près de 12%, est le plus élevé au monde, car il est calculé par rapport aux malades dépistés et déclarés. S’il y a un chiffre erroné dans ce rapport, c’est certainement le dénominateur, le nombre de cas déclaré. Habituellement ce taux de mortalité se situe entre 0,5% et 5%.
Il y a deux façons de compter le nombre de personnes infectées par le Covid19 : d’un côté les cas officiels et donc déclarés, pour l’Algérie on en est à 92, et de l’autre, les cas réels, les personnes contaminées et donc contagieuses mais ne présentant parfois aucun symptôme ou des symptômes qui peuvent s’apparenter à un simple coup de froid, surtout les trois premiers jours.
Prenons l’exemple de la Chine, pays du premier cas de Coronavirus. Entre le 08 décembre et le 22 janvier, 444 cas sont officiellement recensés. Dans les semaines qui suivent, des Chinois affluent en masse vers les hôpitaux. Les tests deviennent massifs et permettent de diagnostiquer des centaines de cas positifs.
Les équipes médicales ont en parallèle mené des interrogatoires sur les malades diagnostiqués positifs pour savoir à quelle date précise remonte l’apparition des premiers symptômes. Les résultats leur ont permis d’évaluer le nombre réel des malades pendant la même période.
Plus de 12000 cas étaient malades pendant cette période, soit 27 fois plus que ceux déclarés officiellement. Voilà ce qui est considéré comme l’avance qu’a le virus sur le recensement officiel du nombre de cas. Et ce n’est pas spécifique à la Chine. Prenons l’exemple de la France, pays plus proche de nous et d’où est parvenu l’essentiel de la propagation en Algérie du Coronavirus, les deux malades de Blida sont considérés comme les malades zéro. En France, comme en Algérie, il n’y a aucun dépistage systématique de la population. Ce qui rend le nombre de cas réels nécessairement supérieur au nombre déclaré officiellement. Ce n’est pas de l’alarmisme, c’est la réalité qu’on doit accepter.
Selon les chiffres communiqués par les autorités sanitaires algériennes, l’Institut Pasteur a effectué 1200 tests en quatre semaines, soit 40 par jour. Ce chiffre paraît dérisoire, comparé aux 2500 tests par jour effectués en Corée du Sud. Toutes les personnes avec lesquelles on est en contact, avec ou sans symptômes, sont potentiellement porteuses du virus. Un autre indicateur en Algérie est celui du nombre de décès des malades infectés par le Coronavirus, onze au vendredi 20 mars. Ce qui donne le taux de mortalité, près de 12%, le plus élevé au monde, car il est calculé par rapport aux malades dépistés et déclarés. S’il y a un chiffre erroné dans ce rapport, c’est certainement le dénominateur, le nombre de cas déclaré.
Habituellement, ce taux de mortalité se situe entre 0,5% et 5%. L’écart s’explique par la massification du dépistage comme en Corée du Sud et en Allemagne, et par le retard dans l’imposition du confinement comme en Italie et en Iran.
La massification du dépistage et surtout le confinement, seules armes dans cette bataille
La seule façon d’intensifier le dépistage est l’adoption du test rapide qui est effectué en quelques minutes et donne des résultats dans les trois heures qui suivent le prélèvement, contrairement au dépistage conventionnel qui exige 24h. Beaucoup de pays l’ont adopté. La Corée du Sud, et l’Allemagne récemment, ont même adopté le drive test (Test en voiture). Les résultats sont envoyés aux personnes grâce aux formulaires renseignés avant le test. Les personnes dépistées positives sont prises en charge par les équipes médicales pour confirmation des résultats.
Les autorités sanitaires algériennes peuvent opter pour la stratégie du dépistage massif qui dot être disponible dans toutes les grandes structures hospitalières. Selon un importateur de réactifs en Algérie, ce test peut revenir à un prix très raisonnable, bien loin de celui du test conventionnel.
Mais il faut savoir que le virus ne se déplace pas tout seul. Les cas non dépistés sont dans la nature. A chaque sortie de chez soi, le citoyen s’expose à une infection par le virus. Une personne contaminée peut contaminer deux à trois autres personnes au minimum, soit deux fois plus qu’une grippe classique. 20% des cas positifs auront besoin d’une hospitalisation, 5% d’une place en soins intensifs et 2,5% auront besoin d’une aide très intensive.
L’Algérie ne disposerait au mieux que de 400 places en unités de réanimation, sans compter le personnel spécialisé pour ces soins intensifs. Si le nombre de cas réels dépasse les 8000 cas, alors le personnel hospitalier sera dans la même situation que l’Italie : faire des choix entre les personnes à prendre en charge. Donc il ne faut pas compter sur le système de santé pour prendre en charge un nombre important de malades dans un état grave, malgré le ton rassurant des autorités du pays. Compte tenu de la vitesse de propagation du virus, la seule arme qui demeure entre les mains de la population est la limitation drastique des interactions sociales et le respect des mesures barrières que tout citoyen doit appliquer, celles relatives à la distanciation et à l’hygiène. C’est le seul salut. Le confinement total, particulièrement en Algérie, le citoyen doit se l’imposer. Rester chez soi, c’est impératif. Aucun acte ne sera aussi collectif et solidaire. Tout retard dans la prise de cette résolution se paiera malheureusement en vies humaines.
Abdennour Haouati