Elles sont une vingtaine à agir dans la légalité. Elles souffrent de leur peu de visibilité et de la forte concurrence de l’Agence nationale de l’emploi.
Les agences de placement n’arrivent pas encore à se faire une place dans le monde de l’emploi en Algérie. Malgré une forte demande et une volonté du gouvernement d’en faire des acteurs de premier plan dans la recherche d’emploi, ces organismes venus concurrencer l’ANEM (Agence nationale de l’emploi) ne réalisent que de timides résultats. Ils font face aussi à une « forte suspicion », selon un inspecteur du travail.
Les encouragements de l’administration n’ont pas suffi pour donner une véritable envergure à ces agences, au nombre d’une vingtaine agréées, travaillant dans la légalité. Elles ont réussi à placer un peu plus de 8.000 personnes, soit moins de 2% de la demande, dans un marché du travail qui dépasse le demi-million de nouveaux arrivés par an. Ce nombre très modeste de travailleurs « placés » est aussi à rapporter à celui des demandeurs d’emploi, 9,8% de la population active selon les chiffres les plus récents de l’Office National des Statistiques (ONS), soit un peu plus de 1,25 millions de demandeurs.
Les agences de placement souffrent de trois handicaps. Le premier est leur manque de notoriété. Les jeunes demandeurs d’emploi ne les connaissent pas. Beaucoup ne soupçonnent même pas leur existence, dans un pays où l’Etat est traditionnellement perçu comme le seul en mesure de fournir ce type de services. De plus, l’ANEM fournit des documents indispensables pour certains dossiers, alors que les documents fournis par les agences privées sont parfois refusés.
L’aide publique paraît plus sûre
L’Etat a également lancé une série de formules d’aide à la création d’emplois et d’entreprises, qui attirent l’essentiel des demandeurs. L’ANSEJ (l’Agence de soutien à l’emploi des jeunes), la CNAC (la Caisse nationale d’assurance-chômage, dont les missions comprennent la « création d’activités »), et d’autres structures similaires sont perçues comme plus sûres. Toutes sont gérées par des organismes publics, qui font plus confiance à l’ANEM qu’aux agences privées.
Celles-ci en sont encore aux premiers balbutiements. Leur implantation est souvent locale, ou régionale. Elles ne font pas le poids face aux 263 bureaux de l’ANEM, installés dans tout le pays. Elles traitent le plus souvent avec des entreprises de sécurité ou de gardiennage, auxquelles elles fournissent un personnel peu formé, de faible qualification, nécessitant essentiellement un travail de logistique. Les installations des compagnies pétrolières dans le sud constituent des débouchés importants pour ces agences, qui agissent plus en réseau, occupant des niches grâce à des relations personnelles de leurs patrons, que comme de vraies entreprises disposant d’une stratégie nationale.
Dérives
Les pratiques de ces agences avaient mené à de graves dérives, qui ont provoqué des troubles dans plusieurs villes du pays. Des habitants du Sud avaient notamment organisé des manifestations pour dénoncer le recrutement de personnel venu du Nord pour des postes n’exigeant qu’une qualification sommaire, alors que les habitants du Sud subissaient le chômage. La situation avait dérapé pour donner naissance à des associations régionales, voire régionalistes. Le premier ministre Abdelmalek Sellal avait alors décidé de soumettre tout recrutement dans une entreprise pétrolière installée dans le Sud à un passage obligatoire par l’ANEM. L’autorisation de recruter un personnel en dehors de la wilaya n’était accordée que si aucun postulant ne se manifestait après un délai légal. La mesure avait été assouplie ensuite, officiellement pour ne pas paralyser les entreprises : celles-ci étaient autorisées à recruter, avec l’obligation d’en informer l’ANEM.
Ces hésitations ont contraint les agences privées à s’orienter vers des spécialités très pointues, et de se contenter de niches délaisses par l’ANEM. Elles s’occupent ainsi du recrutement pour certaines entreprises qui ont de la peine à trouver une main d’œuvre spécifique, en raison de l’éloignement ou de l’isolement des sites de travail.