Ali Harbi, manager du cabinet AHC Consulting, membre de CARE (centre de réflexion et d’action autour de l’entreprise) et de Hawkama El Djazair considère qu’on fait une erreur stratégique en focalisant sur le nombre de créations des PME au lieu de se pencher sur leur viabilité. «Nous pourrons avoir moins de créations, mais des entreprises plus viables » dit-il. L’appui à la création d’entreprises doit être orienté vers les projets à potentiel d’exportation à moyen terme et ceux qui ont un meilleur taux d’intégration.
La loi sur les PME procède à une adaptation de la définition de la PME par l’actualisation des seuils des chiffres d’affaires et des totaux des bilans par catégorie de PME, en rapport avec l’évolution de la réalité économique dont la valeur du dinar, l’inflation et d’autres paramètres, est-ce suffisant pour booster la création de ces entreprises?
Bien sûr que la création d’entreprises ne dépend pas de la définition de la PME donnée dans un texte de loi, mais de paramètres économiques liés au contexte en général, aux opportunités d’affaires et au climat des affaires en particulier.
Cet ajustement des critères de définition des PME a surtout pour objectif d’élargir le champ des PME éligibles aux avantages des différents dispositifs d’appui aux PME et c’est une bonne chose, surtout dans le segment des entreprises dites ETI. C’est à dire les entreprises de taille intermédiaire, et c’est dans ce gisement que nous devons aller chercher nos champions industriels. Nous devons donc les appuyer.
Selon le directeur général de la PME, Abdelghani Mebarek, la loi permet à la PME cotée en Bourse d’émarger aux programmes et mesures de soutien prévus par le texte législatif. Pensez-vous que ces entreprises sont assez encouragées pour intégrer la Bourse ?
D’un point de vue de principe, c’est une bonne chose d’intégrer des dispositions d’appui aux PME qui souhaitent aller en Bourse. Cela permettra de définir des issues des engagements des investisseurs institutionnels et fonds d’investissement qui souhaitent financer les PME en fonds propres.
Le problème actuel, c’est que la Bourse d’Alger ne fonctionne pas, et cela n’est pas du ressort de la loi d’orientation sur la PME. Il faut travailler sur les raisons qui bloquent la Bourse d’Alger et la rendent non attractive pour les entreprises en général et les PME en particulier. C’est une question transversale qui concerne plusieurs ministères.
L’Agence nationale de développement et de modernisation des PME (Andpme) est-elle outillée en matière de mise en œuvre de la politique de développement de la PME ?
Sur la période passée, l’expérience a démontré que l’ANDPME n’était pas outillée et n’avait pas assez de prérogatives pour mettre en place une politique de développement de la PME. A l’avenir, la nouvelle loi d’orientation définit un organe avec plus de prérogatives, et cela devrait être l’ANDPME relookée et reconfigurée.
Il faut attendre les textes d’application pour statuer et donner un avis sur les prérogatives opérationnelles, et les ressources qui seront allouées à cette agence. Dans tous les cas de figure, un pas important sera fait avec un nouveau statut juridique pour cette agence et l’intégration des prérogatives relatives aux phases de création d’entreprise. Ensuite il faudra voir de près la manière dont les textes seront mis en œuvre.
L’Algérie a-t-elle des chances d’augmenter le nombre de PME afin de créer davantage d’emplois ?
L’Algérie est un pays d’opportunités qui est actuellement bridé par un environnement des affaires assez défavorable. Le potentiel existe et il faut le transformer en réalité économique. Maintenant il faut savoir que la focalisation sur le nombre d’entreprises à créer, de même que sur le nombre d’entreprises à mettre à niveau, est une erreur stratégique.
La question qui se pose aujourd’hui c’est quelles entreprises nous voulons ? Il s’agit d’un problème de pérennité et de viabilité du système économique algérien dans un contexte de transition vers une économie moins dépendante des hydrocarbures et de rareté des ressources en devises. L’emploi est bien sur une variable mais pas la seule.
Dans ce contexte il faut orienter l’appui à la création d’entreprises vers les projets ayant un potentiel d’exportation à moyen terme, ainsi que ceux présentant un meilleur taux d’intégration. Nous pourrons avoir moins de créations, mais des entreprises plus viables.