Le président de la république française François Hollande ne sera pas candidat à l’élection présidentielle de mai prochain. Son annonce crée une nouvelle donne pour la gauche loin dans les sondages.
Le retrait de François Hollande de la course pour un second mandat présidentiel a eu l’effet d’une bombe dans la soirée de jeudi en France. Ce scénario n’était pourtant pas exclu. Il devenait une possibilité au fil des semaines depuis la rentrée sociale de septembre dernier et la persistance de l’impopularité du chef de l’Etat français, fragilisé dans son camp par le départ-« trahison » d’Emmanuel Macron son ministre de l’économie aujourd’hui lui-même candidat à la présidentielle.
La parution d’un livre-récit confidentiel du quinquennat « de l’intérieur de l’Elysée » a accentué le fossé avec sa majorité. Mais une telle annonce, à la veille d’un voyage de 48 heures à Abu Dhabi, a pris de revers acteurs et agendas. Elle a surtout évité un délitement du couple président-premier ministre.
Manuel Valls avait, dans un entretien au « Journal du dimanche », sévèrement évalué la capacité de François Hollande à incarner à nouveau un projet progressiste à la prochaine élection présidentielle, se déclarant lui-même prêt pour cette échéance au cas où Hollande y renonçait.
Une sortie des rails «crisogène » qui a rendu la candidature du président à sa succession, confrontée à un record d’impopularité, encore plus compliquée. François Hollande avant prévenu dans le livre « un président ne devrait pas dire ça , cité plus haut, « je n’irai pas aux élections présidentielles pour me faire humilier ». Il a sur, ce coup, tenu parole.
Comme président de la République je me dois de diriger l’État. Comme socialiste, je ne peux me résoudre à la dispersion de la gauche
— François Hollande (@fhollande) 1 décembre 2016
Manuel Valls pas certain de gagner la primaire du PS
Le renoncement de François Hollande à la candidature pour un second mandat a été accompagné d’un appel au rassemblement pour faire gagner « un programme progressiste », et battre celui « aventureux » de François Fillon. Un rassemblement que le président sortant a admis ne pas être en mesure de réaliser dans son camp, la gauche.
La place libérée par le président sortant redonne la main au Parti Socialiste. Elle met son élection primaire au centre de l’actualité politique en France les prochaines semaines, comme l’a été celle de la droite et du centre les deux derniers mois. Le premier ministre Manuel Valls devrait annoncer sa candidature à la présidentielle dans les prochaines heures et hériter de la défense du bilan du quinquennat.
Cette Une est superbe. Merci pour ce moment gros incapable. pic.twitter.com/orZJfjmb5D
— Philae Hollande (@philae_hollande) 2 décembre 2016
Il recevra le soutien de plusieurs ministres de son gouvernement. Probablement aussi, indirect, du président Hollande. Mais Manuel Valls est loin d’avoir partie gagnée dans un vote populaire de la gauche. Sa moindre impopularité – il a 29% d’opinions favorables contre 13% à Hollande- ne le protège pas contre un effet Juppé dans ce type d’élection.
En effet, les primaires mobilisent prioritairement les militants du PS et les électeurs de gauche ; et ne recoupent pas nécessairement les sondages des baromètres de popularité qui intègrent des échantillons de sondés plus variés. De ce point de vue, un candidat aux primaires de la gauche comme Arnaud Montebourg – 22 % d’opinions favorables – ancien ministre de François Hollande entre 2012 et 2014, plus engagé contre l’austérité et la dérégulation, peut coiffer le premier ministre Valls dans un duel entre deux conceptions contrastées de la gauche de gouvernement.
La victoire d’un candidat PS qui n’aurait pas à défendre tout le bilan du quinquennat de Hollande peut perturber la campagne électorale de la droite et le Front national préparés à affronter le président sortant.
Macron et Mélenchon pour rendre inutile le sacrifice de Hollande
Une remise en ordre de marche du PS autour d’élections primaires sans le casse-tête de la place d’un président en exercice dans le dispositif ne suffira pas à éviter l’émiettement de la gauche au premier tour de mai prochain. Or tous les sondages excluent la présence d’un candidat de la gauche au second tour en mai prochain. Ce sont les candidatures annoncées de Emmanuel Macron (centre gauche) et Jean Luc Mélenchon (gauche radicale) qui menacent de rendre le sabordage du président François Hollande vain pour obtenir l’unité de la gauche.
Le second a exprimé à plusieurs reprises son refus de participer à une primaire de gauche organisée de faite par le parti socialiste, tandis que le premier souhaite clairement ne pas être assimilé à la gauche et place sa campagne sur un terrain qui transcende la gauche et la droite. Les deux candidats sont crédités ensemble de plus de 20% d’intention de vote, auxquels il faudra ajouter sans doute 5% de voix captés par le candidat des écologistes, un volant d’électeurs éparpillés et tout à fait indispensables pour espérer faire passer le cap du premier tour à un candidat de la gauche.
En renonçant à la candidature, François Hollande s’est épargné le sort « mortel » de Lionel Jospin éliminé en avril 2002 dès le premier tour des élections présidentielles par Jean Marie Le Pen et Jacques Chirac. Il rebat les cartes de l’élection présidentielle de mai prochain, et redonne une ultime chance à son camp politique la gauche de s’inventer un rebond politique dans l’opinion. Mais tout cela risque de ne pas suffire pour éviter le scénario redouté d’un second tour entre Marine Le Pen et François Fillon.
« ’amélioration de la situation promise est là » a rappelé le président Hollande dans sa courte déclaration, émue, annonçant sa décision. « Le chômage s’est mis à baisser, l’investissement et la construction sont repartis, les déficits stabilisés » . Mais cette amélioration « est arrivée trop tard », pour espérer retentir sur ses chances de réélection. En mai prochain peut être qu’un candidat de sa famille politique en profitera à sa place.