Tétanisée par un Donald Trump autoritaire, bluffeur et arrogant, l’Amérique se réveille. A l’opposition de l’opinion publique, se greffe désormais ces contre-pouvoirs, très complexes, du système politique Américain.
Sonnée par l’effet Trump, l’Amérique se réveille. Une semaine après l’investiture du nouveau président américain, un autre pays, plus ouvert, plus accueillant, plus dans l’esprit du fameux « rêve américain », plus soucieux aussi des intérêts économiques américains traditionnels, se fait entendre.
Le président américain a engagé son mandat au pas de charge : en une semaine de grâce, il a signé des décrets pour annuler l’adhésion traité de libre-échange transpacifique (TPP), détricoter l’Omabacare, projeter la construction d’un mur le long de la frontière mexicaine ; il a aussi tenu des propos ambigus sur l’usage de la torture, proféré des menaces tous azimuts, notamment contre l’OTAN, les Nations-Unies et différentes organisations internationales.
C’était suffisant pour qu’il réveille l’autre Amérique, qui se met lentement en ordre de bataille face à ses dérives et à son comportement arrogant, parfois franchement grossier. Le déclic a été provoqué par le décret du président Donald Trump interdisant l’entée sur le territoire américain de ressortissants de sept pays musulmans (Irak, Iran, Libye, Somalie, Soudan, Syrie et Yémen). Le même décret visait à suspendre pour quatre mois l’accueil de réfugiés provenant de pays musulmans, et à mettre fin définitivement fin à l’accueil des réfugiés syriens.
Images émouvantes
Les décisions de Donald Trump ont choqué aussi bien par leur contenu, par l’arrogance qui les sous-tend, que par la pensée dont elles découlent. Elles ont fini par fouetter l’autre Amérique, celle de la contestation, des idées et de la liberté.
Dans les aéroports américains, des scènes incroyables ont été enregistrées. Des milliers de personnes, un peu partout dans le pays, ont convergé vers les aéroports les plus emblématiques pour protester contre la décision de Donald Trump. Des célébrités ont participé à ce vaste mouvement d’opinion, lui donnant une assise politique et intellectuelle.
Le cinéaste Michael Moore, qui avait prédit la victoire de Donald Trump et en avait expliqué les mécanismes, a publié un message sur twitter : « A nos voisins musulmans dans le monde : moi et des millions d’Américains sommes désolés. La majorité des Américains n’ont pas voté pour cet homme », a-t-il écrit.
Le sénateur démocrate Chris Murphy a, de son côté, choisi de s’adresser aux parlementaires américains, également sur twitter. « A mes collègues : ne me parlez plus jamais du leadership moral de l’Amérique si vous choisissez de vous taire aujourd’hui », a-t-il écrit. Son twitt est accompagné de la photo du petit Ailan, l’enfant syrien dont le corps, retrouvé le un rivage de la Méditerranée, avait ému le monde entier il y a deux ans.
Le poids du monde des arts et des TIC
Les réseaux d’influence dans le monde des arts et des technologies, très influents dans la société américaine, sont à leur montés au créneau. Hollywood, déjà hostile au nouveau président, devrait se mobiliser davantage dans les prochaines semaines. L’iranien Asghar Farhadi, l’un des nominés aux Oscars, se trouve interdit d’entrer aux Etats-Unis. Impardonnable, pour les milieux de la culture, en bouillonnement continu.
Les leaders mondiaux des TIC, qui avaient pour la plupart boudé Donald Trump, ont exprimé leur hostilité envers la politique anti-immigration de Donald Trump. Après Google, Facebook et Microsoft ont à leur tour exprimé leurs réserves, voire leur hostilité ouverte. Tim Cook, ténor d’Apple, a été clair, même s’il a tenté d’arrondir les angles. « Apple n’aurait pas existé sans l’immigration, et encore moins prospéré et innové de la façon dont nous le faisons. Ce n’est pas une politique que nous soutenons « , a-t-il écrit. http://on.mash.to/2k5isad
Le père de Steve Jobs, fondateur et icône d’Apple, était d’origine syrienne.
Les contre-pouvoirs du système américain
En plus de cette hostilité de l’opinion, Donald Trump se trouve également confronté, pour la première fois, aux pouvoirs institutionnels qui font la complexité du système politique américain. Une juge fédérale américaine, saisie par des associations des Droits de l’Homme, ont ainsi invalidé le décret anti-immigration du président Trump, a ordonné de n’expulser aucun ressortissant de pays musulman.
La décision de la juge ne tranche pas définitivement la question, mais elle a eu un effet immédiat. Elle a permis de débloquer la situation de milliers de personnes se trouvant dans les aéroports américains, en état de détention de fait. Les scènes de liesse après leurs sorties des zones de sécurité ont fait le tour du monde, et ému l’opinion internationale.
Dans les semaines à venir, Donald Trump sera aussi confronté au Congrès, avec qui il sera contraint de négocier une bonne partie de ses décisions. L’attitude des républicains, majoritaires au Sénat comme à la chambre des représentants, sera déterminante : vont-ils accompagner le président Trump, en essayant de contenir ses dérives et son style arrogant, au risque d’affaiblir les institutions, ou bien vont-ils lui imposer les règles très convenues du congrès, pour tenter de le banaliser? Quoi qu’il en soit, Donald Trump va rapidement découvrir que « l’homme le plus puissant du monde » ne décide pas seul.