Pour l’ancien ministre des Fiances, depuis 2002, l’Algérie collectionne les contradictions qui font fuir les investisseurs. Et il défend la loi Khelil sur les hydrocarbures qui n’était pas mauvaise, selon lui.
Les enveloppes budgétaires allouées aux secteurs de l’éducation nationale et la santé publique ne doivent pas subir des coupes en ces moments de vaches maigres. Le gouvernement doit faire des économies ailleurs où il ya beaucoup de gaspillage, a plaidé, avec insistance, l’ex-ministre des Finances Abdelatif Benachenhou lors de son intervention ce mercredi à la matinale du Cercle d’action et de réflexion autour de l’entreprise (CARE), tenue à l’hôtel Sofital à Alger.
Pour lui, ces deux secteurs mérites un traitement à part en cette période de baisse drastique des recettes publiques dues à la chute des prix du pétrole. « C’est moi-même qui ai instauré les cantines scolaires dans les écoles. Je l’ai fait car il y a des enfants qui ne mangent qu’à l’école. C’est leur seul repas de la journée », dit-il. Il appelle également à accorder plus d’importance à la formation professionnelle qui n’a pas eu la place qu’elle mérite en Algérie.
Par ailleurs, il s’interroge sur l’opportunité de maintenir le budget actuel alloué au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique. « 3% du Produit intérieur brut est affecté à l’enseignement supérieur. Si on regarde dans les détails, on constate qu’un nombre important d’étudiants sont inscrits en lettres arabes et sciences juridiques », fait-il remarquer. Il ajoute : « Où allons-nous trouver des emplois pour ces gens là ? »
Evoquant la conjoncture économique actuelle du pays, le conférencier reconnait l’existence de la crise. Une crise qui ne date pas d’aujourd’hui selon lui. « Souvenez-vous, la crise financière de 2008 nous provoqué la chute des prix du baril, mais ces derniers ont vite repris », a-t-il rappelé. Il enchaine : « Les gens croyaient que la flèche des prix du baril augmenteront jusqu’à la lune ».
« Nous, les économistes, savions très bien que les prix allaient baisser. Les politiques eux s’attendaient à ce que les prix montent au ciel », ironise-t-il. D’après son analyse, l’Algérie n’a pas réuni les conditions nécessaires pour son décollage économique. Pis, il estime que le pays a fait le contraire de ce qu’il devait faire notamment en matière de réformes économiques.
« En 2002, on avait signé l’accord d’association avec l’Union européenne et en 2005 on revient sur la réforme des hydrocarbures et en 2009 on instaure la règle 49/51 qui régit l’investissement étranger en Algérie et on instaure le crédit documentaire. Ce sont des contradictions qui font fuir les investisseurs », affirme-t-il.
Loi Khelil sur les hydrocarbures n’était pas mauvaise
L’ex-argentier du pays a refusé qu’on qualifie de «dérive» la loi sur les hydrocarbures élaborée en 2004 puis annulée une année plus tard. « Je vous assure que cette loi a été élaborée par des Algériens en Algérie », a-t-il dit en répondant à ceux qui accusaient l’ex-ministre de l’Energie et des Mines Chakib Khelil d’être à la solde des Américains.
Pour mieux vendre sa version, l’orateur a précisé que le partenaire social à savoir la Centrale syndicale était présent à toutes les discussions sur cette loi qui avait fait venir en 2004 le président du Venezuela. Tentant de justifier l’ouverture que prônait par cette loi, l’invité du CARE a rappelé l’incapacité de la Société nationale Sonatrach à assurer seule la chaine de production.
« La Sonatrach n’a pas les moyens technologiques et humains pour être présente dans tout le processus de production des hydrocarbures », a-t-il dit. Il poursuit : ‘’abandon de cette loi a entrainé la fuite des investisseurs vers d’autres territoires. Vous n’avez qu’à voir les résultats des appels d’offres de l’autorité de régulation des hydrocarbures pour confirmer mes propos », a-t-il précisé avant de souligner la réduction des capacités de l’Algérie à liquéfier son gaz.
A propos des partenariats que veut lancer la Sonatrach au cours des prochaines années, l’ex-ministre note que la compagnie française Total sur laquelle mise certains n’est pas intéressée par de nouveaux marchés. « Total travaille pour réduire ses coûts de production de ses marchés existants. Elle ne veut pas d’autres marchés », dit-il.
L’échec de l’accord d’association avec l’EU, la faute à tous
Tout le monde est responsable de l’échec de l’accord d’association entre l’Algérie et l’Union européenne (UE), estime Abdelatif Benachenhou. « Les deux parties ont des parts de responsabilité dans cet échec », pense l’intervenant. Les Européens se sont tournés beaucoup plus à l’est qu’au sud et les Algériens n’ont pas préparé le terrain pour la venue des investisseurs étrangers. « Les USA ont demandé après la chute du mur de Berlin à l’Allemagne et aux Pays bas de se tourner plus vers l’est pour cercler la Russie », indique-t-il. A ce peu d’intérêt européen s’est ajoutée la mauvaise gouvernance interne en Algérie.