En 2012, le tunisien Moncef Marzouki a été l’homme du Maghreb. En 2013, il n’y a pas eu « d’homme maghrébin ». Le processus maghrébin a même connu un degré supplémentaire de glaciation dans les relations entre l’Algérie et le Maroc. Rien n’indique que 2014 sera l’année du dégel.
Moncef Marzouki a été l’homme maghrébin de 2012. Porté par l’élan du changement en Tunisie, il a tenté, par conviction autant que par nécessité, de bousculer les lignes et de faire sortir le processus maghrébin de son long sommeil. L’homme a frappé les esprits en organisant une conférence, au palais de Carthage, sous un thème éloquent : «Les cinq libertés au Maghreb arabe: une vision fusionnelle». Ces libertés, qu’il voulait accorder sans attendre aux maghrébins sonnaient comme une promesse de révolution : libertés de circulation, de résidence, de travail, d’investissement et du vote aux élections municipales. Accueil mitigé dans les autres pays.
Personne n’ose contredire publiquement une «envie » de Maghreb très partagée au sein des opinions. Mais rapidement, Alger fait savoir que le passeport continuera à être exigé aux frontières. Moncef Marzouki prendra son bâton de pèlerin maghrébin au cours de l’année et croit avoir obtenu un accord pour un sommet de l’UMA à Tabarka en octobre 2012… Puis la « réalité » a repris le dessus. Abdelilah Benkirane, premier ministre marocain fait savoir qu’il ne peut y avoir un sommet avant la réouverture des frontières avec l’Algérie. Alger rétorque que la question est « hors sujet » et n’a pas de lien avec le sommet. Le rideau est tombé.
La Banque maghrébine, illustration caricaturale
En 2012, Marzouki a créé une effervescence, agité des idées. En 2013, les difficultés politiques en Tunisie, le contraignent à un discours maghrébin de profil bas. Les urgences étaient tunisiennes, et elles le seront encore en 2014, avec une transition à finir. Du coup, plus aucune personnalité dirigeante n’a maintenu la flamme de l’idée maghrébine. 2013 s’est même terminée avec un climat des plus détestables entre l’Algérie et le Maroc. Un pic est atteint le 1er novembre 2013 avec et l’arrachage de l’emblème national algérien.
Même ceux qui, en Algérie, défendent l’ouverture immédiate et sans condition des frontières, ont été heurtés. La situation marque en effet une régression par rapport aux efforts dits « sectoriels » de développement des relations bilatérales marquées par des échanges de visites ministérielles. 2014 ne démarre pas sous de bons auspices pour les relations algéro-marocaines et, par conséquent, pour le projet maghrébin. Le très modeste projet de Banque maghrébine de l’investissement et du commerce extérieur (BMICE) en gestation depuis 1991 en est une illustration caricaturale. Le 29 mai 2013, les ministres maghrébins des finances, réunis à Marrakech, l’ont annoncé avant la fin 2013. En ce 1er janvier 2014, la BMICE ne fait pas partie de l’actualité maghrébine. Le Maghreb non plus. Il est toujours dans l’année zéro.