L’Algérie a importé 24% de céréales supplémentaires durant les onze premiers mois de 2014. Une hausse qui confirme l’inefficacité des mesures destinées à encourager la production.
L’agriculture algérienne continue à surprendre. Alors que tous les voyants semblaient au vert, la facture des importations de produits agricole continue d’augmenter. Cette évolution semble défier les lois économiques. En effet, les autorités annoncent une hausse continue des aides, les spécialistes s’accordent à dire que le pays dispose d’une marge de progression très importante, le ministère de l’agriculture annonce de nouveaux records battus à chaque saison pour la production- hormis les céréales- mais la courbe des importations ne veut pas fléchir.
Durant les onze premiers mois de 2014, les importations de céréales ont atteint 3.29 milliards de dollars. C’est déjà plus que toute l’année 2013. La hausse est de 12.52%. En quantités, la hausse est encore plus significative, car elle est de 24.4%. L’Algérie a bénéficié d’une conjoncture favorable, avec un repli des prix sur le marché international, conjugué à un raffermissement du dollar, ce qui a permis d’atténuer la facture.
Mais la production locale a chuté de manière significative, pour atteindre 34 millions de quintaux, contre 49 millions en 2013. Selon Omar Zeghouane, directeur de l’institut des grandes cultures, 800.000 hectares sur les 3.3 millions d’hectares dédiés aux céréales ont été perdus, ce qui représente le quart des superficies cultivées.
Importante marge de progression
Malgré cette débâcle, le discours rassurant est toujours en vigueur. Mohamed Yacine Ferfara, DG du CREAD (centre de recherches en Economie appliquée), a parlé de la possibilité de « gains énormes de productivité dans l’agriculture, notamment dans les céréales ». Il a évoqué des expériences qui ont donné 80 à 100 quintaux à l’hectare, alors que la moyenne nationale est d’à peine quinze quintaux à l’hectare.
Le Directeur général de l’OAIC parle, quant à lui, d’aides massives aux fellahs. L’irrigation d’appoint, considéré comme la grande solution, tarde à se mettre en place. Les chiffres sur les superficies déjà irriguées font polémique. Elles vont du simple au double. M. Omar Zeghouane affirme que les surfaces dédiées aux céréales bénéficiant déjà d’une irrigation d’appoint atteignent 200.000 hectares. L’objectif de 350.000 hectares initialement fixé n’a pas été atteint, selon lui. Dans le même temps, l’OAIC parle de 600.000 hectares déjà irrigués, et affiche un objectif d’un million d’hectares. Les chiffres de l’OAIC sont visiblement faux. Avec un rendement de 50 quintaux à l’hectare seulement pour les surfaces irriguées, ce qui constitue un plancher, la production de céréales dépasserait tout ce qui a été réalisé en 2014.
Défaillances
Ces maigres résultats ont été obtenus malgré des aides massives de l’Etat, sous différentes formes, combinant des facilités de crédit, des crédits bonifiés, ou la garantie de prix à la production. L’aide de l’Etat a atteint 200 milliards de dinars en 2013 (2.5 milliards de dollars), et devrait être portées à 300 milliards (3.75 milliards de dollars), selon M. Zeghouane. Mais ces aides ont peu d’effet sur la production.
Le Syrpalac, système de soutien à la production de pomme de terre, a échoué, reconnait son patron. Mais les raisons invoquées concernent le marché, et le fonctionnement, pas la cohérence du système. C’est précisément la nature du système d’aide qui doit être revue. Pour l’heure, les acteurs du secteur sont plus soucieux de s’introduire dans les combines liées à l’agriculture que par la production. Ils veulent capter l’aide de l’Etat, non produire. « La production de céréales et de pomme de terre est systématiquement surévaluée, ce qui permet de gonfler les aides », selon un fellah. Sinon, comment expliquer que la pomme de terre atteigne 100 dinars sur le marché de détail, alors qu’officiellement, la production a augmenté de plus de dix pour cent par an durant quatre années consécutives?