L’ex-PDG de la SNVI était hier « L’invité du direct » de Radio M., la webradio de Maghreb Emergent, Radio M. Pour lui, tel que calculé par Renault Algérie, le taux d’intégration de la production de l’usine de Oued Tlélat, « intègre les services, les assurances, etc. » et non seulement « la production à l’intérieur de l’usine ».
Sommes-nous, après quarante ans d’attente, en train d’assister à la naissance en Algérie d’une industrie de montage automobile ? Oui, répond, sans hésitation, l’ex-PDG de la Société nationale des véhicules industriels (SNVI). Pour celui qui est aujourd’hui un expert industriel écouté, le facteur déclenchant a été « la volonté politique forte qui s’est manifestée au cours des dernières années de faire de la filière automobile une priorité ». Cette volonté, s’est notamment traduite, explique-t-il, par la définition d’un cadre juridique dans lequel l’agrément donné aux concessionnaires automobiles installés en Algérie est conditionné par la mise en œuvre d’une activité industrielle. « Les concessionnaires sont aujourd’hui obligés de faire du montage s’ils veulent conserver leurs parts de marché », affirme Mokhtar Chahboub.
Les premières négociations
A la tête de la SNVI en 2009, Mokhtar Chahboub a été un acteur privilégié des premiers pas et des premières négociations associées à la naissance de cette industrie de montage automobile nationale dont il connaît bien les principaux enjeux. Paradoxalement, il souligne que les premiers contacts pris à cette date ont été une initiative du groupe Renault, qui a adressé, dès 2009, une lettre d’intention aux autorités algériennes.
Les longues négociations que l’ancien PDG de SNVI a dirigées en tant que partenaire industriel du groupe français ont été accompagnées par une évolution du projet, qui est passé par une « première option exploitant le bassin d’emploi de Rouiba et la proximité du port d’Alger avec un objectif de montage de 50.000 véhicules ». Plus tard, après avoir envisagé 6 ou 7 centres d’implantation différents, le site de Oued Tlelat, dans la région d’Oran, a finalement été retenu pour des raisons où « la recherche de l’équilibre régional en matière d’implantation industrielle a été le facteur déterminant ».Entre temps les ambitions du projet avaient été revues à la hausse et « l’objectif de production à terme était désormais de 150.000 véhicules ».
L’enjeu du taux d’intégration
La culture économique de Mokhtar Chahboub est d’abord une culture industrielle. Il évoque un « passage nécessaire par le SKD » mais « qui ne doit pas durer trop longtemps ».L’ancien PDG de la SNVI rappelle que le projet négocié initialement avec Renault « prévoyait un taux d’intégration de 35 % au bout de quelques années ».Les chiffres communiqués récemment par la direction de Renault Algérie qui mentionnent un « taux d’intégration de 30 % au bout de 2 années d’activité de l’usine de Oued Tlelat » lui inspirent un scepticisme évident. « Tout dépend, dit- il, de la définition qu’on retient pour le taux d’intégration. La nôtre retenait la notion d’intégration de la production à l’intérieur de l’usine. Les chiffres donnés par Renault ces dernières semaines se basent sur une définition économique plus large qui intègre les services, les assurances, etc. ».
Un débat qui renvoie en réalité au problème essentiel de l’implication progressive des sous- traitants algériens dans l’industrie de montage nationale. Pour Mokhtar Chahboub, l’Algérie dispose d’industriels qui peuvent participer à ce processus d’intégration dans l’industrie automobile « pour peu que les partenaires étrangers les assistent et contribuent loyalement aux mises à niveau nécessaires ». Un travail préliminaire avait identifié dans ce domaine « une liste d’une soixantaine d’entreprise algériennes qui étaient susceptibles de participer au processus d’intégration dans l’usine de Oued Tlélat ».
Un demi-million de véhicules produits en Algérie en 2020 ?
L’usine Renault a-t-elle ouvert une brèche au sein du front des constructeurs, sur un marché algérien où les projets, déjà opérationnels ou annoncés, semblent se multiplier au cours des derniers mois ? Pas forcément selon Mokhtar Chahboub, pour qui « 4 ou 5 projets étaient en cours de maturation depuis longtemps ». L’addition des objectifs annoncés qui conduit à envisager une production locale de près de 500.000 véhicules d’ici la fin de la décennie ne semble pas non plus démesurée ni hors de portée pour l’ex PDG de la SNVI qui rappelle qu’ « un pays comme l’Iran produit actuellement 1,5millions de véhicules ».
Mokhtar Chahboub estime, en réalité, que les vrais enjeux pour l’avenir sont d’ « amener les constructeurs, à l’image de ce qui se fait actuellement au Maroc, à se faire accompagner par leurs équipementiers qui constitueront eux même en Algérie leurs réseaux de sous-traitants ». Les enjeux à terme sont aussi financiers et liés à la « balance devises »de la filière.
Comment payer la facture d’importation des composants d’une production locale d’un demi-million de véhicules ? L’ex-PDG de la SNVI rappelle que « dans la version initiale du projet Renault, La partie algérienne avait négocié 15 à 25% de la production pour l’exportation ».
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