Alger, en théorie ville fermée ce vendredi, a été le théâtre de l’une des plus imposantes manifestations depuis le début du Hirak. Une réponse aussi spectaculaire qu’éloquente à la décision du chef de l’Etat-major d’interdire l’accès à la capitale aux personnes qu’il a qualifiées de « malveillantes ».
Pourtant, en début de journée, rien n’indiquait que ce 31 eme vendredi allait attirer grand monde. Jusqu’à 11heures, il n’y avait pratiquement aucun manifestant au centre-ville. Fait inhabituel depuis le début du soulèvement populaire. De plus, les interpellations signalées dès le matin annonçaient une journée difficile.
Aux alentours de 11H30, des centaines de personnes organisent une marche à la rue Didouche Mourad sous le regard des policiers présents en force. En cette journée, le temps était lourd et humide et pour les manifestants, encore peu nombreux, la situation était particulièrement pesante. Mais peu avant 14H00, la situation bascule complètement. Des milliers de personnes descendent la rue Didouche Mourad, dès la fin de la prière du vendredi. Un spectacle impressionnant que certains n’avaient pas vu depuis longtemps.
Répétant des slogans particulièrement acerbes à l’égard du chef de l’Etat-major de l’armée, les marcheurs ont exprimé leur détermination à boycotter les élections présidentielles prévues le 12 décembre prochains. Ils ont exigé aussi la libération des détenus d’opinion. Mais ce vendredi, en plus des critiques habituelles, on a reproché au chef de l’Etat-major de l’armée le fait d’avoir « transgressé la Constitution » en interdisant aux Algériens d’accéder à leur capitale. « Nous sommes venus à Alger en Harragas », répétaient, non sans humour, beaucoup d’entre eux, se considérant comme des Sans-papiers à Alger. Sur les réseaux sociaux, les internautes avaient copieusement commenté la fermeture de la capitale, affichant leur mécontentement et, pour certains, clamant leur solidarité avec « les personnes souhaitant venir à Alger sans visa ». Des images de jeunes arrivés à Alger avec des barques, jeudi soir, avaient été largement commentées sur Facebook.
Vers 14H30, des milliers de manifestants arrivent à la Grande poste par la rue Hassiba Benbouali, avec près de vingt minutes d’avance par rapport aux semaines précédentes. Avant l’heure, mais aussi plus nombreux et manifestement aussi plus déterminés. Peu avant quinze heures, une foule immense se rassemble près de la Grande poste sous une pluie fine qui atténue quelque peu la lourdeur du temps.
Festive et animée, la 31 eme manifestation du Hirak, dans la capitale, était porteuse d’un message : « Alger appartient à tous les Algériens ».