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Donald Trump et le Maghreb : pas de bouleversement en vue mais pragmatisme et réalisme

Par Yacine Temlali
novembre 10, 2016
Donald Trump et le Maghreb : pas de bouleversement en vue mais pragmatisme et réalisme

Même s’il voulait changer rapidement l’ordre des choses, le président américain serait contraint de traiter avec les autres contre-pouvoirs, notamment le Sénat, et de tenir compte de la lourdeur de l’administration. Celle-ci, aussi tatillonne que jalouse de ses prérogatives, n’est pas prête à lâcher, particulièrement quand il s’agit du département d’Etat, du Pentagone et de la CIA, principaux pôles concernés par les relations avec le Maghreb.

 

 

L’élection de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis a brouillé les cartes des relations avec le Maghreb, plongeant tous les partenaires dans l’expectative. Ses déclarations antérieures, d’une rare violence, donnent a priori le ton général d’une relation tumultueuse, mais les impératifs de gestion et la rigidité des règles diplomatiques et militaires devraient rapidement ramener le chef de l’exécutif américain à une attitude plus orthodoxe.

En ce sens, ceux qui s’attendent à un bouleversement des relations des Etats-Unis avec le Maghreb risquent d’être déçus. Même s’il voulait changer rapidement l’ordre des choses, le président américain serait contraint de traiter avec les autres contre-pouvoirs, notamment le Sénat, et de tenir compte de la lourdeur de l’administration. Celle-ci, aussi tatillonne que jalouse de ses prérogatives, n’est pas prête à lâcher, particulièrement quand il s’agit du département d’Etat, du Pentagone et de la CIA, principaux pôles concernés par les relations avec le Maghreb.

En outre, et contrairement à ce qui est véhiculé, Donald Trump ne semble pas désireux de tout bouleverser. Ses discours montrent une obsession : comment telle ou telle attitude va se répercuter sur la sécurité des Etats-Unis? Il répond au cas par cas, de manière très pragmatique.

 

« Le monde serait meilleur avec Kadhafi»

 

Dans cette logique, il n’hésite pas à adopter des attitudes qui choquent ses interlocuteurs mais qui relèvent, pour lui, du simple bon sens. Ses discours de campagne les plus élaborés définissent une ligne de conduite à l’opposé de celle de l’establishment : il regrette les interventions américaines antérieures en Syrie, en Irak et en Libye, notant qu’elles ont donné naissance à des mouvements armés « encore plus condamnables » que les régimes en place. « Qu’avons-nous obtenu en attaquant (le président syrien Bachar ) El-Assad ? », se demande-t-il. « Plus personne ne reconnaît l’Irak ou la Libye. Tout est ravagé, il n’y pas plus d’Etat, plus de contrôle », dit-il. A une question précise : « le monde serait-il meilleur avec Saddam Hussein et Kadhafi ? », il répond, sans hésiter : « à 100% ».

Il est toutefois difficile d’établir une certitude de ce que Donald Trump veut faire au Maghreb, tant ses propos sont contradictoires. Avec un penchant affirmé pour l’isolationnisme, il devrait a priori alléger la présence américaine dans la région, ce qui offrirait plus de marge à chacun des pays de la région, ou plus de présence aux partenaires historiques de la région, France et Italie.

 

Dossiers épineux

 

Sur le dossier libyen, la diplomatie américaine a fini par adopter une position prudente, laissant le temps à l’élaboration et à la concrétisation d’une solution politique. C’est un montage très complexe, qui demandera du temps. Il est difficile de d’envisager que Donald Trump, malgré les postures adoptées jusque-là, rejette tout cela d’un revers de la main, pour imposer une nouvelle démarche agressive. Il a d’ailleurs beaucoup insisté sur le coût de l’affaire libyenne, rappelant que les Etats-Unis y ont perdu un ambassadeur, tué à Benghazi sous Hilary Clinton.

Sur le Sahara Occidental également, une démarche laborieuse, lancée depuis de longues années, a permis de ramener le conflit à une intensité très basse grâce au concours des Etats-Unis. Très impliqués dans le suivi de cette option, ils ont délégué un de leurs diplomates, Christopher Ross, comme envoyé spécial des Nations-Unies. Donald Trump peut-il accentuer la pression pour débloquer la situation? Le Maroc, qui misait beaucoup sur Hilary Clinton, une « amie », redoute cette hypothèse, alors que l’Algérie, plus à l’aise avec les Républicains, espère une évolution dans cette direction. Le président Bouteflika a d’ailleurs rapidement adressé un message de félicitations particulièrement élogieux à Donald Trump aussitôt l’annonce de son élection.

 

Impératifs sécuritaires

 

Au-delà de ces dossiers précis, les Etats-Unis ont, depuis deux décennies, développé une nouvelle vision de la région. Ils veulent traiter avec le Maghreb dans son ensemble, non avec chacun des pays en particulier. Ils font pression pour que les frontières s’estompent afin de favoriser ainsi une coopération régionale plus intense, au moins dans le domaine sécuritaire.

Malgré ses discours isolationnistes, Donald Trump ne pourra faire baisser la pression, en raison de la situation au Sahel et en Libye. Dans la ligne droite de son discours de campagne, une nouvelle option pourrait émerger : imposer une plus grande présence européenne dans le financement et l’organisation de ce dispositif de sécurité. Concrètement, cela déboucherait sur une plus grande contribution française, et une participation allemande plus conséquente au financement d’opérations éventuelles. Mais ce sont des dispositifs lents et lourds à mettre en place.

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