La charge du président Abdelaziz Bouteflika contre les « menaces » présumées de la presse électronique va être traduite en texte de loi avec un souci très transparent d’une volonté de reprendre le « contrôle » de ces nouveaux médias. Le ministre de la communication, Hamid Grine, en a donné un aperçu, dimanche à Oran, en indiquant que les nouveaux textes de loi préconisent une « domiciliation et un hébergement du site en Algérie ».
S’il parait évident qu’un journal algérien doit être domicilié dans le pays – il s’agit d’une entreprise de droit algérien comme une autre – l’obligation hébergement du site en Algérie est une exigence qui ne peut que susciter de la méfiance et fait partie de ce qu’une journaliste a appelé les « faux barrages » dressés devant la presse électronique ».
Le ministre affirme que cette double exigence « fait l’objet d’un consensus », mais on ne sait pas qui sont les acteurs de ce consensus. Les autorités n’ont jamais eu de discussions avec les responsables de journaux électroniques le plus souvent traités en « ennemis ».
Hamid Grine donne pour argument des « sites fantômes » qui ne donnent aucune information sur « leur siège ni l’identité de leurs gérants » pour justifier la nécessité de « remettre de l’ordre » dans une presse électronique qui pourtant n’a jamais été reconnue et qui est interdit de publicité publique.
« On est parfois attaqué sans savoir par qui ni d’où… Certains sites qu’on ne peut qualifier de journaux électroniques peuvent avoir un impact très négatif sur le pays et l’opinion publique » a indiqué Hamid Grine.
Mais l’argument sonne creux pour les spécialistes qui soulignent que les dispositions annoncées ne vont pas faire disparaître les « sites fantômes » et qu’il n’est pas infondé de penser que le « souci d’ordre » évoqué par le ministre ne cible en réalité que des médias électroniques transparents mais qui ne sont pas « aux ordres », soulignent-ils.
Un hébergement dz et un site miroir à l’étranger comme parade
« Le pouvoir est totalement dans la méfiance alors qu’il a bridé le développement du contenu algérien de qualité sur internet, il veut se donner un pouvoir de vie ou de mort sur les sites électroniques. Mais c’est une bataille d’arrière-garde, les journaux électroniques ont la latitude d’avoir un hébergement en Algérie tout en gardant un site miroir à l’étranger. Cela génèrera des couts supplémentaires pour les sites mais ils se préserveront d’un éventuel coup de force » explique un spécialiste
Cette obligation, ajoute-t-il, en citant le cas de la censure de la Radio des sans voix de S.O.S disparus peut servir de justification à des blocages de journaux électroniques mais elle pourrait pousser de plus en plus d’internautes algériens à utiliser les outils anti-censure comme le VPN ou Tor…
« Le jour où le pouvoir comprendra que l’enjeu est d’avoir un contenu algérien dense et de qualité sur Internet est beaucoup plus important que cette obsession vaine du contrôle de l’Internet n’est pas encore arrivé », regrette-t-il.
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