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DIRECT- Le procès de l’affaire Khalifa reprend avec l’audition d’Abdelmoumene Khalifa

Par Yazid Ferhat
mai 6, 2015
DIRECT- Le procès de l’affaire Khalifa reprend avec l’audition d’Abdelmoumene Khalifa

Après le rejet de la demande de report formulée par l’avocat de Abdelmoumene Khalifa et la lecture de l’arrêt de renvoi qui a pris toute une journée, le procès de l’affaire Khalifa a repris ce mercredi au Tribunal de Blida avec l’audition de l’accusé principal. La stratégie de défense de l’ex-golden boy algérien est de tout nier en bloc, selon ses avocats.

 

 

9h05 – Abdelmoumene Khalifa comparait devant le juge qui l’interroge sur son identité, ses études, son activité avant de constituer l’empire « Khalifa ». Né en 1966 à Béjaia, Abdelmoumene Rafik Khalifa a fait des études en pharmacie à la Fac centrale avant de travailler dans la pharmacie qu’il a héritée de son père.

Abdelmoumene Khalifa répond au premier chef d’inculpation de fraude dans le contrat de crédit pour l’achat d’une villa sise à Paradou Hydra, un R+1 et le magasin de Cheraga, un R+2, auprès de l’agence bancaire BDL de Staouéli. D’un ton rassuré et ferme, il montre que dans l’acte il est écrit que le crédit a été fait pour une entreprise de distribution et non pas pour son entreprise Sarl KRG Pharma.

Son avocat Me Lezzar apporte les documents.  « Les deux actes sont falsifiés », affirme abdelmoumene Khalifa en défiant le juge de trouver sa signature sur les deux contrats. « J’avais juste des facilités de caisse auprès de la BDL et non pas de crédits à la BDL de Staouéli. Et d’ajouter sur un ton catégorique : « Il n’y a rien qui me lie à ces contrats ».

Le juge le ramène toujours à ces contrats citant la déclaration de l’ami d’enfance de l’accusé, Idir Isir qui aurait affirmé que ces deux contrats établis chez Me Rehal, le notaire de la famille Khalifa. Et l’accusé nie tout. « Mes deux sociétés sises à Cheraga étaient gérées par ma femme (Mme Amirouchène. J’étais le directeur technique à ce moment là ; début de l’année 1990 pour la production de médicaments et début de l’année 1991 pour la commercialisation », affirme t il.

Selon ses dires, il aurait contracté un crédit de 10 milliards de DA pour ses deux sociétés. Et de faire un cours magistral pour expliquer les nuances transactions bancaires. « J’ai peut-être besoin d’un tableau », a-t-il plaisanté.

Sur la création de la première banque privée en Algérie. M. Khalifa a affirmé que c’était pour accompagner la volonté du gouvernement de combler le besoin de bancarisation du pays. « J’ai ouvert ma banque quand l’Etat a décidé l’ouverture de nouvelles banque », a-t-il dit. Selon lui, l’idée de la création d’une banque remonte à 1995. « J’ai présenté ma demande en 1996. J’étais beaucoup reçu par les services d’études de la Banque d’Algérie et j’ai fait une formation de gestion bancaire en France. Je visais à la base le financement des pharmacie », a-t-il détaillé, ajoutant qu’il était le premier actionnaire d’Al Khalifa Bank avec 67 % des parts. Les autres actionnaires sont les membres de sa famille.

Le juge saisit l’occasion pour lui parler de sa relation avec le gouverneur de la Banque d’Algérie de l’époque Abderrahmane Keramane. Est il un parent à vous, lui demande t il.

On est Chaouis et lui est Turc

« On m’a dit que c’est parent à notre famille, j’ai donc cherché et trouvé que c’était un cousin éloigné d’un cousin éloigné de ma mère. On ne l’a jamais vu dans les fêtes de l’Aid et mariage ». Et de s’interroger : « On est Chaouis et lui est Turc, il s’appelle Keramane. Comment voulez vous qu’il fasse partie de notre famille ». Cette boutade n’a pas manqué de faire rire la salle.

Le juge l’interroge sur la nomination de Kaci Mohamed à la Direction générale. « Je l’ai nommé parce qu’il était âgé et expérimenté », répond l’accusé. Sur son remplacement à la tête de la banque sans passer par le changement des statuts, l’accusé a été évasif, se justifiant par les propos rassurants qu’aurait tenus M. Kaci selon lesquels « il n’y a pas de mesures disciplinaires contre cela ».

10h 50– Séance suspendue pour 15 minutes.

11h 20- Reprise de l’audition qui tourne autour de la perquisition demandée par la Banque d’Algérie en 1999 suite à la démission de Kaci Mohamed et son remplacement par Abdelmoumene Khalifa sans autorisation préalable de la banque centrale. Al Khalifa Bank a connu 10 perquisitions depuis 1999 jusqu’à sa fermeture.

 Le juge l’interroge par la suite sur la constitution des agences, l’activité de la banque et le mouvement de l’argent qui y était déposés par notamment les institutions de l’Etat. Khalifa se perd à chaque fois dans les détails sans répondre nécessairement aux questions.

Le Juge Antar Menouar revient alors sur la création de la compagnie aérienne privée Khalifa Airways. Abdelmoumene Khalifa répond : «  J’ai créé Khalifa Airways avec 150 millions de DA 6 mois après la création d’Al Khalifa Bank. C’est le même principe : la banque fait circuler de l’argent et les avions les êtres humains ». En tout dix entreprises ont été créées, selon lui. Dans des domaines aussi variés que l’informatique, le catering, le graphisme, la sécurité etc.

 « Je voulais construire un groupe. Les groupes sont eux qui font l’économie des pays développés. J’ai créé Al Khalifa TV pour donner une bonne image de l’Algérie qui a été ternie par les années sombres du terrorisme  », a-t-il répondu au juge qui l’a interrogé sur cette multitude de domaines d’activité couverts par  son entreprise. Avant de le relancer les stations de dessalement de l’eau de mer.

«  En 2001, j’ai acheté 5 stations de la Grèce pour les offrir à l’Algérie qui connaissait à l’époque une sécheresse terrible. Les deux premières payées à 3.5 millions de dollars », a affirmé  Khalifa. Le juge l’interrompt : «  Ces stations étaient défectueuses selon l’expertise de spécialistes philippins… »

Selon Khalifa, les Philippins n’ont aucune expertise. « L’entreprise saoudienne Huta City qui nous a fourni les stations est très sérieuse », dit-il. Et au juge de lui rappeler que cette société dément avoir fourni des factures pro formats et que cet argent a été détourné en France pour payer la villa de Cannes. « Vous avez quitté l’Algérie juste après vers les USA pour passer 24h puis vers l’Angleterre jusqu’à votre  extradition…pourquoi avoir décidé de partir en Angleterre et pas la France ? »

« Je n’aime pas les Français»

« J’ai choisi de ne pas partir en France parce que je n’aime pas les Français puisqu’ils ne nous aiment pas. Celui que vous avez expulsé avec les armes ne pourra jamais vous aimer », a-t-il répondu.

13h00-  Séance suspendue

14h10– La séance reprend sur les investissements de Khalifa en France. « Khalifa Airways était une société de droit français, c’est pour cela que j’ai investi dans l’immobilier en France. C’était un investissement économique pour la compagnie aérienne », dit l’accusé.

Le juge revient sur les raisons qui l’ont poussé à quitter l’Algérie en 2003. « Parce qu’on m’a retiré l’agrément de la banque Al Khalifa », a-t-il répliqué. 

« Entre 1999 et 2003 vous n’avez pas retiré des fonds des banques ? Les directeur des agences d’El Harrach, Oran affirment qu’Abdelmoumene leur demandait de lui envoyer de l’argent via des individus.. ». Le juge lit les déclarations du directeur de la caisse principale, affirmant que Abdelmoumene Khalifa lui demandait d’envoyer des sommes allant de 5 millions de centimes à 10 millions d’euros. Le juge cite également une réunion entre Chaachoue Abdelhafidh et Nekkach Hammou où Khalifa leur aurait demandé de combler un trou financier.

Mir Ahemd qui était l’inspecteur de la banque Khalifa a affirmé que son chef (Khalifa) lui a demandé de rapporter  500 millions DA et qu’il a reçu l’ordre de ne pas inspecter les caisses. Selon le PV du juge d’instruction, tous les collaborateurs de Khalifa disent qu’il leur demandait de retirer l’argent de la caisse principale.

L’accusé nie ces accusations et les traite tous de menteurs.

Le Juge revient à la charge et l’interroge sur le trou financier découvert en février 2013 à l’agence de l’abattoir de Hussein Dey estimé à 5 milliards de centimes. Le directeur de cette agence, Hocine Soualmi affirmait au juge d’instruction avoir reçu les ordres de retrait d’argent de son agence de la part de Khalifa. Ce dernier répond que « Soualmi  n’est pas un homme crédible ».

Le juge exhibe alors une lettre retrouvée par l’expert Foufa Hamid en septembre 2005, attestant des demandes de transfert d’argent formulée par Khalifa. Il présente également les déclarations faite par le directeur de l’agence d’El Harrach, Aziz Djamel, selon les quelles il y aurait un trou financier de 46 milliards DA, résultant des demandes de retrait d’argent formulées par l’accusé contre de simples bons.

Khalifa nie toujours.

Alors le juge lui demande pourquoi il a quitté le pays, « vous auriez pu rester pour y faire face ? ».

« Je savais dès septembre 2002 que la banque allait être fermée. Il y avait deux options, soit l’effusion du sang, soit partir et tout laisser. J’ai choisi de partir. Je suis parti en 2003 », a répondu l’accusé.

Sur son collaborateur Guelmi intercepté en 2003 en fuite avec 500.000 euros juste après son départ, Khalifa, affirme que c’est « un homme noble et intègre ». « Il se trouvait en affaire avec des Français et cela a été très mal interprété. C’est une victime »,  a-t-il observé.

Avant la suspension de la séance à 15h50 pour 10 minutes, Khalifa affirme que l’actuel ministre de l’Industrie, Abdesselam Bouchouareb avait demandé un prêt auprès de sa banque. Un prêt qu’il n’a pas remboursé, selon lui, et la garantie qui lui a été donnée lui a été remboursée en bien immobilier.

Le Juge : «  saviez vous que Meziane Ighil et Belloumi achetaient des vêtements de sport pour les revendre aux équipes des nationale 1 et 2 ? »

Khalifa : « C’est l’agence de l’agence de Blida qui finançait ces activités pour  1.5 milliards de DA. Meziane Ighil est un homme intègre et son activité était légale. Je l’ai connu au stade du Nasser Hussein Dey (Nahd), mon club préféré ».

Le juge : « Alors pourquoi avoir sponsorisé l’Olympique Marseille puisque vous n’aimez pas les Français ? »

« Nous avons 5 millions d’Algériens en France, il faudrait bien nous rapprocher d’eux, puisque la plupart sont des fan de l’OM. On était en concurrence avec Ericsson pour le sponsoring et on a eu le contrat grâce au vote des supporters. C’était aussi pour faire de la pub à Khalifa Airways, car nous avons beaucoup de vols Alger-villes françaises et surtout Oran- Marseille comme la chanson de Cheb Khaled ».

Khalifa multiplie blagues et calembours, les expressions et les tons moqueurs. L’assistance et les magistrats réagissent. Les rires ponctuent cette séance éprouvante.

Pour le Nom d’Al Khalifa qu’il a donné à sa banque, l’accusé répondu que c’est en référence à son oncle, le fameux  poète et écrivain Mohamed El Aid Al Khalifa. 

Revenant aux choses sérieuses, Khalifa a affirmé que le chiffre d’affaires du groupe avant sa déconfiture était de 1.2 milliards de dollars. Et Khalifa Airways était la compagnie la plus rentable du groupe. Il assure par ailleurs que lorsqu’il  s’était exilé en Angleterre, il n’avait  ni fonds ni patrimoine immobilier et qu’il était aidé par des connaissances.

 Fin de séance, l’audition reprendra demain

 

 

 

 

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