La part de la production algérienne de céréales ne représente en 2016 que le quart de la consommation du pays. Une évolution qui contredit toutes les projections officielles.
Depuis le pic de 2009, la production algérienne de céréales continue de baisser, selon un rythme qui semble inexorable, alors que le discours officiel évoque toujours des objectifs d’autosuffisance à moyen terme. Selon le ministre de l’agriculture, Abdesslam Chelgham, la production de céréales pour la campagne 2016 qui vient de s’achever atteint à peine 33 millions de quintaux, en baisse de 21% par rapport à la déjà mauvaise récolte de 2015, qui avait atteint 39 millions de quintaux.
En 2015, ce sont les wilayas de l’est (Khenchela, Oum El-Bouaghi, Batna, Tébessa), qui avaient fortement souffert de la sécheresse. En 2016, ce sont Tiaret, Sidi Bel-Abbès et Aïn-Témouchent, dans l’ouest, qui ont vu leur production baisser fortement.
Le patron de l’Union Nationale des paysans algériens (UNPA), Mohamed Alioui, avait utilisé un ton encore plus alarmiste pour parler de la production de 2016. Selon lui, la baisse devrait atteindre 40%, a-t-il dit. M. Alioui a dressé un tableau inquiétant pour obtenir un soutien plus conséquent en faveur des fellahs, mais aussi pour rappeler l’extrême précarité qui entoure le secteur en raison de la sécheresse : l’automne 2015 avait été particulièrement sec, avec seulement une à deux journées de pluie, selon les régions. Ce n’est qu’à partir de la mi-février que des pluies significatives oint été enregistrées.
Approximations
D’autre part, les chiffres contradictoires et approximatifs sur la production agricole sont courants en Algérie. Ce manque de rigueur ne peut cependant occulter une réalité : la production est en baisse constante depuis 2009.
A cette date, la production avait atteint un record de 61 millions de quintaux, record absolu pour l’Algérie. Le ministre de l’agriculture de l’époque, M. Rachid Benaïssa, affirmait alors que la production agricole de l’Algérie a augmenté de 13% par an pendant plusieurs années consécutives. Les chiffres d’aujourd’hui montrent à la fois la fragilité de la céréaliculture, trop dépendante d’une pluviométrie capricieuse, et le manque de fiabilité des chiffres publiés par différents organismes officiels.
Selon les informations rendues publiques, l’Algérie a importé 92,5 millions de quintaux de céréales en 2015, ce qui en fait l’un des plus gros importateurs au monde, contre une production légèrement inférieure à 40 millions de quintaux durant la même année. Au même rythme de consommation, le pays aurait produit en 2016 à peine un quart de sa consommation, et les importations pourraient exploser pour atteindre les 100 millions de quintaux.
Projections fantaisistes
Ces chiffres contredisent totalement les projections officielles, qui frisent le ridicule. Ainsi, le directeur général de l’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC), Mohamed Belabdi, déclarait il y a un an à l’APS que l’Algérie pourrait atteindre l’autosuffisance en blé dur dès 2019. Ce résultat serait atteint grâce au lancement d’un vaste plan d’irrigation d’appoint. Pour l’heure toutefois, seuls 240.000 hectares sur les 3.4 millions d’hectares consacrés aux céréales sont irrigués. Un objectif a été fixé pour aller 600.000 hectares en 2019, un chiffre revu à la hausse ensuite : on parle désormais d’un million d’hectares. Mais aucune démarche sérieuse n’a été lancée y arriver.
Mettre en place l’infrastructure nécessaire et mobiliser les ressources en eau est un travail complexe, mais l’enjeu est important : la production moyenne en surface non irriguée tourne autour de 20 quintaux à l’hectare, alors qu’en surface irriguée, elle dépasse 60 quintaux à l’hectare. Le décalage est encore plus frappant quand on sait que près de 80% des surfaces sont perdues en cas de sécheresse sévère, comme cela s’est produit en 2015 dans les wilayas de Khenchela et Oum El-Bouaghi.