Les violations des droits des journalistes augmentent en Tunisie à mesure que les autorités tentent de reprendre le contrôle des médias, a déploré mardi le syndicat des journalistes tunisiens qui dit s’inquiéter pour la liberté de la presse.
Les médias tunisiens ont bénéficié d’une liberté sans précédent depuis la chute de l’autocrate Zine Ben Ali mais cet acquis du soulèvement populaire de 2011 est aujourd’hui menacé par la tentation du pouvoir en place d’imposer les mêmes types de contrôle que jadis, disent les défenseurs des droits civiques.
L’état d’urgence imposé après les attentats du musée du Bardo et de Sousse en 2015 permet notamment aux autorités de restreindre certains droits au nom de la sécurité nationale.
« Des responsables gouvernementaux cherchent à contrôler les médias et exercent une pression en donnant des instructions par téléphone. Les pratiques de l’ancien régime ont repris », a dénoncé mardi le président du Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT), Néji Bghouri.
Des journalistes de télévision, de radio et de l’agence de presse nationale Tap se sont plaints auprès du syndicat d’ingérences dans leur travail, a-t-il précisé lors d’une conférence de presse.
« La police a renoué avec les vieilles pratiques »
Lundi, l’opposant Ridha Bel Hadj a accusé des responsables de la présidence d’avoir essayé d’empêcher la diffusion par la chaîne privée Hannibal TV d’une interview dans laquelle il critiquait le chef de l’Etat, Béji Caïd Essebsi.
Le porte-parole de la présidence, Reda Bougezi, a nié toute intervention de l’Etat et a invité les journalistes qui seraient victimes de telles pratiques à en dénoncer les auteurs.
Selon Kahoula Chabeh, un membre du SNJT, 41 journalistes tunisiens et étrangers ont été passés à tabac par la police, harcelés, insultés ou maltraités rien que le mois dernier. « La police a renoué avec ses vieilles pratiques (…) sous le prétexte de l’état d’urgence et de la lutte contre l’extrémisme religieux », constate Néji Bghouri.
En mars, Reporters sans frontières (RSF) a dénoncé dans une lettre ouverte au Premier ministre tunisien, Youssef Chahed, la dégradation de la liberté de la presse dans son pays ces derniers mois, dont le jugement de journalistes devant des tribunaux militaires et les restrictions imposées aux déplacements de correspondants étrangers.