Iyad Ag Ghali abandonne totalement la revendication touareg pour basculer dans le jihadisme - Maghreb Emergent

Iyad Ag Ghali abandonne totalement la revendication touareg pour basculer dans le jihadisme

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Le militant touareg Iyad Ag Ghali n’existe plus. Il a cédé la place à un jihadiste qui se fait appeler Aboul Fadhl Iyad Ag Ghali, Emir d’Ansar Eddine. Son objectif: instaurer le califat. 

L’ancien chef du groupe Ansar Eddine, Iyad Ag Ghali, est apparu complètement transformé, dans une nouvelle vidéo mise en ligne mardi. L’homme semble avoir achevé sa mutation : l’ancien leader touareg a disparu, pour laisser place à un chef jihadiste utilisant un langage similaire à celui d’Al-Qaïda, avec un projet publiquement orienté vers la création de l’Etat islamique et la restauration du califat, sans aucun lien avec les revendications touareg.

Portant un long turban blanc et arborant une barbe grisonnante, Iyad Ghali  ne parle pas une seule fois des Touareg et de leurs droits. Par contre, il se situe dans une confrontation contre « les croisés », et il définit l’intervention militaire française comme une croisade. Il n’évoque à aucun moment les mouvements de guérilla touareg. Son discours à contenu essentiellement religieux est celui utilisé traditionnellement par Al-Qaïda, Boko Haram ou les chebab somaliens.

Pour lui, ce qui arrive au Mali est une « épreuve » au sens religieux, une « croisade ». Les mouvements touareg qui refusent la présence française combattent les athées (kouffar). « L’objectif suprême » de cette lutte est « d’établir la loi de Dieu sur tous nos territoires », dit-il. Les mouvements touareg qui avaient lancé l’insurrection au nord du mali avaient, quant à eux, pour objectif « d’instaurer la loi de Dieu » au Mali.

Etendard de l’Etat islamique

Citant abondamment versets du Coran et hadiths, celui qui se fait désormais appeler «Aboul Fadhl Iyad Ag Ghali, Emir d’Ansar Eddine » parle d’une voix monocorde, exclusivement en arabe classique. Il rend hommage aux « moudjahidine » au Nigéria, en Somalie, en Centrafrique, ainsi qu’en Irak et au Cham, au Yémen, etc. Il situe son combat dans une perspective internationaliste.

Iyad Ghali ne cite pas pour autant Al-Qaïda, alors qu’il se présente dans un décor similaire à celui de l’organisation de Ben Laden. A sa droite, est déployé l’étendard noir d’AQMI, et à sa gauche, un pistolet mitrailleur kalachnikov. http://bit.ly/1osiotR

La vidéo comporte des reportages vidéo utilisés pour étayer ses démonstrations. Ainsi, Iyad Ghali n’évoque pas directement la position de l’Algérie concernant la crise malienne, se contentant de déplorer que des pays de la région aient prêté main forte à la France. Ses propos sont toutefois suivis par un passage comportant des images du président François Hollande remerciant l’Algérie et le Maroc qui avaient autorisé le survol de leur territoire par les avions français se rendant au Mali.

« Croisade » française

La vidéo comprend aussi une violente diatribe contre le pourvoir malien et l’armée française, accusée de « commettre des crimes », de « détruire des mosquées et des écoles ». Selon lui, les opérations contre les unités françaises se poursuivent. La vidéo comprend des images de lancement de roquettes et de missiles contre les positions françaises, sans qu’il soit possible de situer le lieu ou la nature du matériel utilisé. Selon Iyad Ghali, cette stratégie a porté ses fruits, contraignant la France à entamer un retrait, en remplaçant ses forces par des « mercenaires » africains. Il s’est déclaré « prêt à s’unir avec les frères au Mali pour faire face à la croisade » menée par la France.

Iyad Ghali, une des figures de la contestation touareg, avait participé à toutes les rebellions depuis deux décennies. Il a longtemps été considéré comme proche de l’Algérie. Il avait même occupé le poste de consul du Mali à Djedda, en Arabie Saoudite, aux termes d’un accord négocié par l’Algérie après la rébellion de 2006. Mais l’ancien militant touareg a progressivement basculé vers le jihadisme, jusqu’à supplanter le MNLA (Mouvement National de Libération de l’Azawed). En janvier 2013, le MNLA avait lancé une offensive au nord du Mali, réussissant à prendre possession de vastes territoires au nord du pays. Mais Ansar Eddine, qui prospérait à la faveur du démantèlement de l’Etat libyen, a pris de vitesse le MNLA et lui a ravi ces conquêtes.

Alliances douteuses

Iyad Ghali s’était allié avec le MUJAO (Mouvement pour l’Unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest) et Al-Qaïda au Maghreb Islamique. Malgré ce revirement, les autorités algériennes continuaient à traiter avec lui, jusqu’à fin 2013, quand Iyad Ag Ghali a été sommé de se démarquer. L’Algérie le ménageait notamment pour tenter de récupérer ses otages, six employés du consulat de Gao, enlevés par le MUJAO.

Des informations contradictoires avaient circulé sur les contacts entre Iyad Ag Ghali et les autorités algériennes. Celui-ci semblait cependant avoir coupé les ponts avec les revendications touareg traditionnelles, pour rejoindre une nébuleuse jihadiste qui a essaimé au Sahel et menace désormais de s’installer en Libye.

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